L’Encyclopédie/1re édition/COUTUME
* COUTUME, HABITUDE, s. f. (Gramm. syn.) termes relatifs à des états auxquels notre ame ne parvient qu’avec le tems. La coûtume concerne l’objet, elle le rend familier ; l’habitude a rapport à l’action, elle la rend facile. Un ouvrage auquel on est accoûtumé coûte moins de peine ; ce qui est tourné en habitude se fait quelquefois involontairement. On s’accoûtume aux visages les plus desagréables, par l’habitude de les voir. La coûtume, ou plûtôt l’accoûtumance, naît de l’uniformité, & l’habitude, de la répétition.
Coûtume, Usage, (Gramm. synon.) ces mots désignent en général l’habitude de faire une chose : on dit les usages d’un corps, & la coûtume d’un pays. On dit encore, avoir coûtume de faire une chose, & être dans l’usage de la faire ; telle personne a de l’usage du monde, tel mot n’est pas du bel usage. (O)
Coûtume, (Mor.) disposition habituelle de l’ame ou du corps. Les hommes s’entretiennent volontiers de la force de la coûtume, des effets de la nature ou de l’opinion ; peu en parlent exactement. Les dispositions fondamentales & originelles de chaque être, forment ce qu’on appelle sa nature. Une longue habitude peut modifier ces dispositions primitives ; & telle est quelquefois sa force, qu’elle leur en substitue de nouvelles, plus constantes, quoiqu’absolument opposées ; de sorte qu’elle agit ensuite comme cause premiere, & fait le fondement d’un nouvel être : d’où est venue cette conclusion très-littérale, que la coûtume est une seconde nature ; & cette autre pensée plus hardie de Pascal, que ce que nous prenons pour la nature n’est souvent qu’une premiere coûtume : deux maximes très-véritables. Toutefois, avant qu’il y eût aucune coûtume, notre ame existoit, & avoit ses inclinations qui fondoient sa nature ; & ceux qui réduisent tout à l’opinion & à l’habitude, ne comprennent pas ce qu’ils disent. Toute coûtume suppose antérieurement une nature, toute erreur une vérité : il est vrai qu’il est difficile de distinguer les principes de cette premiere nature de ceux de l’éducation ; ces principes sont en si grand nombre, & si compliqués, que l’esprit se perd à les suivre ; & il n’est pas moins difficile de démêler ce que l’éducation a épuré ou gâté dans le naturel. On peut remarquer seulement que ce qui nous reste de notre premiere nature est plus véhément & plus fort, que ce qu’on acquiert par étude, par coûtume, & par réflexion, parce que l’effet de l’art est d’affoiblir, lors même qu’il polit & qu’il corrige ; de sorte que nos qualités acquises sont en même tems plus parfaites & plus défectueuses que nos qualités naturelles : & cette foiblesse de l’art ne procede pas seulement de la résistance trop forte que fait la nature, mais aussi de la propre imperfection de ses principes, ou insuffisans, ou mêlés d’erreurs. Sur quoi cependant je remarque, qu’à l’égard des lettres l’art est supérieur au génie de beaucoup d’artistes, qui ne pouvant atteindre la hauteur des regles, & les mettre toutes en œuvre, ni rester dans leur caractere qu’ils trouvent trop bas, ni arriver au beau naturel, demeurent dans un milieu insupportable, qui est l’enflure & l’affectation, & ne suivent ni l’art ni la nature. La longue habitude leur rend propre le caractere forcé ; & à mesure qu’ils s’éloignent davantage de leur naturel, ils croyent élever la nature : don incomparable, qui n’appartient qu’à ceux que la nature même inspire avec le plus de force. Mais telle est l’erreur qui les flatte ; & malheureusement rien n’est plus ordinaire que de voir les hommes se former, par étude & par coûtume, un instinct particulier, & s’éloigner ainsi, autant qu’ils peuvent, des lois générales & originelles de leur être ; comme si la nature n’avoit pas mis entre eux assez de différence, sans y en ajoûter par l’opinion. De-là vient que leurs jugemens se rencontrent si rarement : les uns disent cela est dans la nature ou hors de la nature, & les autres tout au contraire. Parmi ces variétés inexplicables de la nature ou de l’opinion, je crois que la coûtume dominante peut servir de guide à ceux qui se mêlent d’écrire, parce qu’elle vient de la nature dominante des esprits, ou qu’elle la plie à ses regles ; de sorte qu’il est dangereux de s’en écarter, lors même qu’elle nous paroît manifestement vicieuse. Il n’appartient qu’aux hommes extraordinaires de ramener les autres au vrai, & de les assujettir à leur génie particulier : mais ceux qui concluroient de-là que tout est opinion, & qu’il n’y a ni nature ni coûtume plus parfaite l’une que l’autre par son propre fond, seroient les plus inconséquens de tous les hommes. Article de M. Formey.
« C’est, dit Montagne, une violente & traîtresse maîtresse d’école, que la coûtume. Elle établit en nous peu-à-peu, à la dérobée, le pié de son autorité ; mais par ce doux & humble commencement l’ayant rassis & planté avec l’aide du tems, elle nous découvre tantôt un furieux & tyrannique usage, contre lequel nous n’avons plus la liberté de hausser seulement les yeux… Mais on découvre bien mieux ses effets aux étranges impressions qu’elle fait en nos ames, où elle ne trouve pas tant de résistance. Que ne peut-elle en nos jugemens & en nos créances ?… J’estime qu’il ne tombe en l’imagination humaine aucune fantaisie si forcenée, qui ne rencontre l’exemple de quelque usage public, & par conséquent que notre raison n’étaye & ne fonde.... Les peuples nourris à se commander eux-mêmes, estiment toute autre forme de police monstrueuse. Ceux qui sont duits à la monarchie en font de même. C’est par l’entremise de la coûtume que chacun est content du lieu où nature l’a planté ».
Coûtume, (Jurisprud) en latin consuetudo, est un droit non écrit dans son origine, & introduit seulement par l’usage, du consentement tacite de ceux qui s’y sont soûmis volontairement ; lequel usage après avoir été ainsi observé pendant un long espace de tems, acquiert force de loi.
