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propre ou improprement dit, tel que le fief roturier ou non noble. Voyez Fief ex pacto & providentia, Fief cottier, coûtumier, non noble, roturier, rural. (A)

Fiefs propriétaires, sont ceux que le vassal possede en propriété, & qui sont patrimoniaux, & passent à ses héritiers & ayans cause, à la différence des bénéfices qui n’étoient qu’à tems ou à vie.

Il y avoit de ces fiefs dès le tems de la premiere race de nos rois ; mais ils ne devinrent communs que vers la fin de la seconde race & au commencement de la troisieme. Voyez Fiefs patrimoniaux. (A)

Fief de protection. On donna ce nom à des aleux ou francs-aleux, dont les possesseurs se voyant opprimés par des seigneurs puissans, mettoient leurs aleux sous la protection de quelques grands ; dans la suite ces fiefs de protection sont devenus des fiefs servans de ces grands, & par ce moyen arriere-fiefs de la couronne. Voyez les instit. féod. de Guyot, ch. j. n°. 8. (A)

Fief en quart-degré, voyez ci-après Fief tenu en quart-degré.

Fief recevable & non rendable, est celui dans le château ou manoir duquel le vassal est obligé de recevoir son seigneur dominant, lorsque celui-ci juge à-propos d’y venir pour sa commodité, de maniere néanmoins que le vassal n’est pas obligé de le céder entierement ni d’en sortir. Voyez Fief rendable. (A)

Fief en régale ; quelques-uns ont ainsi appellé le fief royal ou de dignité, feudum magnum & quaternatum. Voyez Fief de dignité & Fief royal ; le glossaire de Lauriere, au mot fief en chef. (A)

Fief rendable, feudum reddibile, étoit celui que le vassal devoit rendre à son seignem pour s’en servir dans ses guerres. M. Aubret, dans ses mémoires manuscrits sur l’histoire de Dombes, dit que le fief rendable devoit être rendu au seigneur supérieur en quelque état qu’il parût, soit avec peu ou beaucoup de troupes ; & en effet la coûtume de Bar, art. 1. dit que la coûtume est telle, que tous les fiefs tenus du duc de Bar, en son baillage dudit Bar, sont fiefs de danger rendables à lui à grande & petite force, sous peine de commise. M. Ducange a traité fort au long des fiefs jurables & rendables dans sa trentieme dissertation sur Joinville. Voyez aussi le for d’Arragon, fol. 130. v°. col. 1. & ci-devant Fief jurable. (A)

Fief de rente, c’est lorsqu’une rente est assignée sur un fief avec retention de foi : il n’y a régulierement que des rentes foncieres non rachetables, que l’on puisse ainsi ériger en fief ; parce que suivant le droit présent des fiefs, le fief est de sa nature perpétuel, encore faut-il qu’il y ait retention expresse de foi, si ce n’est dans la coûtume de Montargis, où la foi, dans ce cas, est censée retenue, ce qui paroît répugner aux principes.

Une rente rachetable, suivant le bail à rente, ne peut être fief, parce que le débiteur est le maître de l’amortir, & qu’il ne doit pas dépendre du vassal d’éteindre & abolir le fief, ce qui arriveroit néanmoins par le rachat.

Les rentes constituées à prix d’argent, ne peuvent pareillement former des fiefs, si ce n’est dans les coûtumes où le créancier est nanti, & se fait recevoir en foi pour la rente ; telles sont celles qu’en Normandie on appelle rentes hypotheques ; en Picardie, rentes nanties sur le fief du débiteur ; & que dans la très-ancienne coûtume de Paris, on appelloit rentes par assignat, lesquelles emportoient aliénation du fonds au prorata de la rente. Ces rentes, dit-on, peuvent être tenues en fief ; le créancier se fait recevoir en foi, comme cela se pratique suivant la coûtume de Cambrai, tit. j. art. 30. & 38. Berri, tit. des fiefs, art. 5. Ribemont, 79. Orléans, art. 5. Ces sortes

de rentes forment un fief conditionnel, tant que la rente subsistera : fief qui est distinct & séparé de celui du vassal qui s’est chargé de la rente. Voyez Dumoulin sur Paris, §. 13. hodiè 20. gl. 5. n°. 58. & §. 28. n°. 11. & seq. Guyot, instit. féod. & ci-devant Fief conditionnel, & ci-après Fief de revenue. (A)

