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prohibition est fondée sur l’ordonnance de François I. art. 131 ; la déclaration d’Henri II. sur cet article, en 1549 ; & l’art. 276 de la coûtume de Paris, qui est en ce point conforme au droit commun.

On excepte néanmoins de cette prohibition les peres, meres, & autres ascendans qui sont tuteurs, curateurs, baillistes ou gardiens de leurs enfans, pourvû qu’ils ne soient pas remariés.

L’héritier présomptif qui se trouve tuteur ou curateur, est aussi excepté de la prohibition.

Le subrogé tuteur cesse aussi d’être prohibé dès que sa fonction est finie, c’est-à-dire après l’inventaire.

Après le décès du tuteur, le mineur peut donner à ses enfans.

Les parens des tuteurs & curateurs, autres que les enfans, ne sont point prohibés, à moins qu’il ne paroisse que ce soit un fidéicommis tacite pour remettre à la personne prohibée.

Un apprenti ne peut donner à son maître ; mais un compagnon le peut, parce que celui-ci n’est pas en la puissance du maître, comme l’apprenti.

Les domestiques peuvent aussi faire des donations à leur maître. Voyez ci-devant au mot Domestique.

Les novices ne peuvent donner au monastere dans lequel ils font profession, ni même à aucun autre monastere, si ce n’est une dot, laquelle ne doit pas excéder ce que les réglemens permettent de donner. Voyez Dot des Religieux et Religieuses.

Il n’est pas permis de faire aucun don considérable aux confesseurs ni aux directeurs de conscience, ni au monastere dont le confesseur ou directeur est religieux, s’il paroît qu’il y ait de la suggestion de la part de celui-ci.

Par rapport aux choses que l’on peut donner, celui qui a la capacité de disposer entre-vifs, peut, dans les pays de droit écrit, donner entre-vifs tous ses biens meubles & immeubles, pourvû que ce soit à personne capable, & sans fraude ; & sauf le droit acquis aux créanciers, & la légitime des enfans du donateur, s’il en a.

La liberté de disposer n’est pas si grande en pays coûtumier, il faut distinguer les meuble, & les immeubles.

Quelques coûtumes donnant au mineur une émancipation légale à l’âge de vingt ans, lui permettent à cet âge de disposer de ses meubles ; quelques-unes même lui permettent de le faire plûtôt : d’autres au contraire, où les émancipations légales ne sont point connues, ne permettent aucune disposition avant l’âge de vingt-cinq ans. Celle de Paris, article 272, permet à celui qui se marie, ou qui a obtenu bénéfice d’âge entheriné en justice, ayant l’âge de vingt ans accomplis, de disposer de ses meubles.

Il est permis communément de donner entre-vifs la totalité de ses meubles ; il y a néanmoins quelques coûtumes qui en restraignent la disposition à la moitié à l’égard du donateur qui a des enfans : d’autres, comme celle de Lodunois, qui ne permettent de disposer que du tiers des propres, veulent qu’à défaut de propres, les acquêts y soient subrogés ; & qu’à défaut de propres & d’acquêts, ils soient représentés par les meubles, de maniere qu’en ce cas on n’en peut donner que le tiers.

A l’égard des immeubles, il faut distinguer les acquêts & les propres.

La disposition des acquêts est en général beaucoup plus libre que celle des propres ; il y a cependant quelques coûtumes qui la restraignent, même pour les donations entre-vifs, soit en fixant purement & simplement la quotité que l’on en peut donner, soit en subrogeant les acquêts aux propres, comme fait la coûtume de Lodunois. Voyez Coutume de subrogation.

La plûpart des coûtumes permettent de donner entre-vifs la totalité des propres ; il y en a néanmoins quelques-unes qui ne permettent d’en donner que le tiers ou autre quotité.

Aucune donation entre-vifs ne peut comprendre d’autres biens que ceux qui appartiennent au donateur dans le tems de la donation ; & les donations de biens présens & à venir sont présentement nulles, même pour les biens présens, quand même elles auroient été exécutées en tout ou partie.

L’ordonnance déclare pareillement nulles les donations de biens présens, lorsqu’elles sont faites à condition de payer les dettes & charges de la succession du donateur en tout ou partie, ou autres dettes & charges que celles qui existoient lors de la donation ; même de payer les légitimes des enfans du donateur, au-delà de ce dont ledit donataire peut être tenu de droit.

On observe la même chose pour toutes les donations faites sous des conditions dont l’exécution dépend de la seule volonté du donateur.

Au cas que le donateur se soit réservé la liberté de disposer d’un effet compris dans la donation, ou d’une somme fixe à prendre sur les biens donnés, cet effet ou cette somme ne sont point compris dans la donation, quand même le donateur seroit mort sans en avoir disposé ; & en ce cas cet effet ou somme appartient aux héritiers du donateur, nonobstant toutes clauses contraires.

Les donations faites par contrat de mariage en faveur des conjoints ou de leurs descendans, même par des collatéraux ou par des étrangers, peuvent comprendre tant les biens à venir que les biens présens, en tout ou partie ; & en ce cas il est au choix du donataire de prendre les biens tels qu’ils se trouvent au jour du décès du donateur, en payant toutes les dettes & charges, même celles qui seroient postérieures à la donation, ou de s’en tenir aux biens qui existoient dans le tems qu’elle a été faite, en payant seulement les dettes & charges qui étoient alors existantes.

L’ordonnance veut aussi que les donations des biens présens faites à condition de payer indistinctement toutes les dettes & charges de la succession du donateur, même les légitimes indéfiniment, ou sous d’autres conditions dont l’exécution dépendroit de la volonté du donateur, puissent avoir lieu dans les contrats de mariage en faveur des conjoints ou de leurs descendans, par quelques personnes que lesd. donations soient faites ; & que le donataire soit tenu d’accomplir lesdites conditions, s’il n’aime mieux renoncer à la donation ; & au cas que le donateur se fût réservé la liberté de disposer d’un effet compris dans la donation de ses biens présens, ou d’une somme fixe à prendre sur ces biens, s’il meurt sans en avoir disposé, cet effet ou somme appartiendra au donataire ou à ses héritiers, & sont censés compris dans la donation.

La capacité personnelle de disposer en général, se regle par la coûtume du domicile du donateur ; mais l’âge auquel on peut donner tels & tels biens, la qualité & la quotité des biens que l’on peut donner, les personnes auxquelles on peut donner, se reglent par la loi du lieu de la situation des biens.

Pour ce qui est des formalités & des conditions de la donation, il faut distinguer celles qui sont de la forme extérieure, & qui ne servent qu’à rendre l’acte probant & authentique, comme l’écriture & la signature, de celles qui sont de la substance de l’acte, & proprement des conditions attachées à la disposition des biens, telles que la tradition, l’acceptation, & l’insinuation. Les formalités de la premiere classe se reglent par la loi du lieu, où se passe l’acte ; les autres se reglent par la loi de la situation des biens.