La coûtume est donc une sorte de loi ; cependant elle differe de la loi proprement dite, en ce que celle-ci est ordinairement émanée de l’autorité publique, & rédigée par écrit dans le tems qu’on la publie ; au lieu que la plûpart des coûtumes n’ont été formées que par le consentement des peuples & par l’usage, & n’ont été rédigées par écrit que long-tems après.
Il y a beaucoup de rapport entre usage & coutume, c’est pourquoi on dit souvent les us & coûtumes d’un pays. Cependant par le terme d’usage on entend ordinairement ce qui n’a pas encore été rédigé par écrit ; & par coûtume, un usage qui étoit d’abord non écrit, mais qui l’a été dans la suite.
En quelques occasions on distingue aussi les us des coûtumes ; ces us sont pris alors pour les maximes générales, & les coûtumes en ce sens sont opposées aux us, & signifient les droits des particuliers de chaque lieu, & principalement les redevances dûes aux seigneurs.
On dit aussi quelquefois les fors & coûtumes, & en ce cas le terme de coûtume signifie usage, & est opposé à celui de sors, qui signifie les priviléges des communautés & ce qui regarde le droit public.
Les coûtumes sont aussi différentes des franchises & priviléges : en effet, les franchises sont des exemptions de certaines servitudes personnelles, & les priviléges sont des droits attribués à des personnes franches, outre ceux qu’elles avoient de droit commun ; tels sont le droit de commune & de banlieue, l’usage d’une forêt, l’attribution des causes à une certaine jurisdiction.
L’origine des coûtumes en général est fort ancienne ; tous les peuples, avant d’avoir des lois écrites, ont eu des usages & coûtumes qui leur tenoient lieu de lois.
Les nations les mieux policées, outre leurs lois écrites, avoient des coûtumes qui formoient une autre espece de droit non écrit : ces coûtumes étoient même en plusieurs lieux qualifiées de lois ; c’est pourquoi on distinguoit deux sortes de lois chez les Grecs & chez les Romains, savoir les lois écrites, & les lois non écrites : les Grecs étoient partagés à ce sujet ; car à Lacédémone il n’y avoit pour loi que des coûtumes non écrites ; à Athenes au contraire on avoit soin de rédiger les lois par écrit. C’est ce que Justinien explique dans le titre second de ses institutes, où il dit que le droit non écrit est celui que l’usage a autorisé ; nam diuturni mores consensu utentium comprobati legem imicantur.
Les coûtumes de France qui sont opposées aux lois proprement dites, c’est-à-dire au droit Romain, & aux ordonnances, édits & déclarations de nos rois, étoient dans leur origine des usages non écrits, qui par succession de tems ont été rédigés par écrit.
Elles ont été formées en partie des usages des anciens Gaulois, en partie du droit Romain, des usages des Germains dont les Francs sont issus, des anciennes lois des Francs ; & autres qui ont été recueillies dans le code des lois antiques, savoir la loi des Visigoths, celle des Bourguignons, la loi salique & celle des Ripuariens, celles des Allemands, Bavarois, Saxons, Anglois, Frisons, Lombards, & des capitulaires de nos rois.
Nous voyons en effet que la plûpart des matieres qui entrent dans notre droit coûtumier, ont été tirées de ces anciennes lois ou coûtumes, telles que la communauté de biens qui nous vient des Gaulois, le doüaire qui nous vient des Germains, les fiefs qui nous viennent aussi des Germains & des Lombards, & les propres dont l’usage vient des Francs.
La révolution qui arriva en France au commencement de la troisieme race ayant fait tomber toutes les lois dans l’oubli, on ne suivit plus qu’un droit incertain, fondé seulement sur l’usage ; les ducs, les comtes, & autres officiers royaux, s’étant attribué la propriété des villes & provinces dont ils n’avoient que l’administration, & les plus puissans d’entr’eux s’étant même érigés en souverains, entreprirent chacun de donner des lois à leurs sujets ; c’est de-là que les coûtumes se sont tant multipliées dans le royaume.
Les nations voisines de la France avoient aussi dès-lors leurs coûtumes particulieres, qui furent rédigées par écrit, telles que celle de Barcelonne en 1060, celle d’Angleterre en 1080, celle de Béarn en 1088, le livre des fiefs en 1150, le miroir du droit de Saxe en 1120.
Les assises de Jérusalem qui y furent rédigées par écrit en 1099, contiennent un précis du droit coûtumier qui s’observoit alors en France, mais qui n’y étoit point encore rédigé par écrit.
Auparavant la rédaction des coûtumes par écrit, rien n’étoit plus incertain que le droit coûtumier ; dans toutes les contestations, chacun alléguoit pour soi la coûtume ; les juges ordonnoient des enquêtes par turbes, qui souvent induisoient en erreur, & quelquefois laissoient le juge dans l’incertitude, parce qu’il arrivoit souvent que moitié des témoins alléguoit la coûtume d’une façon, & que l’autre moitié attestoit une coûtume toute contraire ; ce qui dépendoit beaucoup de la bonne ou mauvaise foi des témoins, qui étoient souvent gagnés pour attester une coûtume contraire à la véritable. Ces inconvéniens firent sentir la nécessité de rédiger les coûtumes par écrit.
On avoit déjà fait une premiere ébauche de cette rédaction, dans les chartes que Louis VII. & Philippe Auguste accorderent à plusieurs villes & bourgs dans les xj. & xij. siecles, pour y établir une commune ou chartes par lesquelles ils confirmerent celles qui avoient déjà été établies par quelques seigneurs. Ces chartes de commune confirment plusieurs usages qui étoient propres à chaque ville.
Mais du tems de S. Louis on commença à rédiger par écrit les coûtumes des provinces entieres : celles de Paris, d’Anjou, & d’Orléans, furent recueillies & confirmées dans les établissemens ou ordonnances que ce prince fit en 1270, avant de partir pour l’Afrique.
