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des fluides trop abondans ou trop épais pour pouvoir y couler avec facilité. L’engorgement a lieu dans toute sorte d’obstructions. Voy. Obstruction. (d)

ENGORGEMENT, (Jardinage.) se dit quand il se fait des obstructions dans la nourriture d’un arbre par surabondance d’humeurs ; alors la séve s’engorge, elle s’arrête, & est interceptée dans son cours, soit par quelque vice qui lui est particulier, soit par trop de plénitude dans les conduits, ce qui arrive quand on ne coupe point par-derriere la ligature de la greffe. Cet accident cause alors un engorgement, une obstruction, & c’est ce qu’on appelle strangulation ou étranglement, qui fait périr la greffe en peu de tems. (K)

Engorgement, (Hydr.) se dit d’une conduite où il est entré assez d’ordures pour la boucher. On y remédie en ôtant les tampons, les robinets, & lâchant toute l’eau qui entraîne ces ordures. (K)

ENGORGER, en termes d’Artificiers, c’est remplir de composition le trou vuide, ou l’ame qu’on a laissée à l’orifice d’un jet, ou tel autre artifice. Dict. de Trévoux.

ENGOULÉ, adj. terme de Blason, qui se dit des bandes, croix, sautoirs, & autres pieces, dont les extrémités entrent dans la gueule d’un lion, d’un léopard, d’un dragon, &c. comme les armoiries de Guichenon. Il y a aussi des mufles de lions qui engoulent le casque, comme dans les anciennes armoiries des ducs de Savoie.

Touar en Espagne, d’azur à la bande d’or engoulée de deux têtes de lion de même.

ENGOURDISSEMENT, sub. m. (Medecine.) ce terme est employé pour signifier la diminution de la faculté d’exercer le sentiment attaché à toute la surface du corps ; dans ce sens l’engourdissement est particulierement une lésion du tact, torpor.

Il peut être causé par le froid, qui resserre tellement la peau & les houppes nerveuses, que le fluide qui coule dans les nerfs des parties affectées, ne peut pas parvenir jusqu’à leurs extrémités, ensorte que le tact semble se faire avec l’interposition d’un corps étranger. L’engourdissement de cette espece est aussi quelquefois l’effet de la compression des nerfs qui se distribuent à un membre, comme dans le cas où on est assis sur une cuisse dans une situation genée ; elle empêche le cours libre du fluide dans ces nerfs, d’où doit résulter nécessairement le défaut, ou au moins la diminution du sentiment & même du mouvement de cette partie. C’est par cette raison que l’inflammation des reins cause aussi quelquefois l’engourdissement des cuisses.

Si l’engourdissement est général, & que l’exercice du sentiment & du mouvement ne puisse se faire que très-imparfaitement, c’est alors l’effet d’un vice dans le cerveau, qui diminue la distribution du fluide nerveux ; c’est souvent un avant-coureur de l’apoplexie dans les personnes qui n’étoient pas malades auparavant. Hippocrate, vij. coac. præs. sect. 2. Voyez Apoplexie. Ce peut être aussi une paralysie imparfaite. Voyez Paralysie.

L’engourdissement & la surdité qui surviennent dans les maladies aiguës, sont un très-mauvais signe, selon l’auteur des présages de cos, à moins qu’ils ne soient causés par un dépôt critique de la matiere morbifique sur le principe des nerfs, & dans ce cas-là même c’est un symptome fâcheux.

L’engourdissement, torpor, peut aussi-être accompagné d’une sorte de sentiment douloureux, comme on l’éprouve par l’attouchement d’un corps élastique actuellement agité par de très-promptes & très-nombreuses vibrations : l’effet que l’on attribue à la torpille est aussi de cette nature, & provient vraissemblablement d’une cause approchante. Voyez Torpille.

Engourdissement, se dit aussi de l’esprit, stupor, & dans ce sens il peut presque signifier la même chose que l’anastaisie de Boerhaave, instit. med. symptomatolog. §. 859. il en est comme le premier degré. C’est une affection du sensorium commune, qui le rend moins propre à recevoir les impressions qui constituent les sensations internes, ou à les transmettre à l’ame les ayant reçues ; l’engourdissement de l’esprit est aussi un symptome très-funeste dans les maladies aiguës, selon Hippocrate dans les coaques, 374. d’autant plus qu’elles deviennent mortelles, sans qu’on s’en apperçoive pour ainsi dire, le malade paroissant simplement être dans un état tranquille. Voyez Sensation. (d)

ENGRAINER un Cheval. (Manege, Maréchall.) C’est ajoûter à sa nourriture ordinaire, des alimens consistant dans les grains des végétaux qui lui sont propres. On ne sauroit être trop circonspect eu égard à la quantité de grains, quand il s’agit de l’entretien des poulains, du rétablissement des chevaux qui ont été malades & qui en ont été privés pendant quelque tems, &c. Voyez Nourriture. (e)

ENGRAIS, s. m. (Œcon. rustique.) On comprend sous ce nom toutes les choses qui, répandues sur la terre, servent à la féconder, comme sont les fumiers, les terres, &c.

Les engrais sont en général la plus grande ressource qu’ait l’Agriculture. Ils suppléent, jusqu’à un certain point, aux défauts des labours, & corrigent même l’intempérie des saisons. C’est un objet de dépense ; mais ce qu’il en coûte est pour le cultivateur un fonds placé au plus haut intérêt ; usure honnête que les lois & les mœurs devroient encourager de concert.

Quelques écrivains qui ont traité de l’Agriculture, ont paru vouloir affoiblir la nécessité des engrais. Ils disent que les plantes se nourrissant des parties les plus déliées de la terre, il suffit de les atténuer pour rendre celle-ci féconde. Ils ajoûtent que le fumier le fait par fermentation, mais qu’on y parvient beaucoup plus sûrement par la fréquence des labours ; que la charrue brise méchaniquement les molécules à une plus grande profondeur & beaucoup mieux. Nous connoissons dans toute son étendue l’utilité des labours ; & nous savons que la division des molécules de la terre est nécessaire à sa fécondité : mais cette division qu’operent les labours ne peut être que momentanée ; une pluie longue & violente l’anéantit. Quelque bien labourée qu’ait été une terre, si l’on y seme du blé sans l’avoir fumée, on la trouvera totalement affaissée à la fin de l’hyver, & ordinairement les racines du blé seront à la superficie. Un engrais, par sa fermentation continuelle, l’auroit défendu de l’affaissement. Il est difficile de se persuader qu’une division faite méchaniquement puisse fournir aux plantes assez de parties déliées pour leur nourriture. Une production continuelle doit épuiser ces parties, & les engrais en réparent l’épuisement : on doit attendre d’autant plus sûrement ce bien de ceux qu’on employe le plus, comme sont les fumiers, qu’eux-mêmes ne sont que les parties un peu altérées des plantes, qu’ils aident à reproduire. Ils contiennent des sels & des huiles qui sûrement, indépendamment de leur action, concourent, avec la terre proprement dite, à la nourriture des plantes.

Parmi les engrais que l’expérience a mis en usage, il en est dont l’effet dure un grand nombre d’années. Nous ne connoissons en France que la marne qui soit de ce genre. Les Anglois ont de plus leurs glaises, dont l’effet est excellent, & que peut-être nous pourrions avoir comme eux. Nous osons même assûrer, sans avoir fait là-dessus d’expériences directes, que le mélange de certaines glaises réussiroit dans nos terres legeres & chaudes. Tout mélange de terres de différente nature a toûjours eu des effets si heureux, que