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pourvûs en eux les talons. On doit en général en parer l’ongle, de façon qu’on en resserre les talons s’ils ne se resserrent pas d’eux-mêmes ; mais en les abattant, il ne faut néanmoins pas les trop affoiblir. Ajustez-y un fer à la florentine, c’est-à-dire un fer dont la branche de dehors soit fort couverte, celle de dedans extrèmement étroite & dégorgée ; que la pince en soit couverte & longue ; que l’étampure soit près du bord inférieur du fer à la branche de dehors, & le plus en talon qu’il sera possible ; & quant à la branche de dedans, étampez très-maigre, & que les trous soient au nombre de quatre à chaque branche. Dans le cas où l’on seroit contraint d’en préparer pour le passage des clous à glace, faites-en un de chaque côté de la voûte entre les quatre étampures du dedans & du dehors ; que le fer, si c’est pour le pié de devant, releve beaucoup en pince, & qu’il releve moins, si c’est pour un pié de derriere ; que les éponges en soient très-minces, que la voûte soit très-forte dans tout son contour, que la branche de dedans en égale l’épaisseur en pince, & que l’excédent du fer en-dehors & en pince en ait très-peu. Du reste n’oubliez pas en parant de pratiquer un sifflet : coupez donc l’ongle en pince en forme d’arc, pour faciliter le nettoyement du pié & l’écoulement de l’eau qui sert à ce nettoyement. Observez encore que le fer à la florentine est infiniment préférable aux planches que l’on ajuste communément. Voyez Fer. Je conviens que le premier n’est adapté qu’aux bons piés, & que les seconds ne s’employent que pour les piés foibles : mais dans tous les cas il vaut mieux user de la florentine. Au surplus, lorsque le mulet s’encastele ou est encastelé, on peut donner à ce même fer la figure de la pantoufle, comme on le donne aux planches. Voyez Fer.

Ferrure des mulets qui posent le pié à terre à la maniere du cheval. La plûpart des mulets heurtent en posant le pié à terre, la pince y atteint plûtôt que le talon. Il en est néanmoins qui y posent le pié comme le cheval : ceux-ci demandent des fers à cheval dont l’étampure soit très-grasse en-dehors, c’est-à-dire presque dans le bord intérieur du fer, & un peu plus maigre en-dedans ; ce fer aura une égale force, soit dans la voûte, soit dans son rebord extérieur, & relevera beaucoup plus en pince que le fer du cheval.

Ferrure des mulets dont le talon est bas. Parez beaucoup en pince, ouvrez & blanchissez les talons ; mettez un fer à cheval dont les étampures rogneront autour de la voûte. Si l’on étampoit les fers des mulets comme ceux des chevaux, c’est-à-dire en-delà de la voûte du côté extérieur, ils couvriroient dès-lors tout le pié & ne déborderoient point assez ; & ils doivent déborder, parce que le mulet a ordinairement le pié trop petit proportionnément à sen corps : que ce même fer garnisse en-dehors & en-arriere du talon, qu’il soit relevé en pince, que les deux branches soient égales, afin que les talons portent également ; & faites, si vous le voulez, de chaque côté deux pelits crampons, ou en oreille de lievre (Voyez Fer), ou suivant la ligne directe de la branche.

Ferrure des mulets dont la fourchette est grasse & les talons bas. Parez la fourchette presque jusqu’au vif, & ferrez-le ainsi que je viens de le prescrire pour le talon bas ; l’éponge étant plus étroite, ne portera pas sur la fourchette.

Ferrure des mulets qui ont des soies. Voyez Quartiers, Soie, Seyme. Les piés de derriere sont plus fréquemment atteints de ce mal que ceux de devant, sur-tout s’ils sont courts en pince. Faites usage de l’opération indiquée dans ces sortes de cas, mais relativement à la ferrure ; pratiquez en pince un sifflet plus grand qu’à l’ordinaire, parce que l’animal portant dès-lors sur les quartiers, la soie se resserrera plus aisément : que ce même fer déborde beaucoup,

& que ses talons soient au surplus considérablement abattus.