On tient communément que Charles VII. fut le premier qui ordonna que les coûtumes seroient rédigées par écrit : il est néanmoins certain que Philippe IV. avoit ordonné dès 1302, que dans chaque bailliage ou sénéchaussée on assembleroit plusieurs personnes capables pour informer des anciennes coûtumes du royaume, & de quelle maniere on en usoit du tems de S. Louis ; voulant que si depuis ce tems, outre les bonnes coûtumes qui avoient été approuvées, on en avoit introduit qui eussent déjà été abolies ou qui fussent injustes, elles seroient révoquées & réduites à leur ancien état, & que pour mémoire des bonnes coûtumes elles seroient registrées. Il ordonna aussi dans un autre article, que les juges garderoient soigneusement les usages des lieux & les coûtumes approuvées. Il y avoit par conséquent dès-lors des coûtumes, & l’on pensoit que pour avoir force de loi elles devoient être approuvées.
On trouve en effet quelques coûtumes qui furent rédigées par écrit à-peu-près vers ce tems, comme celle de Toulouse en 1285, celle de Provence & de Forcalquier en 1366, celle de Bragerac en 1368 ; & plusieurs autres qui ont depuis été réformées, comme les anciennes coûtumes de Champagne, de Bourgogne, de Normandie, d’Amiens ; la plûpart de ces anciennes rédactions sont en latin, telles que les coûtumes de Toulouse, de Provence, & de Forcalquier. On tient communément que l’ancienne coûtume de Normandie est la premiere qui fut rédigée en langue vulgaire.
Outre les textes des anciennes coûtumes, il y a encore quelques ouvrages composés par différens particuliers qui ont recueilli soigneusement le droit coûtumier, tel qu’il s’observoit de leur tems. De ce nombre sont le Conseil de Pierre de Fontaines ; le Livre à la reine Blanche, que l’on dit être du même auteur ; les Coûtumes de Beauvaisis, composées par Philippe de Beaumanoir en 1285 ; la Somme rurale de Bouteiller ; le grand Coûtumier, composé sous le regne de Charles VII. les Décisions de Jean des Mares ; & les Coûtumes notoires du châtelet, qui sont la plûpart des résultats d’enquêtes par turbes faites depuis l’an 1300 jusqu’en 1387.
L’autorité des coûtumes devint si grande, que Charles IV. fit défenses d’alléguer les lois romaines contre la coûtume ; un ancien arrêt dont Bodin fait mention liv. 1. ch. viij. le défendit aussi en ces termes : Les avocats ne soient si hardis de mettre droit écrit contre la coûtume.
Charles VII. après avoir chassé les Anglois du royaume, donna en 1453 une ordonnance, par laquelle il renouvella le projet qui avoit déjà été formé avant lui, de faire rédiger par écrit toutes les coûtumes ; ce qui n’avoit été exécuté que pour un très-petit nombre. Il ordonna donc que toutes les coûtumes seroient écrites & accordées par les praticiens de chaque pays, puis examinées & autorisées par le grand-conseil & par le parlement ; & que les coûtumes ainsi rédigées & approuvées seroient observées comme lois, sans qu’on en pût alléguer d’autres.
Il n’y eut cependant aucune coûtume rédigée sous Charles VII. & la premiere qui fut rédigée en exécution de son ordonnance, fut celle de Ponthieu en 1495, sous Charles VIII.
Le travail de la rédaction des coûtumes avança peu jusqu’au tems de Louis XII. sous lequel on rédigea les coûtumes d’Anjou, du Maine, de Chartres & de Dreux ; celles de Meaux, de Vitry, de Chaumont en Bassigny, de Troyes, d’Auvergne, d’Acqs, Saint-Sever, la Bourt, Bayonne, la Rochelle & Angoumois.
Les autres coûtumes ont été rédigées sous François I. & sous ses successeurs, depuis 1518 jusqu’en 1609.
Quelques unes, après avoir été rédigées par écrit, ont été dans la suite réformées, comme celles de Paris, d’Orléans, de Normandie, de Bretagne, d’Artois & plusieurs autres.
Les seules qui ayent été réformées de nos jours, sont les coûtumes locales d’Artois & les coutumes locales de Saint-Omer.
Toutes les coûtumes du royaume ont été rédigées ou réformées en vertu de lettres patentes du Roi, suivant lesquelles on assemble les trois états de la province. On ordonne dans une premiere assemblée à tous les juges royaux, greffiers, maires & échevins, d’envoyer leurs mémoires sur les coûtumes, usages & styles qu’ils ont vû pratiquer d’ancienneté. Les états choisissent ensuite un petit nombre de notables, auxquels on remet ces mémoires pour les mettre en ordre, & en composer un seul cahier qu’on lit dans l’assemblée des états, & où l’on examine si les coûtumes sont telles qu’on les présente dans le cahier. A chaque article, chacun des députés des trois états a la liberté de faire ses observations ; & enfin les articles sont adoptés, rejettés ou modifiés, suivant ce qui est arrêté dans l’assemblée : & les coûtumes ainsi rédigées, sont apportées au parlement pour y être registrées, si faire se doit.
On voit dans l’histoire de Lorraine, que quand le duc de Lorraine eut fait rédiger la coûtume de Bar, le procureur général du Roi au parlement de Paris interjetta appel de sa rédaction ; que le duc de Lorraine fut partie sur l’appel, en qualité d’intimé ; & qu’après que son avocat eut été entendu, il intervint arrêt le 4 Décembre 1581, qui ordonna la publication de cette coûtume.
La coûtume de Ponthieu fut rédigée par les officiers des lieux, seuls. La plûpart des autres l’ont été par des commissaires nommés par le Roi, & tirés ordinairement du corps du parlement, lesquels ont présidé à l’assemblée des états, & arrêté les articles en la forme où ils sont ; mais n’ayant pas eu le tems de composer eux-mêmes les cahiers des coûtumes, ni de les corriger à loisir, ce sont les officiers du pays qui ont eu le plus de part à la rédaction ; c’est pourquoi le style de la plûpart de ces coûtumes est si grossier, & il s’y trouve si peu d’ordre & de méthode ; ce qui n’empêche pas que les commissaires qui y ont présidé, ne fussent des gens de mérite.
