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De plus comme les mois lunaires reviennent les mêmes tous les 19 ans, c’est-à-dire qu’après cette période ils recommencent aux mêmes jours ; de même la différence entre l’année lunaire & l’année solaire, revient la même après dix-neuf ans ; & comme il faut toûjours ajoûter cette différence à l’année lunaire, pour la concilier avec l’année solaire, ou la rendre égale à l’année solaire, on appelle ces différences, qui appartiennent respectivement à chaque année du cycle lunaire, épacte annuelle, ou simplement épacte. Ainsi le mot épacte signifie, dans l’usage ordinaire, le nombre qu’il faut ajoûter à l’année lunaire, pour la faire correspondre à la solaire.

C’est sur ce rapport mutuel entre le cycle de la Lune & le cycle des épactes, qu’est fondée la regle qui enseigne à trouver l’épacte convenable à une année quelconque du cycle lunaire ; elle consiste à multiplier l’année donnée du cycle lunaire par onze ; & si le produit est moindre que 30, il indique lui-même l’épacte cherchée ; s’il est plus grand que trente, il faudra le diviser par 30, & ce qui reste après la division sera l’épacte. Par exemple je veux connoître l’épacte de l’année 1712 : comme c’est la troisieme année du cycle lunaire, il s’ensuit de-là que 3 est l’épacte de cette même année 1712 ; car  ; & 33 étant divisé par 30, on trouve 3 pour reste de la division, c’est-à-dire pour l’épacte. Il faut remarquer qu’il s’agit ici de l’épacte julienne ; le nombre 3, qui multiplie 11 dans le calcul précédent, indique que l’année 1712 est la troisieme du cycle lunaire : or nous avons vû ci-dessus que la premiere année du cycle lunaire a 11 d’épacte, la seconde 22 ou 2 fois 11, la troisieme 33 ou 3 fois 11, & ainsi de suite. Nous enseignerons plus bas à trouver l’épacte grégorienne. Voyez Cycle.

On peut trouver par le moyen de l’épacte à quel jour d’un mois & d’une année donnée, doit tomber la nouvelle Lune ; on en vient à-bout en cette sorte. On ajoute l’épacte de l’année donnée au nombre de mois, à compter depuis Mars inclusivement ; si la somme est moindre que trente, il faudra la soustraire de 30 ; si elle est plus grande, il la faudra soustraire de 60, & le reste marquera dans les deux cas le jour de la nouvelle Lune.

Si on cherche la nouvelle Lune pour les mois de Janvier & de Mars, alors il ne faudra rien ajoûter à l’épacte ; si c’est pour Février ou Avril, il ne faudra ajoûter que l’unité.

Par exemple je veux connoître à quel jour de Décembre est tombée la nouvelle Lune en l’année 1711, dont l’épacte étoit 22 ; je trouve par les regles précédentes que ce doit avoir été le 28 Décembre, car 22+10=32, & 60−32=28. Voyez Lune.

La raison de cette pratique est évidente. L’épacte étant 22 par l’hypothese, la Lune a 22 jours au premier de Mars, à-peu-près 23 au premier d’Avril, 24 au premier de Mai, &c. car puisque l’épacte croît de 11 jours par an, on peut supposer qu’elle croît à-peu-près d’un jour par mois depuis Mars jusqu’en Décembre. Donc au premier Décembre la Lune a 32 jours, c’est-à-dire la nouvelle Lune a 2 jours. Donc pour avoir la nouvelle Lune de Décembre, il faut de 30 ôter 2, ou ce qui est la même chose, 32 de 60.

Ayant ainsi trouvé le jour auquel tombe la nouvelle Lune, il est aisé de conclure de-là quel est l’âge de la Lune pour un jour donné. Voyez Lune & Age.

Il y a d’ailleurs pour cela une autre regle particuliere, & que voici.

