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les ont rendus nécessaires. On ne réussit dans le commerce du monde, que sous la condition d’être utile, ou sous la condition d’y mettre de l’agrément ; celle-ci suppose encore une politesse simple, douce, & aisée, sans laquelle les talens n’ont aucun prix, & que des enfans n’acquerront qu’en renonçant à tous les plis de la premiere éducation, & en apprenant ce qu’ils n’ont jamais appris, c’est-à-dire à penser, à parler & à se taire.

Tel est en général le but que l’on devroit se proposer dans toutes les académies. Je conviens qu’élevées sur un semblable plan, il seroit assez difficile qu’elles fussent nombreuses ; mais six écoles de cette espece seroient d’un secours réel à l’état, ne s’entredétruiroient point les unes & les autres, & se soûtiendroient d’elles-mêmes sans des faveurs telles que celles que demandoit Pluvinel, sur-tout si les agrémens des emplois militaires dépendoient du séjour & des progrès que des éleves y auroient faits.

Je dois au surplus déclarer ici, que je n’ai prétendu blâmer que les abus & non les personnes. Je sai que les intérêts, ou plûtôt la vanité des hommes, se trouvent étroitement liés avec ceux de l’erreur ; mais la vraie philosophie ne respecte que la vérité, & n’en médite que le triomphe. D’ailleurs je me suis cru d’autant plus autorisé à en prendre ici la défense, que les écoles que je propose répondroient pleinement aux vûes supérieures d’un ministre, qui, par l’établissement de l’école militaire, nous a prouvé que les grands hommes d’état s’annoncent toûjours par des monumens utiles & durables. (e)

EXERESE, en Chirurgie, est une opération par laquelle on tire du corps humain quelque matiere étrangere, inutile, & même pernicieuse.

Ce mot est grec, ἐξαίρεσις ; il vient du verbe ἐξαιρέω, eruo, extraho, j’ôte, je retire.

L’exerese se fait de deux façons : par extraction, quand on tire du corps quelque chose qui s’y est formée ; & par détraction, quand on tire du corps quelque chose qui y a été introduite par-dehors.

L’opération de la taille ou lythotomie, l’accouchement forcé, &c. sont de la premiere classe ; & la sortie d’une balle, d’un dard, seroit de la seconde. Quelques auteurs ne donnent le nom de détraction, à l’action de tirer un corps étranger qui est entré par-dehors, que lorsqu’on est obligé de faire une incision à une partie opposée à celle par où le corps étranger s’est introduit ; cette distinction n’est pas de grande utilité.

Le point important pour se bien conduire ici, est d’examiner avec attention, 1°. quelle est la partie dont on veut tirer quelque chose, & s’éclairer sur la structure de cette partie : 2°. quels sont les corps étrangers que l’on veut faire sortir, quelle est leur forme & leur nature, s’ils sont durs, mous, friables, compressibles, ronds, quarrés, ovoïdes, triangulaires, &c. 3°. quels sont les différens instrumens qu’on y peut employer, & choisir les plus propres à ce dessein, ou en imaginer de plus parfaits : 4°. quand il faudra les mettre en usage, & comment.

On a donné les autres principes généraux qui concernent l’opération de l’exerese, au mot Corps étrangers. (Y)

EXERGUE, s. f. (Hist. anc. & mod.) signifie, chez les Médaillistes, un mot, une devise, une date, &c. qu’on trouve quelquefois dans les médailles au-dessous des figures qui y sont représentées. Voyez Médaille, Legende, &c.

Ce mot est dérivé des mots grecs ἐξ, de, & ἔργον, ouvrage.

Les exergues sont ordinairement au revers des médailles, cependant il y en a qui sont sur le devant ou sur la face.

Les lettres ou les chiffres qui se trouvent dans l’exergue

des médailles, signifient pour l’ordinaire ou le

nom de la ville dans laquelle elles ont été frappées, ou la valeur de la piece de monnoie : celles-ci seulement S. C. marquent par quelle autorité elles ont été fabriquées. Chambers. (G)

EXFOLIATION, en Chirurgie, est la séparation des parties d’un os qui s’écaille, c’est-à-dire qui se détache par feuilles ou par lames minces. Voyez Os.

Ce mot est composé des mots latins ex, & folium, feuille.

Quand une partie de la surface du crane a été à nud pendant quelque tems, elle est sujette à l’exfoliation : l’usage de la poudre céphalique ne sert de rien pour avancer l’exfoliation. Dionis.

On ne doit point trop hâter la guérison des blessures faites aux os ; mais on doit laisser aux os le tems de se rétablir d’eux-mêmes ; ce qu’ils font quelquefois sans exfoliation, sur-tout dans les enfans.

On ne peut pas guérir les caries des os sans exfoliation. Voyez Carie. Les os découverts ne s’exfolient pas toûjours ; on a vû des dénudations considérables qui ont duré six mois avec suppuration, où la surface de l’os s’est revivifiée au lieu de s’exfolier ; on peut lire à ce sujet des observations de M. de la Peyronie, insérées dans un mémoire de M. Quesnay sur les exfoliations du crane, dans le premier volume des mémoires de l’acad. royale de Chirurgie. On trouvera dans ce même mémoire plusieurs observations qui montrent l’usage du trépan perforatif pour accélerer l’exfoliation & pour l’empêcher ; l’usage de la rugine & des couronnes du trépan pour procurer l’exfoliation ; les cas où il a fallu employer le ciseau & le maillet de plomb pour enlever à plusieurs reprises des portions d’os altérées, & les obstacles particuliers qui peuvent retenir & engager une piece d’os qui doit se séparer. (Y)

C’étoit une opinion commune & reçue parmi les anciens, que tous les os découverts doivent s’exfolier ; c’est pourquoi ils tenoient pendant long-tems les levres de la plaie écartées l’une de l’autre, en attendant cette exfoliation. L’expérience & la raison ont détruit ce préjugé, & ont fait voir qu’en temponnant les plaies où les os sont simplement découverts, on en retarde la guérison, & l’on expose les blessés à des accidens fâcheux : ce n’est pas cependant que l’exfoliation des os ne soit presque toûjours l’ouvrage de la pure nature, & que la plûpart des précautions qu’on prend pour produire cette exfoliation, ne soient d’ordinaire inutiles ou nuisibles : il faut dire hautement ces sortes de vérités.

En effet, combien de fois voit-on des chirurgiens, qui, pendant des mois entiers, même pendant des années entieres, se flatent vainement de parvenir à l’exfoliation d’une partie de quelque os, par le charpi sec, l’esprit-de-vin, les caustiques, & la rugine, tandis que d’autres sans tous ces secours, voyent en peu de tems une heureuse exfoliation se produire chez leurs malades, c’est qu’alors la nature étoit elle-même l’artiste de l’exfoliation. Le plus grand secret du chirurgien est de laisser agir cette nature, d’observer ses démarches, de ne pas contrecarrer ses opérations, de conserver à la partie sa chaleur naturelle, ou de l’augmenter quand elle est languissante. Il n’y a pas seulement de la droiture, mais du bon sens, à reconnoître dans les Arts les plus utiles, les bornes & les limites de leur puissance. Les habiles gens qui professent de tels arts n’y perdent rien, & les fripons trouvent moins de dupes. Addition de M. le Chevalier de Jaucourt.

On donne aussi le nom d’exfoliation, à la séparation d’une membrane, d’un tendon, & autres parties molles, froissées & meurtries par quelque cause extérieure, ou altérées par l’impulsion de l’air à l’occasion d’une plaie, ou par des matieres purulentes ; le