Plusieurs de ces commissaires ont beaucoup imprimé de leur génie dans la coûtume qu’ils ont fait rédiger : par exemple, le premier président Lizet, qui assista à la rédaction de celle de Berry en 1539, la rendit, autant qu’il put, conforme au droit romain, quoique cette province fût purement coûtumiere. M. le Maistre, au contraire, qui fut depuis premier président, ne souffrit pas que les principes du droit romain fussent insérés dans les coûtumes à la rédaction desquelles il assista.
On compte environ soixante coûtumes générales dans le royaume, c’est-à-dire qui sont observées dans une province entiere ; & environ trois cents coûtumes locales qui ne sont observées que dans une seule ville, bourg ou village.
Il n’y a point de province où il y ait tant de bigarrure à cet égard, que dans la province d’Auvergne ; les coûtumes locales y sont en très-grand nombre, chaque ville, bourg ou village y a sa coûtume particuliere. D’autres sont régies par le droit écrit ; & les lieux régis par le droit coûtumier, sont entremêlés avec ceux qui suivent le droit écrit.
Louis XI. avoit, dit-on, dessein de réduire toutes les coûtumes du royaume en une seule, & que l’on usât partout du même poids & de la même mesure. Ce loüable dessein est demeuré jusqu’à présent sans exécution. Quelques-uns ont crû qu’il avoit été renouvellé par M. le premier président de Lamoignon ; que c’étoit dans cette vûe qu’il avoit fait composer ces arrêtés célebres, auxquels il ne manque que d’être revêtus de l’autorité publique : mais M. Auzanet qui y avoit eu beaucoup de part, assûre que l’objet de M. de Lamoignon étoit seulement de fixer la jurisprudence dans le ressort du parlement de Paris. Il convient que l’on a proposé plusieurs fois d’établir une loi, un poids & une mesure qui fussent communs pour toute la France : que cela ne seroit pas difficile à exécuter pour les poids & mesures ; mais de faire une loi générale pour tous les pays de coûtume & de droit écrit, c’est à quoi il prétend que l’on ne peut pas parvenir : il en allegue pour raison que plusieurs provinces se sont données à la France, à la charge de les maintenir dans l’usage de leurs lois & coûtumes ; que les habitans de chaque pays croyent que leurs lois sont les meilleures ; & enfin que si on changeoit les coûtumes, cela causeroit beaucoup de trouble dans les familles, par rapport aux conventions & dispositions qui ont été faites suivant ces coûtumes.
Ces considérations ne paroissent cependant pas capables de balancer l’avantage commun que l’on retireroit de n’avoir qu’une seule loi. N’est-il pas étrange de voir dans un même royaume tant de coûtumes différentes ; & que dans une même province où il se trouve plusieurs coûtumes locales dont le ressort n’est séparé que par une riviere ou par un chemin, ce qui est réputé juste d’un côté, soit réputé injuste de l’autre ? La prévention des peuples pour leurs anciens usages, n’est pas ce que l’on doit consulter, mais le bien public. En rendant toutes les coûtumes uniformes pour l’avenir, on ne changeroit rien à ce qui auroit été fait par le passé ; ainsi il n’y auroit nul inconvénient, & il ne seroit pas plus difficile de réduire tout à une même coûtume, que de réduire tout à un poids & à une mesure.
Les différentes coûtumes du royaume ont été rassemblées en plusieurs volumes, ce que l’on appelle le coûtumier général ; & les coûtumes générales & particulieres de certaines provinces ont été pareillement rassemblées avec leurs commentateurs, ce qui a formé plusieurs coûtumiers particuliers, que l’on a distingués chacun par le nom de la province dont ils contiennent les coûtumes, tels que les coûtumiers de Picardie, de Vermandois, de Poitou, &c. Voyez Coutumier.
Quelque soin que l’on ait pris pour la rédaction ou réformation des coûtumes, il s’en faut beaucoup que ces coûtumes ayent prévû toutes les matieres & toutes les questions qui se présentent ; les dispositions même qu’elles contiennent, ont besoin d’interprétation : c’est ce qui a fait naître les commentaires, observations, conférences & autres ouvrages sur le texte des coûtumes.
Je ne sai où M. Caterinot a pris que la coûtume de Berry est la premiere qui ait été commentée par Boërius ; car ce commentaire est moins ancien que celui de Dumolin sur la coûtume de Paris, & il y en a encore de plus anciens sur d’autres coûtumes. Je crois qu’un des premiers est un volume in-12. sur la coûtume de Bretagne, par Dalier & autres, qui fut imprimé en gothique à Rennes en 1484.
Il n’y a guere de coûtume qui n’ait eu quelque commentateur. Celle de Paris en a eu environ vingt-cinq plus ou moins considérables, dont le premier & le plus recommandable est Me. Charles Dumolin, qui a aussi fait des notes sommaires sur les autres coûtumes.
La plûpart des autres commentateurs n’ont travaillé que sur la coûtume de leur pays ; & il est en effet difficile de bien commenter une coûtume & d’en bien posséder l’esprit, & de connoître tous les usages d’un lieu, sans y être né, ou du moins sans y être établi depuis long-tems.
Quelques auteurs, au lieu de commentaires, ont fait des conférences des coûtumes : Guenois, par exemple, a fait une conférence générale de toutes les coûtumes du royaume, qu’il a arrangé par matieres ; ce qui est fort utile pour comparer les coûtumes les unes aux autres, voir quel est le droit commun sur une matiere, & ce que chaque coûtume a de singulier.
D’autres ont fait des conférences particulieres pour une seule coûtume ; c’est-à-dire que pour l’éclaircir, ils ont rapporté sous chaque article les dispositions des autres coûtumes qui ont rapport au même objet.
M. Berroyer a fait la bibliotheque des coûtumes, qui est un catalogue raisonné des coûtumes par ordre chronologique.
Enfin plusieurs auteurs ont fait divers traités sur certains titres, articles, ou matieres dépendantes des coûtumes.
On a vû que chez les Romains les coûtumes n’étoient point écrites ; elles imitoient néanmoins les lois écrites, les interprétoient, & quelquefois même les corrigeoient & abrogeoient, tant par un non-usage de la loi écrite, que par un usage contraire qui y succédoit, & qui acquéroit force de loi : tels sont les principes que l’on trouve dans les lois 36. & 37. ff. de legibus.
