Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 8.djvu/523

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

se porte avec fureur aux choses qu’on lui défend. La proscription de l’Aristotélisme fut la date de ses progrès, & les choses en vinrent au point qu’il y eut plus encore de danger à n’être pas péripatéticien qu’il y en avoit eu à l’être. L’Aristotélisme s’étendit peu-à-peu, & ce fut la philosophie régnante pendant le treizieme & le quatorzieme siecles entiers. Elle prit alors le nom de scholastique. Voyez Scholastique philosophie. C’est à ce moment qu’il faut aussi rapporter l’origine du droit canonique, dont les premiers fondemens avoient été jettés dans le cours du douzieme siecle. Du droit canonique, de la théologie scholastique & de la philosophie, mêlés ensemble, il naquit une espece de monstre qui subsiste encore, & qui n’expirera pas si-tôt.

Jesus-Christ, ordre militaire de Portugal. Voyez Christ.

Jesus-Christ, nom d’un ordre de chevalerie, institué à Avignon par le pape Jean XXII. en 1320. Les chevaliers de cet ordre portoient une croix d’or pleine, émaillée de rouge, enfermée dans une autre croix patée d’or de même façon, mais d’émaux différens que celle de Christ en Portugal. Voy. Christ. Favin, théat. d’honn. & de chevalerie.

Jesus et Marie, ordre de chevalerie connu à Rome sous le nom de Jesus & Marie du tems du pape Paul V. qui à ce qu’on croit en forma le projet. Par les lois de cet ordre, que l’on a encore, il est ordonné que chacun des chevaliers porteroit un habit blanc dans les solemnités, & qu’il entretiendroit un cheval & un homme armé contre les ennemis de l’état ecclésiastique. Les chevaliers portoient une croix bleu-céleste, dans laquelle étoient écrits les noms de Jesus & Marie. Le grand-maître étoit pris d’entre trois chevaliers que le pape proposoit au chapitre, comme dignes d’être revêtus de cette charge, & capables d’en remplir les fonctions. Ceux qui demandoient d’entrer dans l’ordre sans faire preuve de leur noblesse, étoient obligés de fonder une commanderie de deux cens écus de rente pour le moins, dont ils jouissoient eux-mêmes pendant leur vie, & qui à leur mort demeuroit à l’ordre. Bonami, catalog. ordin. equestr.

* JET, s. m. (Gramm.) il se dit, 1°. du mouvement d’un corps lancé avec le bras, ou avec un instrument ; le jet de la pierre avec la fronde est plus violent qu’avec le bras : 2°. de l’espace qu’il mesure à deux jets de pierre : 3°. de la poussée d’une branche : 4°. des essains d’abeilles : 5°. des eaux jaillissantes : 6°. du calcul par les jettons : 7°. en fauconnerie, en pêche, en fonderie, en peinture, en marine, en artifice, en plusieurs autres arts, voyez les articles suivans.

Jet des bombes, (Artillerie.) est le nom qu’on donne à la partie des Mathématiques qui traite du mouvement des bombes, de la ligne qu’elles décrivent dans l’air, de la maniere dont il faut disposer le mortier pour qu’elles aillent tomber à une distance donnée, &c. Voyez les articles Balistique & Projectile, où sont expliquées les lois du mouvement des bombes, ou plûtôt en général de tout corps pesant lancé avec une vîtesse & une direction donnée. Voyez aussi Jet, Art milit. (O)

Jet d’eau (Hydraulique.) est une lance ou lame d’eau qui s’éleve en l’air par un seul ajutage qui en détermine la grosseur. Les jets croisés en forme de berceaux, sont appellés jets dardans, & les droits perpendiculaires. Il y a encore des gerbes, des bouillons. Consultez ces articles à leur lettre. (K)

