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Un autre motif, c’est que sa première lettre avait produit chez eux des fruits de salut. Car cet impudique qu’ils favorisaient auparavant et dont ils s’enorgueillissaient, ils l’avaient complètement retranché de leur communion. Ce qu’il leur rappelle en ces termes : « Si l’un de vous m’a contristé, il ne m’a pas contristé moi seul, mais vous tous aussi, au moins en quelque sorte ; ce que je dis pour ne le point surcharger dans son affliction ». C’est assez qu’il ait été repris par un grand nombre de fidèles. C’est la même idée qu’il suggère un peu plus loin : « Cette tristesse que vous avez ressentie selon Dieu, vous a remplis de sollicitude ; elle vous a justifiés ; vous vous êtes indignés contre le coupable, vous avez redouté la justice divine, vous vous êtes trouvés plein d’ardeur pour l’accomplissement de sa loi, pour venger l’injure faite à Dieu ; en un mot vous avez montré que vous n’avez en rien participé au crime ». (2Cor. 7,11) Bien plus, ils s’étaient empressés de recueillir la somme d’argent qu’il leur avait demandée. Aussi leur disait-il : « Je sais quel est votre empressement, et je m’en glorifie auprès des Macédoniens, et je leur dis que l’Achaïe est toute prête depuis l’année dernière ». (2Cor. 9,2) D’ailleurs ils avaient reçu avec bienveillance son disciple Tite qu’il leur avait envoyé. Il leur en témoigne sa reconnaissance en ces termes : « Tite vous aime tendrement : il se souvient de votre obéissance et du saint tremblement avec lequel vous l’avez reçu ». (2Cor. 7,15)
Voilà les divers motifs qui le décident à écrire une seconde épître aux fidèles de Corinthe. Après leur avoir reproché leurs désordres, ne devait-il pas les féliciter d’être revenus à de meilleurs sentiments ? Aussi ne fait-il paraître ni amertume ni colère dans tout le cours de cette épître, excepté cependant vers la fin. C’est qu’il y avait chez eux des Juifs enflés d’orgueil et qui, pleins de mépris pour l’apôtre, le traitaient d’homme arrogant, mais sans valeur. Ils disaient : « Ses lettres sont graves et fortes, mais son extérieur ne fait aucune impression, et son langage est méprisable ». C’est comme s’ils eussent dit : Dès qu’il est ici, il n’inspire aucun respect ; et quand il est parti, ses lettres sont pleines de faste et d’orgueil. Tel est le sens de ces mots : « Ses lettres sont graves et fortes ». Et pour se faire de la réputation, ils se flattaient hypocritement de ne rien accepter de personne : c’est de cette hypocrisie que parle saint Paul quand il dit : « Pour trouver un sujet de gloire, ils veulent paraître tout à « fait semblables à nous ». En outre, comme ils ne manquaient pas d’éloquence, ils faisaient gloire de ce talent. C’est pourquoi l’apôtre s’appelle lui-même un homme simple et sans habileté, pour montrer qu’il ne rougit pas de ce défaut ; et que l’éloquence à ses yeux n’a aucune valeur, aucun prix. Il était vraisemblable que leurs discours en avaient entraîné plusieurs loin de la vérité : aussi, après avoir loué leurs bonnes actions, les blâme-t-il de leur zèle à pratiquer les cérémonies judaïques, et leur adresse-t-il quelques reproches à cet égard. Tel est, à mon avis, pour le dire en passant, le sujet et comme – le sommaire de cette épître. – Expliquons-en maintenant le commencement, et disons pourquoi, tout aussitôt après les avoir salués selon sa coutume, il leur parle de la miséricorde du Seigneur. Demandons-nous cependant, avant toutes choses, pourquoi il fait ici mention de Timothée. « Paul, apôtre de Jésus-Christ, par la volonté de Dieu, et Timothée, son frère ». Dans sa première épître, en effet, il leur promettait de leur envoyer son disciple, et les exhortait à bien l’accueillir. « Quand Timothée sera venu, faites en sorte qu’il vive sans crainte au milieu de vous ». Pourquoi donc joint-il à son propre nom le nom de son disciple ? Selon la promesse du Maître, Timothée s’était transporté à Corinthe. « Je vous l’ai envoyé, dit-il, pour qu’il vous fasse part de mes desseins, qui sont selon Jésus-Christ » ; et après avoir établi dans cette ville un ordre parfait, il était revenu près de l’apôtre. En le leur envoyant, saint Paul leur disait : « Congédiez-le dans la paix du Seigneur ; car je l’attends avec les frères ».
2. Quand donc il fut de retour, ils s’occupèrent ensemble d’opérer en Asie les réformes nécessaires : « Je resterai à Éphèse jusqu’à la Pentecôte, dit saint Paul » (1Cor. 16,8), et ils passèrent en Macédoine. C’est donc à juste titre qu’il le nomme au commencement de son épître, puisqu’il l’accompagnait dans ce voyage Il écrivait sa première épître en Asie ; sa seconde, il la leur adressa de la Macédoine. S’il joint à son nom celui de Timothée, c’est pour recommander de plus en plus son disciple,