Il n’en est pas tout-à-fait de même parmi nous : on appelle usage toute coûtume qui n’est point écrite, & l’on ne reconnoît de coûtume proprement dite, que celle qui est rédigée par écrit & autorisée par le prince.
L’usage est considéré comme le meilleur interprete des lois ; nous avons même des usages non-écrits qui ont en quelque sorte force de loi : mais tout cela n’a lieu qu’autant qu’ils ne sont point contraires à une loi subsistante.
A l’égard des coûtumes, depuis que l’ordonnance de 1667 a abrogé les enquêtes par turbes, on n’admet plus les parties à la preuve d’une coûtume non-écrite.
Il ne suffit même pas parmi nous, pour la validité d’une coûtume, qu’elle soit rédigée par écrit ; il faut qu’elle l’ait été par l’autorité du prince : car il n’en est pas ici comme anciennement chez les Romains, où le peuple avoit le pouvoir de faire des lois. En France, toute la puissance législative réside en la personne du Roi, & lui seul peut donner force de loi aux coûtumes. Les députés des trois états des provinces ne peuvent s’assembler que par son ordre ; leurs mémoires & cahiers, les dires & observations qu’ils font dans les procès-verbaux de rédaction, ne sont que des avis auxquels les commissaires du Roi ont tel égard que de raison : ce sont les commissaires du Roi qui arrêtent les articles, en vertu du pouvoir qui leur en est donné par les lettres patentes & par leur commission ; & si la difficulté est trop grande & mérite une instruction en forme, ils doivent renvoyer les parties au parlement ; la coûtume subsistant néanmoins par provision, comme il est dit dans les lettres patentes données à Moulins le 2 Septembre 1497, portant commission à Thibault Baillet président au parlement de Paris, & autres, pour faire publier dans chaque bailliage & sénéchaussée, les coûtumes qui étoient arrêtées par les commissaires du Roi.
Lorsque les coûtumes sont arrêtées par les commissaires du Roi, il faut qu’elles soient enregistrées au parlement ; car la loi ne prend son exécution que dû jour de la publicité qu’elle acquiert par l’enregistrement.
Quand une coûtume est ainsi revêtue de l’autorité publique, elle tient lieu de loi pour tous ceux qui lui sont soûmis, soit par rapport à leurs personnes, ou par rapport aux biens qu’ils possedent sous l’empire de cette coûtume.
Toutes personnes, de quelque qualité qu’elles soient, sont soûmises à la coûtume, les mineurs comme les majeurs, les nobles comme les rôturiers, les ecclésiastiques, les hôpitaux, les princes ; le Roi lui-même s’y soûmet, de même qu’aux autres lois.
Le parlement peut déclarer nulles de prétendues coûtumes qui ne sont point revêtues des formalités nécessaires, pour leur donner le caractere de loi ; & il y en a plusieurs exemples assez récents.
Hors ce cas, tous juges sont tenus de juger conformément aux coûtumes.
Le Roi peut y déroger par une ordonnance contraire, & n’a pas besoin pour cela du consentement des états de la province.
Les particuliers peuvent aussi, par leurs conventions & autres dispositions, déroger pour ce qui les concerne, aux dispositions des coûtumes, pourvû qu’elles ne soient que positives ou négatives, & non pas prohibitives.
On appelle disposition positive ou négative d’une coûtume, celle qui regle les choses d’une façon, sans néanmoins défendre de les régler autrement, soit que cette disposition soit conçûe en termes négatifs ou en termes positifs seulement, ou même absolus & impératifs.
Par exemple, l’article 220 de la coûtume de Paris qui porte, que homme & femme conjoints ensemble par mariage, sont communs en biens, &c. est une disposition conçûe en termes simplement positifs, ou même, si l’on veut, absolus & impératifs ; mais il n’est pas défendu par la coûtume d’exclure cette communauté : la disposition n’est pas prohibitive.
L’article 389. de la coûtume de Normandie, qui dit au contraire, que les personnes conjointes par mariage ne sont communs en biens, &c. est conçû en termes négatifs ; néanmoins il n’est pas non plus prohibitif, c’est pourquoi on peut stipuler qu’il y aura communauté.
Les dispositions de coûtumes qu’on appelle prohibitives, sont celles qui défendent de disposer autrement qu’il n’est reglé par la coûtume, soit que la disposition de la coûtume soit conçûe en termes négatifs, ne peut, ou autres termes équipollens.
Par exemple, dans la coûtume de Paris, l’article 292 qui permet de disposer par testament des meubles & acquêts, & du quint des propres, & non plus avant, est prohibitif pour la quotité que l’on peut donner de ses propres.
De même en Normandie, l’article 330 est prohibitif, négatif ; il porte que quelque accord ou convenant qui ait été fait par contrat de mariage, & en faveur d’icelui, les femmes ne peuvent avoir plus grande partie aux conquêts faits par le mari, que ce qui leur appartient par la coûtume, à laquelle les contractans ne peuvent déroger.
C’est une question fort controversée entre les auteurs, de savoir si les coûtumes sont le droit commun de la France, ou si c’est le droit Romain. La plûpart de ceux qui ont traité cette question, en ont parlé selon l’affection qu’ils avoient pour le droit Romain, ou pour le droit coûtumier : quelques auteurs surtout qui étoient originaires des pays de droit écrit, ont marqué trop de prévention pour la loi de leur pays.
Ce n’est pas que le droit Romain ne mérite toûjours beaucoup de considération, comme étant une loi fort sage ; mais par rapport à l’autorité qu’il doit avoir en France, il faut distinguer les tems & les lieux.
Avant la formation de nos coûtumes, le droit Romain a pû être considéré comme une loi générale pour toute la France ; mais depuis qu’il s’est établi des coûtumes dans plusieurs provinces, le droit Romain n’a plus eu le caractere de loi que pour les pays de droit écrit, où l’usage en a été continué.
Il y a bien quelques statuts & coûtumes locales dans les pays de droit écrit, tels que les statuts de Provence, les coûtumes de Toulouse & de Bordeaux ; mais ces coûtumes ne sont que des exceptions au droit Romain, qui forme le droit commun de ces pays.
