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triques, des gens bizarres et non comme des aliénés. Le plus souvent même, on n’observe que l’un des deux états, tandis que l’autre est pris pour l’état normal du malade. Pendant la période d’excitation, en effet, ils ont une intelligence surexcitée et des aptitudes qu’ils ne possédaient pas à l’état normal. Loin de les considérer comme des aliénés, on les regarde alors comme des êtres intelligents, doués de facultés exceptionnelles, et quand ils retombent dans la mélancolie, personne ne les observe dans cet état, parce qu’ils se renferment chez eux, ou bien l’on attribue leur tristesse à des motifs raisonnables, à des chagrins ou à des causes morales appréciables. Toutes ces causes réunies font donc méconnaître le plus souvent la folie circulaire dans le monde.

Ils restent alors en liberté, dans leurs familles ou dans la société et personne ne songe à les placer dans les asiles d’aliénés. Dans ces cas difficiles, il faut les observer pendant longtemps et suivre attentivement leurs diverses périodes pour pouvoir arriver à établir le diagnostic sur des bases sérieuses, en s’appuyant sur les caractères que nous avons indiqués précédemment. Une autre difficulté du diagnostic existe encore pour différencier la période d’excitation de la folie circulaire de certaines formes de la folie hystérique. Il y a, en effet, quelques hystériques aliénées, atteintes de l’état que nous avons décrit précédemment[1], sous le nom de folie raisonnante des hystériques, dont l’excitation loquace et exubérante présente les plus grandes analogies avec l’agitation maniaque simple des folies circulaires. La distinction clinique est alors quelquefois si difficile à établir entre ces deux variétés de l’excitation maniaque que, dans quelques circonstances, l’observation ultérieure de plusieurs périodes ou de plusieurs accès peut seule permettre d’affirmer que l’on a affaire à une folie circulaire vraie et non à une simple folie hystérique. Enfin, la plus grande difficulté du diagnostic différentiel de la folie circulaire réside dans la confusion, qui est souvent possible en clinique, entre la période d’excitation de cette maladie et la période prodromique, ou phase d’expansion optimiste de la paralysie générale[2]. Il y a, en effet, des malades dans la

  1. Voir plus haut p. 499.
  2. Voir plus haut p. 494.