Il faut ajoûter ensemble l’épacte de l’année, le nombre de mois depuis Mars inclusivement, & le jour donné dans le mois. Si le total est moins que 30, il marquera l’âge de la Lune ; s’il est plus grand que 30, il faudra le diviser par 30, & le reste de la di-

vision montrera l’âge de la Lune, c’est-à-dire combien

il s’est écoulé de jours depuis la nouvelle Lune. Cette méthode ne peut jamais être sujette à un seul jour d’erreur.

Par exemple si l’on demande quel étoit l’âge de la Lune le 31 Décembre de l’année 1711, on trouvera par cette regle que la Lune avoit trois jours, c’est-à-dire qu’il s’étoit écoulé trois jours depuis la nouvelle Lune ; car 22+10+31=63, & 63 étant divisé par 30, il reste 3 ; ce qui convient exactement avec la regle précédente, par laquelle on a trouvé que la nouvelle Lune étoit arrivée la même année le 28 Décembre.

On peut encore abréger cette pratique par le moyen d’une table, où l’on marquera les épactes, & qui fera voir tout d’un coup le jour de la nouvelle Lune. Voici comment cette table est formée. On écrit de suite tous les mois, chacun avec le nombre des jours qu’ils contiennent ; on met au premier Janvier le nombre 30 ou *, au second du même mois le nombre 29, au troisieme le nombre 28, & ainsi de suite jusqu’à 1 inclusivement : après quoi ou recommence le même ordre, & on forme de cette maniere une suite de douze mois lunaires & de quelques jours, avec cette précaution qu’on met les nombres 25 & 24 au même jour dans les mois pairs lunaires.

La raison de cette pratique est que les mois lunaires sont alternativement de 30 & de 29 jours. Par le moyen de cette table, on trouvera facilement la nouvelle Lune de chaque mois ; car il n’y aura qu’à chercher le jour du mois auquel est jointe l’épacte de l’année proposée. Cependant il y a encore une précaution à prendre ; car il faut distinguer entre l’épacte julienne & la grégorienne : la différence de ces deux épactes vient de ce que l’année julienne commence plûtard que l’année grégorienne de 11 jours ; c’est pourquoi après avoir trouvé, comme nous l’avons enseigné, l’épacte julienne, on ôtera 11 de cette épacte, qu’on augmentera de 30 jours s’il est nécessaire, & on aura l’épacte grégorienne. Ainsi on trouvera que l’épacte grégorienne de 1712 est 22 ; & les nouvelles Lunes dans l’année 1712, nouveau style se trouveront 11 jours plûtard dans chaque mois, que dans l’année julienne, comme cela doit être en effet. Nous ne mettrons point ici cette table, qu’on peut voir dans un grand nombre d’ouvrages, entre autres dans les élémens de Chronologie de Wolf, dans le traité du calendrier de M. Rivard, &c.

Il se trouve par un hasard heureux, que le nombre des jours dont l’année grégorienne differe de l’année julienne, est précisément le même que le nombre des jours dont l’année solaire surpasse l’année lunaire : car il arrive par-là que l’épacte grégorienne pour une année, est la même que l’épacte julienne de l’année précédente.

Il faut observer que comme le cycle de dix-neuf années anticipe sur les nouvelles Lunes d’un jour en 312 ans, de même aussi le cycle des épactes n’a pas toûjours lieu, la proemptose diminuant les différentes épactes d’un jour en 312 ans. V. Proemptose.

Il faut donc pour avoir les épactes, diminuer alors d’une unité celles qu’on devroit avoir par la regle ci-dessus. Ainsi l’épacte que donne alors le calendrier n’est pas exacte ; de sorte que si elle est 22 suivant le calendrier, il faudra prendre 21, parce que la nouvelle Lune au lieu de tomber au jour du mois où est marqué 22, tombe au jour précédent : c’est pourquoi au bout de ce tems l’ordre des épactes change, & au bout de 312 autres années il change encore, & ainsi de suite Une autre raison qui fait changer le cycle des épactes dans le calendrier grégorien, c’est que sur quatre années seculaires, il y en a trois qui ne sont point bissextiles ; de sorte que ces an-