Il y a mêmes quelques coûtumes, qui quoique qualifiées de générales, telles que celles du duché & du comté de Bourgogne, ne sont pareillement que des exceptions au droit Romain, que l’on doit suivre pour tous les cas qui ne sont pas prévûs dans ces coûtumes, ainsi qu’il est dit dans le préambule.
Dans les autres provinces purement coûtumieres, le droit Romain n’a point force de loi ; on n’y a recours que comme à une raison écrite.
On tient aussi communément que les coûtumes sont de droit étroit, c’est-à-dire qu’elles ne reçoivent point d’extension d’un cas à un autre, quoique quelques auteurs se soient efforcés de soûtenir le contraire.
Lorsqu’il se trouve un cas non prévû par les coûtumes, la difficulté est de savoir à quelle loi on doit avoir recours ; si c’est au droit Romain, ou aux coûtumes voisines, ou à celle de Paris.
Quelques-uns veulent que l’on défere cet honneur à la coûtume de Paris, comme étant la principale coûtume du royaume ; mais quoique ce soit une des mieux rédigées, elle n’a pas non plus tout prévû, & elle n’a pas plus d’autorité que les autres hors de son territoire.
Il faut distinguer les matieres dont il peut être question : si ce sont des matieres inconnues dans les coûtumes, & qui ne soient prévûes que dans les lois Romaines, on doit y avoir recours comme à une raison écrite.
S’il s’agit d’une matiere de coûtumes, il faut suppléer de même ce qui manque dans l’une par la disposition d’une autre, soit la coûtume de Paris ou quelque autre plus voisine, en s’attachant principalement à celles qui ont le plus de rapport ensemble, & qui paroissent avoir le même esprit ; ou s’il ne s’en trouve point qui ait un rapport plus particulier qu’une autre, en ce cas il faut voir quel est l’esprit général du droit coûtumier sur la question qui se présente.
Les coûtumes sont en général réelles, c’est-à-dire que leurs dispositions ne s’étendent point hors de leur territoire ; ce qui est exactement vrai par rapport aux biens fonds qui y sont situés. A l’égard des personnes, les coûtumes n’ont aussi d’autorité que sur celles qui leur sont soûmises, mais elles ont leur effet sur ces personnes en quelque lieu qu’elles se transportent.
Lorsque plusieurs coûtumes paroissent être en concurrence, & qu’il s’agit de savoir laquelle on doit suivre, il faut distinguer si l’objet est réel ou personnel.
S’il s’agit de regler l’état de la personne, comme de savoir si un homme est légitime ou bâtard, noble ou roturier, majeur ou mineur, s’il est fils de famille ou joüissant de ses droits, & s’il peut s’obliger personnellement ; dans tous ces cas & autres semblables, où la personne est l’objet principal du statut, & les biens ne sont que l’objet subordonné, c’est la coûtume du domicile qu’il faut suivre.
Cette même coûtume regle aussi le sort des meubles, & de tous les droits mobiliers & immobiliers qui suivent la personne.
Pour ce qui est des immeubles réels, tels que les maisons, terres, prés, bois, &c. les dispositions que l’on en peut faire, soit par donations entre-vifs ou par testament ; comme aussi les partages, ventes, échanges, & autres aliénations ou hypotheques, se reglent par la coûtume du lieu de la situation de ces biens.
Les formalités extérieures des actes se reglent par la loi du lieu où ils sont passés.
Tels sont en substance les principes que l’on suit en cas de concurrence de plusieurs coûtumes, pour déterminer celle que l’on doit suivre ; mais comme ces questions s’élevent pour toutes sortes de statuts en général, soit lois, coûtumes, statuts proprement dits, ou usages, nous expliquerons ces principes plus au long au mot Statut.
Coutume annuelle, est une redevance en grain, vin, ou autres denrées, qui se paye annuellement au seigneur pour raison de quelque héritage donné à cette condition, ou pour les denrées & marchandises vendues dans les foires & marchés. Voyez ci-après Coutume de blé, &c.
Bacquet, en son traité des droits de justice, chap. x. n°. 5. dit que par ce mot coûtume on ne doit pas entendre l’accoûtumance ou usage de lever tels droits, mais que ce mot est pris pour un tribut ou redevance qu’on a coûtume de lever en certain tems chaque année sur certaines denrées & marchandises qui se vendent & débitent aux foires & marchés.
Ce terme de coûtume pris dans ce sens, vient du droit Romain, où les tributs ordinaires étoient appellés coûtumes. La loi dit consuetudinem præstare, pour tributum præstare ; comme on voir en la loi 9. §. earum ff. de public.
Philippe I. s’exprime de même dans le privilége qu’il accorda à ceux de Chalo-Saint-Mas, ut in totâ terrâ regiâ nullam consuetudinem præstent ; ce qui s’entend des tributs ordinaires qui se levoient en ce tems-là, soit au profit du roi ou des seigneurs, ce que la coûtume d’Anjou appelle la grande & la petite coûtume. Voyez ci-après Grande & petite Coutume, Coutume du Pié rond.
Coutume de Bayonne, (Jurisp. Hist. & Fin.) est un droit local qui se perçoit dans le pays de labour, dans l’élection des Lannes & une partie du Bazadois. Les bourgeois de Bayonne en sont personnellement exempts, & toutes les marchandises qui leur appartiennent en conséquence des priviléges qu’ils se sont conservés par leur capitulation avec le roi Charles VII. Ce prince accorda la moitié de ce droit en propriété à la maison de Grammont, qui étoit alors très-puissante dans ce pays, en échange du château de Humblieres qui lui appartenoit dans la ville de Bordeaux. L’autre moitié de ce droit qui se perçoit au profit du roi, est comprise nommément dans le bail des fermes générales.
Coutumes de Bestiaux, voyez ci-après Coutumes de Blé, &c.
Coutumes de Blé, Vin, Volailles, Bestiaux, & autres denrées, sont des prestations de blé, vin & autres choses, qui se font au seigneur pour différentes causes.
Il y en a qui se payent par forme de péage, lorsque des marchandises passent sur un pont ou sous une porte.
D’autres se payent pour la vente qui se fait de ces marchandises, soit au marché ou en la seigneurie.
