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selon Ptolomée. Ils avoient la Gétulie à l’oüest, la Cyrénaïque au nord, l’Ethiopie intérieure au midi.

Pline, liv. V. ch. v. fait de grands détails de ces peuples au sujet du triomphe de Balbus ; mais tout ce que nous savons d’eux & de leur pays aujourd’hui, c’est que Zaara ou le desert qui fait une partie de l’ancienne Lybie, étoit la demeure des Gétuliens & des Garamantes de Pline. (D. J.)

GARAMANTICUS LAPIS, (Hist. nat.) nom que Pline donne à une pierre précieuse que Wallerius croit être le grenat. Voyez Grenat.

* GARANCE, s. f. rubia, (Hist. nat. bot.) genre de plante à fleur campaniforme, ouverte, découpée, & ordinairement percée dans le fond. Son calice devient un fruit composé de deux baies succulentes. Ce fruit renferme une semence qui a communément un ombilic. Les feuilles de la garance sont verticellées. Tournefort, instit. rei herb. Voyez Plante.

On compte quatre especes de garance. Mais la principale que nous allons décrire, est désignée par rubia tinctorum, ou rubia tinctorum sativa. Sa racine est vivace, de la grosseur du petit doigt, rampante, tortueuse, cassante, d’un goût d’abord douçâtre, puis amer & austere. Si ses racines sont vieilles, on les verra rousses à l’extérieur ; si elles sont nouvelles, rouges. Elles tracent & s’étendent beaucoup sans s’enfoncer fort avant dans la terre.

Cette garance pousse plusieurs tiges sarmenteuses, quadrangulaires, rudes au toucher, noüeuses, jettant d’espace en espace cinq à six feuilles oblongues pointues, plus larges au milieu qu’à l’extrémité, & hérissées de poil. Le verd en est obscur. Les fleurs sortent de leurs aisselles par épis. Ces fleurs sont jaunes, petites, d’une seule piece, & découpées en quatre parties, & quelquefois en cinq. Le calice qui les soûtient devient un fruit composé de deux baies qui se touchent, de la grosseur des baies du genevrier, d’abord vertes, puis rouges, enfin noirâtres quand elles sont tout-à fait mûres, alors succulentes. On y trouve une semence arrondie faite en nombril. Il arrive quelquefois à une de ces semences d’avorter & au fruit de n’avoir plus qu’une baie.

Maniere de cultiver la garance. Il faut d’abord la choisir en rejettons ou en meres-plantes. On s’en tient toûjours aux rejettons dans le pays ; il faudroit préférer les meres-plantes pour les pays éloignés. Elles soûtiendroient plus aisément le transport. Pour être bonne, il la faut pleine & cassante à tous égards. La racine en meres-plantes a été taxée dans la châtellenie de Lille à 7 liv. 10 s. le faix, pesant environ 180 ou 200 liv. de 14 onces, avec la terre dont elle est chargée. Mais on peut estimer les rejettons sur le pié de 4 s. le cent. Trente-quatre mille rejettons suffiront pour garnir un cent de terre, ou deux cents cinquante-quatre toises, trois piés, quatre lignes quarrées ; mesure à laquelle il faut rapporter tout ce que nous allons dire. Ainsi à un sou le cent, il en coûteroit 68 liv. Si l’on plantoit en meres-plantes, il en faudroit environ 8 faix à 7 liv. 10 s. le faix, c’est-à-dire 60 liv.

Il n’y a point de terrein qu’on ne puisse approprier à la garance par les engrais & le fumier. Il faut seulement qu’ils ayent du fond, qu’ils ne soient pas pierreux, & qu’ils soient rendus legers. Il n’y en auroit point de meilleur qu’un marais sec, défriché. Jusqu’à-présent on a cru que la même terre ne pouvoit donner qu’une bonne dépouille de garance en six ans ; quelques-uns même ont dit douze ans. D’autres au contraire ont prétendu qu’on en continueroit sans interruption la culture dans un même lieu. Mais le fait est que pour profiter de son travail & de sa dépense, il faut changer de terrein. Celui qui a porté de la garance, se trouve pour l’année suivante engraissé & propre à fournir toute autre chose. C’est

un engrais gagné par des renouvellemens alternatifs, un laboureur trouvera ses terres conduites insensiblement à l’état du meilleur rapport.

