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modéré envers tout le monde, capable d’instruire, patient envers ceux qui ont fait des fautes ; il doit reprendre avec douceur ceux qui résistent à la vérité, dans l’espoir que Dieu pourra leur donner un jour l’esprit de pénitence pour la leur faire connaître, et qu’ainsi ils sortiront des pièges du démon, qui les tient captifs et les assujettit à ses lois. (2Tim. 2,24, 25 et 26) Voulez-vous savoir comment il traite avec les pécheurs, écoutez ce qu’il dit en écrivant aux Corinthiens : J’appréhende de ne pas vous trouver, à mon arrivée, tels que je voudrais ; et un peu, plus bas : J’appréhende que Dieu ne m’humilie lorsque je serai revenu chez vous, et que je ne sois obligé d’en pleurer plusieurs, qui étant déjà tombés dans les impuretés, les fornications et les dérèglements infâmes, n’en ont point fait pénitence. (2Cor. 12,20,21) Il disait en écrivant aux Galates : Mes petits enfants, pour qui je sens de nouveau les douleurs de l’enfantement, jusqu’à ce que Jésus-Christ soit formé en vous. (Gal. 6,19) Écoutez, au sujet de l’incestueux de Corinthe, comment il s’afflige autant que le coupable, comment il sollicite pour lui les Corinthiens, en leur disant : Donnez-lui des preuves effectives de votre charité et de votre amour. (2Cor. 2,8). Et lorsqu’il le retranchait de la communion des fidèles, il ne le faisait qu’avec une grande abondance de larmes : Je vous ai écrit, dit-il, dans une extrême affliction, dans un serrement de cœur, et avec une grande abondance de larmes, non dans le dessein de vous attrister, mais pour vous faire connaître la charité toute particulière que j’ai pour vous. (2Cor. 2,4) il dit aux mêmes Corinthiens : J’ai vécu avec les Juifs comme juif, avec ceux qui étaient sous la loi, comme si j’eusse été sous la loi. Je me suis rendu faible avec les faibles, pour gagner les faibles. Je me suis fait tout à tous pour les sauver tous. (1Cor. 9,20, 21 et 22) Il dit encore ailleurs : Afin que je présente tous les hommes parfaits en Jésus-Christ. (Col. 1,28) Voyez-vous une âme qui s’élève au-dessus de toute la terre ? il désirait de présenter tous les hommes à Dieu, et il les lui a présentés tous autant qu’il était en lui. Comme s’il eût été le père du monde entier, il s’inquiétait, il s’agitait, il courait, il s’empressait d’introduire tous les hommes dans le royaume céleste, ménageant les uns, exhortant les autres, priant, suppliant, promettant, effrayant les démons, chassant les corrupteurs des âmes, agissant en personne, par lettres, par des discours, par des effets, par ses disciples, par lui-même, relevant ceux qui étaient tombés, affermissant ceux qui étaient debout, guérissant les infirmes, animant les lâches, épouvantant les ennemis de la foi par ses menaces, ou les intimidant de ses regards, se trouvant partout comme un excellent général, défendant la tête, les flancs, l’arrière-garde, les bagages, centurion, tribun, soldat, sentinelle, se faisant tout pour le bien de l’armée.
Et ce n’était pas seulement dans les objets spirituels, mais aussi dans les temporels, qu’il montrait ce zèle et ce soin attentif. Écoutez comme il écrit à tout un peuple pour une seule femme : Je vous recommande notre sœur Phébé, diaconesse de l’église de Cenchrée, afin que vous la receviez au nom du Seigneur, comme on doit recevoir les saints ; et que vous l’assistiez dans toutes les choses où elle pourrait avoir besoin de vous. (Rom. 16,1 et 2) Vous connaissez, écrit-il à ce même peuple, la famille de Stéphanas ; vous savez ce qu’ils ont été et comment ils se sont conduits : ayez pour eux la déférence qui leur est due. (I, Cor. XVI, 15) En effet, c’est l’usage des saints, de ne pas négliger, dans leur amitié, même ces sortes de secours. C’est ainsi que le prophète Élisée n’aidait pas seulement dans les choses spirituelles la femme qui l’avait reçu, mais qu’il s’empressait de lui témoigner sa reconnaissance, même dans les choses temporelles : Avez-vous quelque affaire, lui dit-il, et puis je parle pour vous au roi ou à son ministre de confiance? (2R. 4,13) Et pourquoi s’étonner que la charité de saint Paul usât des recommandations par lettres, lorsque faisant venir des personnes, il n’a pas cru indigne de lui de s’occuper des frais de leur voyage, et d’en faire mention dans une lettre : Donnez, écrit-il à Tite, donnez le meilleur ordre que vous pourrez pour le voyage d’Apollon et de Zénas, le jurisconsulte, afin qu’il ne leur manque rien. (Tit. 3,13) Mais s’il écrivait avec tant d’ardeur pour recommander des personnes qu’il faisait venir, à plus forte raison eût-il tout fait s’il les eût vues en péril. Voyez, lorsqu’il écrit à Philémon, avec quel zèle il s’emploie pour Onésime, combien sa lettre est tournée adroitement et pleine de tendresse. Or, un homme qui n’a pas craint d’écrire une lettre exprès pour un seul esclave, et pour un esclave fugitif qui avait volé son maître, songez quel il