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la puissance, ni de la noblesse, ni d’aucun secours humain, elle sera capable de tout vaincre, de tout surmonter, et pourra, parle moyen d’hommes simples, humbles, indigents, pauvres, communs, subjuguer les impies, les rhéteurs, les philosophes, les tyrans ; en un mot, la terre entière.
C’est là ce qui faisait dire à saint Paul : Ce n’est pas avec l’ascendant d’une sublime éloquence que je suis venu vous annoncer l’Évangile de Jésus-Christ (1Co. 2, 1) ; et : Dieu a choisi ce qui est folie selon le monde pour confondre les sages. (1Co. 1, 27) Il ne dit pas simplement, ce qui est folie, mais ce qui est folie selon le monde ; c’est qu’en effet tout ce que le monde regarde comme folie, n’est pas toujours tel au jugement de Dieu ; au contraire beaucoup d’insensés selon le monde sont sages selon Dieu, beaucoup de pauvres selon le monde sont riches selon Dieu. Par exemple le Lazare, si pauvre dans le monde, se trouve parmi les plus riches dans les cieux. (Luc. 16, 20) Cette folie selon le monde désigne, dans le langage de l’Apôtre, ceux qui n’ont pas la langue exercée, ceux qui ignorent la science profane, ceux qui ne savent point parler agréablement. Et voilà, dit l’Apôtre, ceux que Dieu a choisis pour confondre les sages. Et comment, dites-vous, sont-ils confondus ? Par les faits, par l’expérience. Voici une pauvre veuve, une mendiante assise à la porte de votre maison peut-être même est-elle estropiée ; vous l’interrogez sur l’immortalité de l’âme, sur la résurrection des corps, sur la Providence de Dieu, sur la rétribution proportionnée aux mérites, sur les comptes à rendre en l’autre monde, sur le tribunal redoutable, sur les biens réservés à ceux qui pratiquent la vertu, sur les maux dont sont menacés les pécheurs, sur d’autres questions de ce genre, et elle vous fait des réponses dont la plénitude, et l’exactitude ne laissent rien à désirer ; voyez au contraire ce philosophe si fier de sa chevelure et de son bâton, proposez-lui les mêmes questions : il dissertera longuement, son bavardage ne tarira pas durant des, heures ; mais quand il faudra conclure, il ne pourra pas dire un seul mot, pas articuler une syllabe. Ce contraste vous montrera comment Dieu a choisi ce qui est fou selon le monde, pour confondre les sages. Des choses que ces superbes et ces orgueilleux n’ont pas trouvées, parce qu’ils se sont privés des lumières du Saint-Esprit, parce qu’ils n’ont rien voulu devoir qu’à leur propre raison, des mendiants, des misérables, des ignorants les ont apprises à la perfection en se faisant les disciples de la Sagesse d’en haut. L’Apôtre va plus loin dans ses attaqués contre la sagesse profane, et il dit : La sagesse de ce monde est folie au jugement de Dieu. (1Co. 3, 19) Pour éloigner les fidèles de cette sagesse mondaine il leur disait encore avec autant de dédain que de force : Si quelqu’un parmi vous se croit sage de la sagesse de ce siècle, qu’il devienne fou pour devenir sage de la vraie sagesse ; et encore : Il est écrit, je perdrai la, sagesse des sages, et je réprouverai la prudence des prudents (1Co. 1, 19) ; et encore : Le Seigneur connaît les pensées des hommes, et il en sait toute la vanité. (1Co. 3, 27)
6. Ces citations démontrent suffisamment que les Corinthiens possédaient la sagesse de ce monde : leur orgueil, leur vaine gloire se voient également dans la même épître. Par exemple, après quelques paroles sévères prononcées au sujet de l’incestueux, il ajoute : Et vous êtes encore enflés d’orgueil ! (1Co. 5, 2) Que cet orgueil donnait naissance à des querelles qui les divisaient, écoutez-en la preuve : Car puisqu’il y a parmi vous, des querelles, des jalousies et des dissensions, n’est-il pas visible que vous êtes charnels, et que vous vous conduisez selon l’homme ? (1Co. 3, 3) Quelles étaient les conséquences de ces querelles ? Ils se disaient partisans de tels ou tels maîtres et docteurs. Ce que je veux dire, c’est que chacun dé vous se met d’un parti en disant : Pour moi je suis disciple de Paul ; et moi je le suis d’Apollo ; moi, de Céphas. (1Co. 1, 12) Il nomme Paul, Apollo, Cephas, non qu’ils fussent les chefs que les Corinthiens se donnaient, mais il dissimule par ces noms les véritables auteurs de la division qu’une dénonciation précise et publique aurait peut-être portés à l’entêtement et à l’impudence. Ce n’était pas autour dé Paul, de Pierre, ni d’Apollo que se formaient les sectes, mais autour de certains autres docteurs, comme il est facile de s’en convaincre par ce qui suit. En effet, après avoir repris les Corinthiens au sujet de ces discordes, il ajoute : Au reste, mes frères, j’ai personnifié ces choses en moi et en Apollo à cause de vous, afin que vous appreniez à ne pas avoir des pensées contraires à ce qui vous a été écrit, en sorte que nul ne s’enfle contre un autre au sujet de qui que ce soit. (1Co. 4, 6)