Ferrure des mulets qui ont des seymes. Voy. Seyme, Quartiers. Les seymes exigent la même opération que les soies : pratiquez-la conséquemment. Ménagez un sifflet au quartier endommagé par la seyme ; abattez beaucoup de talon, & mettez un fer ordinaire.

Ferrure des mulets panards & qui se coupent. Voyez Panards. Abattez les quartiers de dehors autant qu’il est possible, afin de faciliter l’appui de la pince ; & maintenez le quartier de dedans en pince plus haut que le talon, pour que ce même talon se tourne plus aisément en-dehors : que le fer soit couvert en-dehors depuis le bout de la pince en-dedans jusqu’au talon, & que la branche de dedans soit à la turque. Voyez Fer. Etampez gras, parce que le fer doit déborder en-dehors ; qu’il garnisse beaucoup en talon, sans outrepasser en-arriere en-dedans, & pouvant outrepasser en-arriere en-dehors. On ne peut remédier à cette défectuosité, que par la parure & par le fer, puisque la petitesse du pié de l’animal exclut totalement l’usage du rogne-pié. V. Tablier. On ne doit pas du reste oublier le sifflet ; & quant à l’ajusture du fer, il sera toûjours également relevé en pince.

Ferrure des mulets qui se coupent en pince. Parez le pié droit, & à l’ordinaire : que la branche de dehors du fer soit très-couverte ; ne changez rien à celle de dedans : que la pince suive la rondeur du pié en-dedans, & la forme de la branche bien courte en-dehors : laissez vis-à-vis l’endroit où vous vous appercevez que le mulet se coupe, une épaisseur plus ou moins considérable ; qu’il n’y ait point d’étampure à cette épaisseur : percez un ou deux trous sur le talon, étampez en-dehors comme de coûtume. On doit cependant avoüer, malgré ces précautions, qu’un fer à cheval conviendroit beaucoup mieux.

Ferrure des mulets qui se coupent par foiblesse de reins & ensuite de quelque effort. Les mulets qui ont fait quelque effort par quelque cause que ce soit, se coupent tous du derriere, & d’autant plus aisément, qu’ils sont ordinairement ferrés de maniere que la pince est beaucoup trop longue : faites-la donc plus courte & plus épaisse, & que la branche de dedans soit à la turque ; ou bien faites à l’éponge un bouton à la turque, qui diminue imperceptiblement à son extrémité. Ce bouton est une sorte de crampon. Que cette même branche soit étampée maigre, pour qu’elle puisse accompagner la rondeur du pié, & que celle de dehors, à laquelle vous laisserez un leger crampon, soit étampée plus gras.

Ferrure des mulets de charrette. Ajustez aux piés des mulets destinés à tirer, un fer à cheval débordant en-dedans, en-dehors, en pince, & relevé à cette derniere partie ; qu’il y ait deux crampons à chaque fer : on ne peut s’en dispenser ; car sans crampon & avec un fer à la florentine, le mulet ne pourroit ni tirer ni retenir.

Ferrure des mulets de charrette qui sont boutés. Ferrez-les de même que ces derniers, mais n’ajoûtez point de crampons : ceux-ci retiendront de la pince.

Quelque long que paroisse cet article, il ne renferme pas néanmoins tous les cas qui peuvent se présenter relativement à la ferrure des chevaux, & relativement à celle des mulets : mais nous avons assez discuté les principes, pour que ces cas cessent de jetter dans l’embarras ceux auxquels ils peuvent s’offrir ; car lorsqu’ils allieront la théorie & la pratique, ils surmonteront tous les obstacles, & leurs progrès seront assûrés. Qui n’admirera pas néanmoins après tous les détails dans lesquels j’ai été contraint d’entrer, la sécurité des maréchaux qui dans la plûpart de leur communauté, & avant d’admettre un aspirant au nombre des maîtres, l’obligent à faire un chef-d’œuvre de ferrure ? La forme de l’épreuve est