Fief de reprise, étoit lorsque le possesseur d’un héritage allodial & noble le remettoit à un seigneur, non pas simplement pour se mettre sous sa protection, moyennant une somme convenue & quelques autres fonds de terre que ce seigneur lui donnoit ; par le même acte le possesseur de l’aleu reprenoit en fief cet aleu du seigneur acquéreur, à la charge de la foi & hommage. M. Brusselles, tom. I. pag. 126. en rapporte plusieurs exemples, tirées des cartulaires de Champagne, entr’autres un acte du mois de Janvier 1220, vieux style.

Cet aleu devenoit par ce moyen fief servant de ce haut seigneur, & arriere-fief de la couronne. Voyez Salvaing, des fiefs, ch. xljv.

Il ne faut pas confondre ces fiefs de reprise avec ce que l’on appelle en Bourgogne reprise de fief, qui est quand le nouveau vassal fait l’hommage ; il reprend son fief des mains du seigneur. (A)

Fief restraint ou abregé, voyez ci-devant Fief abregé.

Fief de retour, c’étoit lorsque le prince donnoit quelque terre, château ou seigneurie en fief à quelqu’un & à ses descendans mâles, à l’exclusion des femelles, à condition qu’à défaut de mâles, ce fief feroit retour, c’est-à-dire reviendroit de plein droit au prince, ce qui ne se pratiquoit guere qu’aux fiefs de haute dignité, comme duchés, comtés & marquisats.

Ceux qui étoient mieux conseillés, pour éviter ce retour, faisoient insérer dans l’inféodation cette clause-ci, & liberis suis sive successoribus in infinitum quibuscumque utriusque sexus, comme il fut fait en l’érection du comté du Pont-de-Vaux ; ou bien ils se faisoient quitter du droit de retour par un contrat particulier pour récompense de service, ou moyennant quelque finance, ainsi qu’il fut fait en l’érection de la terre de Mirebel en marquisat.

Depuis que les fiefs sont devenus patrimoniaux & héréditaires, on ne connoît plus guere de fiefs de retour, si ce n’est les apanages, lesquels à défaut d’hoirs mâles, sont reversibles à la couronne ; car les duchés-pairies dans le même cas, ne sont plus reversibles, le titre de duché-pairie est seulement éteint. Voyez Apanage, Duché & Pairie, & l’hist. de Bresse, par Guichenon, chap. xij. des fiefs. (A)

Fief de retraite participoit de la nature du fief-lige ; mais il y avoit cela de particulier, que le prince qui faisoit une semblable inféodation ou concession, se réservoit la liberté & le pouvoir, en cas de guerre ou de nécessité, de se servir du château qu’il avoit donné en fief, lequel le vassal étoit tenu de lui rendre à sa premiere demande ; c’est pourquoi, dans les anciens titres, ce fief s’appelloit feudum reddibile. Le sire de Thoire & de Villars inféoda sous cette condition la seigneurie de Mirigna en Bugei à Pierre de Chatard damoiseau ; cela se pratiqua aussi au comté de Bourgogne par Jean dit le Sage, comte de Bourgogne & seigneur de Salins, lequel donna à Jean son second fils, surnommé de Châlons son château de Montgeffon en Comté, in feudum ligium & casamentum jurabile & reddibile ; & quand le feudataire ne vouloit point s’assujettir à cela, on en faisoit une réserve expresse, comme on voit dans l’hommage que le dauphin de Viennois fit à l’archevêque de Lyon au mois de Janvier 1230, des châteaux d’Annonai & d’Argental : il est dit que le dauphin a pris ces ter-