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leurs bouches étaient comme des trésors de rois où se trouvait une réserve de guérisons d’un prix inestimable ; chaque parole qui s’échappait de leurs lèvres faisait tout un trésor spirituel. C’était vraiment alors qu’on pouvait voir que les paroles du Seigneur sont plus désirables que l’or et la grande quantité des pierres précieuses (Ps. 118,11), car ce que ne pouvait faire ni l’or, ni aucune pierre précieuse, les paroles de Pierre l’opéraient. Combien aurait-il fallu de talents d’or pour faire marcher droit celui qui était boiteux de naissance ?
La parole de Pierre suffit pour faire disparaître ce défaut de nature. Il lui dit : Au nom de Jésus-Christ, lève-toi et marche (Act. 3,6), et la parole devint une réalité. Comprenez-vous combien de telles paroles sont plus désirables que l’or et la grande quantité des pierres précieuses ? Comprenez-vous comment leurs bouches étaient comme des trésors de rois ? En réalité, ils étaient les médecins de la terre, et les agriculteurs et les pilotes ; les médecins, puisqu’ils guérissaient les maladies ; les agriculteurs puisqu’ils semaient les paroles de la piété ; les pilotes, puisqu’ils apaisaient la tempête de l’erreur. De là, ce qui est écrit : Allez, guérissez les malades (Mt. 10,8), comme on dit aux médecins. Quelquefois le Seigneur dit : Voici que je vous envoie moissonner, ce qui n’est pas venu par votre travail (Jn. 4,38), comme s’il parlait à des agriculteurs ; et ailleurs encore : Je ferai de vous des pêcheurs d’hommes (Mt. 4,19) ; et à Pierre : Ne crains rien, dorénavant tu prendras des hommes (Lc. 5,10), comme s’il parlait à des pilotes et à des pêcheurs ; et l’on voyait miracles sur miracles. Notre nature, il y a dix jours, s’est élevée jusqu’au trône du roi, et en ce jour l’Esprit-Saint est descendu sur notre nature ; le Seigneur a porté nos prémices en haut, et il a fait descendre l’Esprit-Saint. C’est un autre Seigneur qui nous distribue ces présents ; car l’Esprit est aussi Seigneur, et le Père, le Fils et le Saint-Esprit se sont partagés le soin de nous gouverner. Il n’y a pas dix jours que le Christ est remonté au ciel, et il nous a envoyé les grâces spirituelles, présents de la grande réconciliation. Car, pour que personne ne puisse douter, ni s’informer de ce qu’a fait le Christ de retour au ciel, s’il nous a réconciliés avec son Père, s’il nous l’a rendu propice, pour preuves manifestes de la réconciliation, il nous en a bien vite envoyé les présents. Car lorsque des ennemis ne font plus qu’un même cœur, lorsqu’ils sont réconciliés, aussitôt après la réconciliation viennent les invitations, les festins, les présents. Nous avons donc envoyé au ciel notre foi, et nous avons reçu d’en haut les présents ; nous avons envoyé notre obéissance, et nous avons reçu la justice.
3. Il vous faut comprendre que le don de notre réconciliation avec Dieu, c’est l’Esprit-Saint. J’essayerai de vous en persuader par les saintes Écritures ; ma première preuve se fera par les contraires ; je vous montrerai que Dieu retire à lui la grâce de l’Esprit, lorsqu’il est en colère contre nous ; si vous acquérez la persuasion que la colère de Dieu se prouve par ce fait qu’on ne voit plus l’Esprit-Saint, l’apparition de l’Esprit, descendant de nouveau, vous fera comprendre que si Dieu n’était pas réconcilié avec nous il n’enverrait pas l’Esprit-Saint. D’où tirerons-nous nos preuves ? Héli était ion vieillard, d’ailleurs juste et sage, mais ne sachant pas corriger ses enfants, et portant un amour exagéré aux fils sortis de lui. Écoutez tous tant que vous êtes qui avez des enfants, apprenez à faire la juste part de l’affection et du devoir. Héli, par cette raison, irrita Dieu à tel point qu’il se détourna de tout le peuple. Eh bien ! celui qui écrit ces choses dit, pour montrer que Dieu s’était tout à fait détourné des Juifs : La parole du Seigneur était précieuse et il n’y avait plus de vision distincte. (1Sa. 3,1) Ici, précieuse, veut dire rare ; cette parole signifie que les prophéties étaient rares alors. Un autre maintenant se lamentant et gémissant à cause de la colère de Dieu, disait Et il n’y a dans ce temple ni prince, ni prophète (Dan. 3,38) ; de son côté l’Évangéliste dit : Le Saint-Esprit n’avait pas encore été donné, car Jésus n’avait pas encore été glorifié. (Jn. 7,39) Comme il n’avait pas encore été crucifié, dit-il, l’Esprit-Saint n’était pas encore un don accordé aux hommes ; cette expression, n’avait pas encore été crucifié, correspond tout à fait à n’avait pas encore été glorifié. Car si, à ne considérer que le fait en lui-même, c’est une honte, comme cette honte n’a été subie que par amour, le Christ l’appelle une gloire. Et pourquoi, répondez-moi, l’Esprit n’a-t-il pas été accordé avant la mise en croix ? C’est que la terre était dans le péché, dans les offenses, un objet de haine et d’ignominie, avant l’oblation de l’Agneau qui enlève