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gognes & dans l’Armagnac, ainsi que l’atteste Salvaing en son tr. de l’usage des fiefs, ch. iij. Il en est de même dans le Bugei, suivant Faber en son code de jure emphit. defin. xljv.

Il y a quelques coûtumes qui en disposent de même. Celle de Metz, art 1. des fiefs, dit que les fiefs au pays messin sont patrimoniaux & héréditaires, & que le vassal ne doit pour hommage que la bouche & les mains, s’il n’appert par l’investiture que le fief soit d’autre condition. La coûtume de Thionville, art. 3. des fiefs, dit la même chose. (A)

Fief immédiat, est celui qui releve directement d’un seigneur, à la différence du fief médiat ou fief subalterne qui releve directement de son vassal, & qui forme à l’égard du seigneur suzerain, ce que l’on appelle un arriere-fief. Voyez Arriere-fief. (A)

Fief impérial, en Allemagne, est celui qui releve immédiatement de l’empereur, à cause de sa dignité impériale. (A)

Fief impropre, c’est un fief roturier & non noble. Voyez ci-après Fief propre. (A)

Fief incorporel ou Fief en l’air, est un fief impropre qui ne consiste qu’en mouvances & censives, ou en mouvances seules ou en censives seules, & plus ordinairement en censives qu’en mouvances ; il est opposé au fief corporel. Voyez ci-devant Fief en l’air & Fief corporel. (A)

Fief inférieur, s’entend de tout fief qui releve d’un autre médiatement ou immédiatement. Il est opposé à fief supérieur.

Le fief servant est un fief inférieur par rapport au fief dominant.

Un même fief peut être inférieur par rapport à un autre, & supérieur par rapport à un arriere-fief.

Pour savoir quand le fief inférieur est confondu avec le fief supérieur lorsqu’ils sont tous deux en la même main, voyez ci devant au mot Fief, & ci-après Réunion, Fief dominant & Fief servant. (A)

Fief infini, voyez ci-devant Fief fini.

Fief jurable, feudum jurabile, est chez les ultramontains celui pour lequel le vassal doit à son seigneur le serment de fidélité. Jacobinus de sancto Georgio, de feudis v°. in feudum n°. 29. dit : Decima divisio est quia feudum quoddam est jurabile, quoddam non jurabile : feudum jurabile est pro quo juratur fidelitas domino ; non jurabile, quando conceditur eo pacto ut fidelitas non juretur. cap. j. §. nulla, in titulo, per quos fiat investitura in lib. feud. Voyez Wenher p. 532. col. 1. in fine, & Lucium 5. lib. I. placitorum tit. j. n°. 2. p. 201.

Dans la coûtume de Bar, le fief jurable & rendable étoit celui que le vassal étoit obligé de livrer à son seigneur. Coût. de Bar, art. 1. Voyez ci-après Fief rendable. (A)

Fief laïcal, est celui qui ne releve d’aucun ecclésiastique, mais est dépendant d’un fief purement temporel. (A)

Fief levant & cheant, voyez Fief cheant & Fief revanchable.

Fief libre ou Fief d’honneur, feudum liberum seu honoratum, il en est parlé dans plusieurs anciennes chartes, entr’autres dans la charte de commune d’Abbeville, c. xxjv. Voyez le gloss. de Ducange, au mot feudum liberum, & ci-devant Fief d’honneur. (A)

Fief liege, est la même chose que fief lige. Il est ainsi appellé dans quelques coûtumes, comme dans celle de Hainault, ch. lxxjx. & dans celle de Cambrai, tit. j. art. xlvj. xlvij. xljx. l. lj. Voyez Fief lige, Homme & Femme lige, Lige Foi & Hommage lige. (A)

Fief lige, est celui pour lequel le vassal en faisant la foi & hommage à son seigneur dominant, pro-

met de le servir envers & contre tous, & y oblige tous ses biens.

Le possesseur d’un fief lige est appellé vassal lige, ou homme lige de son seigneur ; l’hommage qu’il lui rend est appellé hommage lige, & l’obligation spéciale qui attache ce vassal à son seigneur, est appellée dans les anciens titres ligence ou ligeité.

Le fief lige est opposé au fief simple.

La différence que les feudistes françois font entre ces deux sortes de fiefs, est que l’hommage simple que le vassal vend pour un fief simple, n’est nullement personnel, mais purement réel ; il n’est rendu que pour raison du fonds érigé en fief, auquel fonds il est tellement attaché, que dès que le vassal le quitte, ce qu’il peut faire en tout tems, etiam invito domino, il demeure dès cet instant libre de l’obligation qu’il avoit contractée, laquelle passe avec le fonds à celui qui y succede.

L’hommage lige au contraire magis cohœret personæ quam patrimonio ; & quoique la ligence affecte le fonds, qui par la premiere érection y a été assujetti, le possesseur qui s’en est fait investir, se charge personnellement du devoir de vassal lige ; il y affecte tous ses autres biens sans jamais pouvoir s’en affranchir, non pas même en quittant le fief lige, ne pouvant jamais le faire sans le consentement de son seigneur.

Il y a aussi cela de particulier dans l’hommage que l’on rend pour un fief lige, que cet hommage, à chaque fois qu’il est rendu, doit être qualifié d’hommage lige ; c’est pourquoi à chaque nouvelle reception en foi, le vassal devoit en signe de sujétion mettre ses mains jointes en celles de son seigneur, & ensuite être admis par lui au baiser.

Les auteurs ne sont pas trop d’accord sur l’étymologie de ce mot lige.

Les uns ont écrit que le fief étoit appellé lige à ligando, parce que le vassal étoit lié à son seigneur féodal, lui jurant & promettant une fidélité toute singuliere. Jason, de usib. feud. n. 108.

D’autres tels que Matheus, sur la décis. 309. de Guypape, ont avancé que le fief lige avoit pris ce nom de l’effet & de la suite des obligations sous lesquelles il avoit été originairement donné, en ce que ceux qui s’en faisoient investir, étoient soûmis & engagés à des conditions plus onéreuses que celles qui étoient attachées aux fiefs simples.

D’autres encore ont tenu que ce terme lige venoit de la forme particuliere qui se rendoit pour ces sortes de fiefs, savoir, que les pouces du vassal étoient liés & ses mains jointes entre celles de son seigneur ; opinion que Ragueau, au mot hommage lige, traite avec raison de ridicule.

Quelques-uns ont soûtenu que le mot lige tiroit son origine de la ligne & confédération que quelques personnes font ensemble, en ce que les seigneurs & les vassaux se liguoient & confédéroient par serment les uns aux autres ; & sur ce fondement les feudistes allemands prétendent que les fiefs liges ont commencé en Italie, & qu’ils ont été ainsi appellés à liga, mot italien, qui selon eux signifie ligue ; opinion que Dargentré paroît avoir adoptée après Albert Krantz : mais Brodeau sur Paris, art. lxiij. dit que liga est un ancien mot françois, qui signifie colligationem, pacem & confederationem, une ligue.

Mais il est constant que liga n’est ni italien ni françois ; une ligue en italien, c’est lega. D’ailleurs l’origine des fiefs liges ne peut venir d’Italie, puisque les constitutions napolitaines, quoique postérieures en partie aux usages des fiefs, ne parlent point de fiefs liges.

Le mot liga n’est pas non plus gaulois ; car les fiefs liges n’ayant commencé à être connus que bien avant dans le xij. siecle, comme on le prouvera dans un mo-