D’autres enfin se payent annuellement, pour raison de quelque héritage qui a été concédé à cette charge.
Il en est parlé dans plusieurs coûtumes, comme Tours, Anjou, Maine, Lodunois, Grand-Perche. Voyez ci-après Grande & petite Coutume.
Coutume bleue, est un surnom que les praticiens ont donné aux articles placités ou réglement de 1666 du parlement de Normandie. Ce réglement étant fait pour décider plusieurs cas qui n’étoient pas prévûs par la coûtume, on l’a regardé comme un supplément ou une seconde coûtume ; & comme l’imprimé ne formoit qu’un petit livret, que l’on vendoit broché & couvert d’un papier bleu, cela a donné occasion d’appeller ce réglement la coûtume bleue de Normandie.
Coutume de côté ou de simple côté, sont celles où pour succéder aux biens immeubles d’un défunt, il suffit d’être parent du côté d’où ils lui sont provenus ; si ce sont des biens paternels, il suffit d’être parent du côté paternel, & de même pour les biens maternels. On suit dans ces coûtumes la regle paterna paternis, materna maternis. Voyez ci-après Coutumes de côté & ligne.
Coutumes de côté & ligne, sont celles où pour succéder à un propre, il ne suffit pas d’être parent du défunt du côté d’où il lui est venu, mais où il faut encore être le plus proche parent du défunt du côté & ligne du premier acquéreur de ce propre, c’est-à-dire du premier qui l’a mis dans la famille. La coûtume de Paris & plusieurs autres semblables, sont des coûtumes de côté & ligne. Voyez ci-devant Coutumes de côté, & ci-après Ligne.
Coutume decrétée, est celle qui est omologuée par lettres patentes dûment enregistrées. Voy. ci-après Coutume omologuée & Omologation.
Coutumes domestiques, ou privées, ou familieres, familiares, sont des usages & arrangemens particuliers, introduits par convention dans certaines familles. Ces sortes de coûtumes n’ont point lieu quand elles sont contraires à la coûtume générale écrite, comme il fut jugé par arrêt prononcé en robe rouge par M. le président Seguier, le 9 Avril 1565, au sujet du partage du comté de Laval. Voy. Brodeau sur M. Louet, lett. R. n°. 37. & Pacte de succéder.
Coutumes d’égalité, sont celles qui défendent d’avantager un de ses héritiers plus que les autres.
De ces coûtumes, les unes sont ce qu’on appelle d’égalité simplement, les autres d’égalité parfaite. Les premieres défendent bien d’avantager un de ses héritiers au préjudice des autres, mais elles n’obligent pas les héritiers de rapporter ce qu’ils ont reçû ; ou bien elles permettent au pere de dispenser ses enfans du rapport, au moyen dequoi la prohibition d’avantager peut être éludée & l’égalité blessée. Telles sont les coûtumes de Paris, art. 304. & 307. Nivernois, chap. xxvij. art. 11. Berri, tit. xjx. art. 42. Bourbonnois, art. 308. au lieu que les coûtumes d’égalité parfaite obligent l’héritier à rapporter ce qu’il a reçû en avancement d’hoirie, & défendent de dispenser de ce rapport : telles sont les coûtumes d’Anjou & Maine.
Entre les coûtumes d’égalité parfaite, il y en a quelques-unes qui le sont tant en ligne directe qu’en collatérale ; d’autres en directe seulement, & non en collatérale : par exemple la coûtume de Vitri n’est d’égalité qu’en directe, suivant un arrêt du 4 Juillet 1729.
Dans toutes les coûtumes d’égalité lorsque le rapport a lieu, ce n’est qu’en faveur des cohéritiers qui le demandent, parce qu’il n’a été introduit qu’en leur faveur, & non au profit des créanciers qui ne sont pas recevables à le demander.
Coutumes d’entrecours, (Jurisprud.) voyez Coutumes de parcours, & les mots Entrecours & Parcours.
Coutumes familieres ou domestiques, voyez ci-devant Coutumes domestiques.
Coutumes de ferrête, est une espece de communauté de biens, usitée entre conjoints dans la plus grande partie de la haute Alsace, & même dans la basse, tout ce que les conjoints apportent en mariage, qui leur échet par succession ou autrement, ou qu’ils acquierent pendant le mariage, compose une masse dont le mari ou ses héritiers prennent les deux tiers, & la femme ou les siens l’autre tiers, avec environ soixante livres pour gain nuptial. Cette confusion ou société de tous biens, est appellée la coûtume de ferrête. Cette coûtume n’est point écrite ; elle n’est fondée que sur un usage qui a force de loi, & qui a lieu de plein droit & sans aucune stipulation. Voyez mon traité des gains nuptiaux, chap. jx. pag. 91. & la consultation des avocats au conseil souverain d’Alsace qui y est insérée, pag. 261.
Coutume des Filletes, est un droit singulier usité dans le comté de Dunois, qui est que quand une fille ou une veuve se trouve enceinte, ou même une femme mariée, s’il est notoire que ce soit du fait d’un autre que de son mari, elle est tenue de le déclarer à la justice du lieu, afin qu’il en soit fait registre, sur peine d’un écu d’amende. Ce droit est affermé avec les autres fermes muables du comté de Dunois ; & si la personne qui est enceinte n’a pas fait sa déclaration à la justice, le receveur-fermier étant averti de l’accouchement, se transporte avec un balai au lieu auquel la fille, femme, ou veuve est accouchée, demande l’amende, & ne quitte point la porte du logis jusqu’à ce qu’il soit satisfait de l’amende à lui dûe. Voyez Bacquet, traité du droit de bâtardise, chap. ij. n°. 2.
Coutumes de franc-aleu, sont celles où le franc-aleu est naturel & de droit, c’est-à-dire où tout héritage est réputé franc, si le seigneur dans la justice duquel il est situé, ne prouve le contraire. Il y a d’autres coûtumes où le franc-aleu n’est point reçû sans titre, & enfin d’autres qui n’ont point de dispositions sur cette matiere. Les coûtumes où le franc-aleu a lieu sans titre, sont les seules qu’on appelle coûtumes de franc-aleu. Voyez Franc-aleu.
