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et dont le Christ disait : Si vous aviez de la foi comme un grain de sénevé, vous diriez à cette montagne : transporte-toi, et elle se transporterait. (Mt. 17,19) tin jour que les disciples ne pouvaient délivrer du démon un possédé, et qu’ils voulaient savoir la cause de leur impuissance, il leur fit entendre que la foi leur manquait : C’est à cause de votre incrédulité. C’est encore de cette foi que parlait Paul, quand il disait : Si j’ai la foi qui transporte les montagnes. (1Cor. 13,2) Et quand Pierre, marchant sur la mer, se crut en danger d’être englouti, le Christ lui adressa le même reproche : Homme de peu de foi, pourquoi as-tu douté ? (Mt. 14,31) On appelle donc foi cette vertu qui produit les miracles et les prodiges. On appelle encore foi ce qui nous conduit à la connaissance de Dieu et qui fait de chacun de nous des fidèles : c’est dans ce sens qu’il dit aux Romains : Je rends grâces à mon Dieu par Jésus-Christ de ce que votre foi est annoncée dans tout l’univers. (Rom. 1,8) Et aux Thessaloniciens : non seulement vous êtes cause que la parole du Seigneur s’est répandue dans la Macédoine et dans l’Achaïe, mais même la foi que voies avez en Dieu est devenue célèbre partout. (1Thes. 1,8) De quelle foi parle-t-il en cet endroit ? C’est évidemment de la foi de connaissance ; la suite le prouve : Nous croyons, dit-il, et c’est pourquoi nous parlons. Que croyons-nous ? Que celui qui a ressuscité le Christ, nous ressuscitera nous-mêmes par sa vertu. (2Cor. 4,14) Mais pourquoi l’appelle-t-il esprit de foi et la compte-t-il au nombre des grâces ? En effet, si la foi est une grâce, un don du Saint-Esprit, si elle n’est point notre conquête, les incrédules ne seront as punis, ni les fidèles récompensés. Car, telle est la nature des grâces, qu’elles ne sont suivies, ni de récompenses, ni de punitions. Un don n’est point un mérite chez celui qui le reçoit, c’est un effet de la munificence de celui qui le donne. C’est pourquoi Jésus défendit à ses disciples de se réjouir du pouvoir qu’ils avaient dé chasser les démons, et beaucoup d’entre ceux qui avaient prophétisé en son nom et fait de grands miracles furent exclus par lui du royaume des cieux, parce qu’ils ne se sentaient aucun mérite propre et voulaient se sauver par les dons qu’ils avaient reçus.
5. Mais si la nature de la foi est telle que nous n’en devions rien à nous-mêmes, que nous la tenions tout entière de la grâce du Saint-Esprit, si c’est d’elle-même qu’elle entre en nos âmes, si elle ne nous doit procurer aucune récompense, pourquoi l’Apôtre a-t-il dit : Il faut croire de cœur pour obtenir la justice et confesser la foi par ses paroles pour obtenir le salut ? (Rom. X, 10) C’est que chez l’homme qui croit, la foi devient un mérite de sa vertu. Paul le ferait-il entendre ailleurs par ces paroles : La foi d’un homme qui, sans faire des œuvres, croit en celui qui justifie le pécheur, lui est imputée à justice (Rom. 4,5), si tout dans la foi nous venait de la grâce du Saint-Esprit ? Pourquoi, à cause de cette même foi, comblerait-il de louanges le patriarche Abraham, qui, méprisant le présent, eut la foi et espéra contre toute espérance ? Pourquoi donc dit-il l’Esprit de foi ? Pour marquer que notre premier pas dans la foi dépend de notre bonne volonté, de notre docilité à la voix de Dieu ; mais que, quand la foi est entrée en nos, âmes, nous avons besoin du secours du Saint-Esprit pour la garder ferme et inébranlable. Car, ni Dieu, ni la grâce du Saint-Esprit ne préviennent notre volonté ; Dieu, il est vrai, nous appelle, mais il attend que nous venions librement et de notre gré, et quand nous sommes venus, il nous prête tout son secours[1]. Comme, en effet, le démon, dès que nous nous sommes rendus à la foi, se glisse en nos âmes pour en arracher cette précieuse semence et y répandre l’ivraie afin d’étouffer le bon grain, nous avons alors besoin du secours du Saint-Esprit, qui, semblable à un laboureur actif s’établit en nos cœurs et par ses soins prévoyants, protège contre toutes les atteintes la Plante naissante de la foi. Aussi Paul écrivait-il aux Thessaloniciens : N’éteignez pas l’Esprit (1Thes. 5,19), leur montrant ainsi qu’avec la grâce de l’Esprit-Saint ils seraient désormais invincibles au démon et à l’abri de ses pièges. Car, si personne ne peut dire Seigneur Jésus si ce n’est en l’Esprit-Saint, à plus [; orle raison ne pourra-t-il avoir sans lui une foi ferme et assurée.
6. Mais comment nous attirer le secours de l’Esprit-Saint et le persuader de rester en nous Par les bonnes œuvres et l’honnêteté de notre vie. De même que la lumière de la lampe se conserve par l’huile, et que, l’huile épuisée, la lumière s’éteint, de même la grâce du Saint-Esprit, tant que nous faisons de bonnes œuvres et que nous répandons sur nos

  1. Voyez l’avertissement.