Mariotte démontre qu’un jet d’eau ne peut jamais monter aussi haut qu’est l’eau dans son réservoir. En effet, l’eau qui sort d’un ajutage devroit monter naturellement à la hauteur de son réservoir, si la résistance de l’air & les frottemens des tuyaux ne l’en

empêchoient. Voyez l’article Fluide. Mais cette résistance & ces frottemens font que l’eau perd nécessairement une partie de son mouvement, & par conséquent ne remonte pas aussi haut. Ce même auteur a aussi fait voir que lorsqu’un grand jet se distribue en un grand nombre d’autres plus petits, le quarré du diametre du principal ajutage doit être proportionnel à la somme de toutes les dépenses de ses branches ; & que si le réservoir a cinquante-deux piés de haut, & l’ajutage six lignes de diametre, celui du conduit doit être de trois pouces. Les différentes regles pour les jets d’eau se trouvent renfermées dans un ouvrage exprès de M. Mariotte, imprimé dans le recueil de ses œuvres. Chambers. (O)

Jet se dit, dans l’Art militaire, des armes propres à lancer des corps avec force pour offenser l’ennemi de loin. Chez les anciens, la fronde, l’arc, la baliste, la catapulte, &c. étoient des armes de jet. Dans l’usage présent, les canons, les mortiers, les fusils, &c. sont les armes de jet qui ont été substituées aux anciennes.

Jet se dit particulierement de la bombe jettée ou lancée par le moyen du mortier. On appelle le jet des bombes, l’art ou la science de les tirer avec méthode pour les faire tomber sur des lieux déterminés. Cette science fait la principale partie de la balistique, qui traite du mouvement des corps pesans jettés ou lancés en l’air suivant une ligne de direction oblique ou parallele à l’horison. Voyez Balistique ou Projectile.

On a vû au mot Bombe quelle est à peu-près l’époque de l’invention de cette machine. Les premiers qui ont fait usage des bombes, les tiroient avec très-peu de méthode.

Ils avoient observé que le mortier, plus ou moins incliné à l’horison, portoit la bombe à des distances inégales ; qu’en éloignant la direction du mortier de la verticale, la bombe alloit tomber d’autant plus loin que l’angle formé par la verticale & la direction du mortier approchoit de 45 degrés ; & que lorsqu’il surpassoit cette valeur, les distances où la bombe étoit portée, alloient en diminuant ; ce qui leur avoit fait conclure que la plus grande portée de la bombe étoit sous l’angle de 45 degrés. Muni de cette connoissance que la théorie a depuis confirmée, lorsqu’il s’agissoit de jetter des bombes, on commençoit à s’assûrer, par quelques épreuves, de la portée sous l’angle de 45 degrés ; & lorsqu’on vouloit jetter les bombes à une distance moins grande, on faisoit faire au mortier un angle avec la verticale plus grand ou plus petit que 45 degrés. Cet angle se prenoit au hasard ; mais après avoir tiré quelques bombes, on parvenoit à trouver à peu-près la direction ou l’inclinaison qu’il falloit donner au mortier pour faire tomber les bombes sur les lieux proposés.

Telle étoit à peu-près la science des premiers bombardiers ; elle leur servoit presque autant que si elle avoit été plus exacte, parce que la variation de l’action de la poudre, la difficulté de faire tenir fixement & solidement le mortier dans la position qu’on veut lui donner, sont des causes qui dérangent presque toûjours les effets déterminés par la théorie.

Les premiers auteurs qui ont écrit sur l’Artillerie, comme Tartaglia de Bresce, Diego Ufano, &c... croyoient que la bombe, ainsi que le boulet, avoit trois mouvemens particuliers ; savoir, le violent ou le droit, le mixte ou le courbe, & le naturel ou perpendiculaire.

Le mouvement étoit droit, selon ces auteurs, tant que l’impulsion de la poudre l’emportoit considérablement sur la pesanteur de la bombe : aussi tôt que cette impulsion venoit à être balancée par la pesanteur, la ligne du mouvement du mobile devenoit