Il n’y faut pas épargner le fumier, & fumer avec celui de vache par préférence. On en répandra plus ou moins selon la qualité de la terre, qu’on retournera à la charrue pour lui faire prendre nourriture. On peut donner jusqu’à six charretées de fumier, chacune pesant environ 1400 liv. poids de marc, par cent de terre.

Les uns font ce travail en Novembre, & ne remuent plus la terre de tout l’hyver. D’autres attendent le mois de Mars. Les premiers font mieux, mais quelle que soit la culture qu’on suive, il faut en Mars labourer quatre à cinq fois pour adoucir la terre, & l’ameublir par le moyen de la herse & du cylindre ; préparations qu’on lui donnera en tems sec.

On plantera les rejettons au commencement de Juin, ou même plûtôt, si le tems doux précipite la pousse. On les enlevera des meres-plantes avec une broche de fer, grosse d’un doigt, & pointue ; les détachant legerement avec la pointe, de maniere qu’ils emportent avec eux un peu de racine. Il faut bien se garder d’endommager la mere, ce qui pourroit arriver, si l’on se servoit d’un instrument plat & tranchant comme le couteau. Chaque rejetton doit avoir un pié de longueur. On plante au cordeau chaque rejetton à trois doigts de son voisin, couché comme le poreau, à la distance d’un pié entre chaque ligne. La terre qu’on leve pour la seconde ligne sert à couvrir la premiere, & ainsi des autres. Quant aux meres-plantes, il faudroit aussi les planter au cordeau dans le mois d’Octobre, toutes aboutissantes les unes aux autres, à cinq piés de distance ; on coucheroit les rejettons dans cet intervalle, à mesure qu’ils grandiroient, de maniere que tout se rempliroit. Il est sous-entendu que pour planter dans ce mois, il faut engraisser la terre aussi-tôt après la moisson.

Ainsi les cinq charretées de fumier évaluées à 15 liv. les cinq labours à 3 liv. 8 s. 9 d. les trois herses à 9 s. les trois passages de cylindre à 9 s. le tirage des rejettons à 2 liv. 10 s. & la plantation à 3 liv. 15 s. le tout reviendra à 25 liv. 11 s. 9 d

Quand la garance est plantée, voici les façons qu’il faut lui donner. On a dû laisser de 15 en 15 piés une distance d’un pié & demi d’un bout à l’autre de la terre, pour y pratiquer au mois de Mars une rigole profonde d’un pié & demi, dont la terre servira à couvrir les plantes, en la dispersant à droite & à gauche, comme pour le colsat. Voyez Colsat. Au mois de Juillet, lorsque la pousse sera relevée d’un pié, on la couchera de nouveau, la couvrant de la terre tirée des intervalles laissés entre chaque ligne, & l’on observera de creuser legerement sous la racine, qui tirera de-là du soulagement, de la force, de la liberté, & provignera facilement. Il en coûtera pour les rigoles 18 s. pour le provin 2 liv. 10 s.

Si l’on demande quelle autre précaution il y a à prendre avant la récolte, je dirai de laisser amortir la fanne de la premiere année, de couper au mois d’Août celle de la seconde, & d’enlever le chaume restant adroitement jusqu’à la racine ; on peut donner aux vaches de cette fanne, mais en petite quantité.

Le tems sec est celui qui est le plus favorable pour la garance. On en fait la récolte en Novembre de la seconde année. Si on la laissoit en terre plus long-tems, elle pourroit à la vérité profiter en grossissant ; mais on est persuadé qu’il en pourriroit une bonne partie, dommage qui ne seroit point compense ; à quoi il faut ajoûter la perte d’une année.

La récolte se fait à la beche, soit à la charrue. On laboure en ligne droite assez profondément pour détacher les racines sans les endommager. Cepen-