Coutume de France, se dit quelquefois pour exprimer le droit commun & général de France, le droit François, ou certains usages non écrits observés en France.
Coutume générale, est celle qui est faite pour servir de loi dans toute une province. Quelques coûtumes sont intitulées coûtumes générales, comme celles du haut & bas pays d’Auvergne ; & cela par opposition aux coûtumes locales ou particulieres de certaines châtellenies, villes, ou cantons, qui sont insérées à la suite des coûtumes générales. Voyez ci-après Coutumes locales.
On compte près de cent coûtumes générales dans le royaume, sans les coûtumes locales.
Coutume, (grande) est un droit qui se paye au seigneur sur les denrées vendues dans sa seigneurie, comme blé, vin, & autres choses : on appelle ce droit la grande coûtume ou droit de prevôté, parce qu’il est plus fort que celui qui se leve ailleurs sur ces menues marchandises, & qu’on appelle la petite coûtume. Il en est parlé dans l’article 20 de la coûtume d’Anjou.
Coutumes locales ou particulieres, sont celles qui ne font loi que dans l’étendue d’un bailliage, châtellenie, ou autre jurisdiction, ou dans une seule ville, bourg, ou canton, à la différence des coûtumes générales, qui font loi pour toute une province. Il y a un grand nombre de coûtumes locales dans le royaume ; on en compte plus de cent dans la seule province d’Auvergne, c’est aussi la province ou il y en a le plus.
Les coûtumes locales ne sont que des exceptions à la loi générale du pays ; ainsi ce qu’elles n’ont pas prévû, doit être décidé par la coûtume générale, ou par le droit Romain, si c’est dans un pays où l’on suive le droit écrit, comme il s’en trouve en effet plusieurs où il y a quelques coûtumes locales ou statuts particuliers ; tels que la coûtume de Toulouse, celle de Bordeaux, & autres semblables.
Coutume louable ou Louable coutume, laudabilis consuetudo : dans l’usage, on entend par-là certains droits & rétributions que les ecclésiastiques exigeoient des laïcs, & qui ne sont fondés sur d’autre titre qu’une longue possession.
Quand ces coûtumes n’ont rien d’exorbitant, elles dégénerent par succession de tems en une espece de contrat dont l’exécution est d’obligation ; mais lorsqu’elles introduisent des droits insolites, excessifs, ou deshonnêtes, elles sont rejettées.
Joannes Galli, quest. 273. fait mention d’un arrêt par lequel le sacristain de la ville d’Agde comme curé, fut maintenu selon l’ancienne & loüable coûtume à prendre le lit de ses paroissiens décédés, ou la valeur du lit, selon la qualité du paroissien.
Aufrerius, décis. 388. traite la question du curé qui est fondé en loüable coûtume, à prendre l’habit de son paroissien décédé, & décide que le curé peut prendre un habit neuf qui est encore chez le tailleur, pourvû qu’il fût destiné à servir d’habit ordinaire & journalier.
Il y a quelques curés qui sont fondés en loüable coûtume de prendre le drap mortuaire qui est mis sur le cercueil du décédé, & les arrêts les y ont maintenus, selon l’article 51 de l’ordonnance de Blois ; avec ce tempérament néanmoins, qu’il seroit permis à la veuve & héritiers de le retirer moyennant une somme raisonnable.
On proscrit sur-tout les droits de sépultures & enterremens insolites & excessifs, que des curés voudroient exiger sous prétexte de loüable coûtume.
Dans quelques diocèses on exigeoit aussi des droits extraordinaires des laïcs nouvellement mariés, pour leur donner congé de coucher avec leurs femmes la premiere, seconde, & troisieme nuits de leurs nôces : mais par arrêt du Parlement du 19 Mars 1409, rendu à la poursuite des habitans & échevins d’Abbeville, il fut fait défenses d’exiger de tels droits. Voyez ci-après Cullage. Voyez Chopin, de leg. Andium, lib. I. tit. j. cap. xxxj. n°. 8. & de polit. lib. II. tit. vij. n°. 4. Fevret, tr. de l’abus, lib. IV. ch. vij. n°. 3. & suiv.
Coutumes de nantissement, sont celles où les contrats passés devant notaires n’emportent point hypotheque contre des tierces personnes sur les biens situés dans ces coûtumes, si les contrats ne sont nantis & réalisés par les officiers des lieux d’où relevent les biens hypothéqués : cette formalité du nantissement est une espece de tradition feinte & simulée de l’héritage pour y acquérir hypotheque.
La coûtume d’Amiens, art. 137. celle de Vermandois, art. 119. celle d’Artois, art. 72. sont des coûtumes de nantissement. Voyez Nantissement.
Coutumes non ecrites, sont des usages qui n’ont point encore été rédigés par écrit. Toutes les coûtumes étoient autrefois de cette espece ; présentement elles sont la plûpart écrites : il reste néanmoins encore dans certaines provinces quelques usages non écrits.
Coutume omologuée, est lorsque le prince par ses lettres patentes a adopté & autorisé les usages que ses sujets ont rédigé par écrit.
Coutumes de parcours, sont celles entre lesquelles le parcours & entrecours a lieu, c’est-à-dire dont les habitans roturiers, mais libres, peuvent réciproquement établir leur domicile dans l’une ou dans l’autre de ces coûtumes, sans devenir serfs du seigneur. Cette liberté dépend des traités faits entre les seigneurs voisins. Voyez Entrecours & Parcours.
Coutume particuliere, est la même chose que coûtume locale. Voyez Coutume locale.
Coutume, (petite) est un droit qui se paye en certains endroits au seigneur, pour les grains, vins, bestiaux, volailles, & autres denrées qui se vendent en sa seigneurie. On l’appelle petite coûtume par opposition à la grande coûtume, qui est un droit plus fort que quelques seigneurs ont droit de percevoir.
Les coûtumes d’Anjou & du Maine font mention des droits de petite coûtume & de levage, qui y sont quelquefois confondus comme termes synonymes. Il y a cependant quelque différence entre ces deux droits, en ce que la petite coûtume se paye en général pour les petites denrées vendues dans le fief ; le droit de levage n’est proprement que pour les denrées qui ont séjourné, ou pour les biens des sujets qui vont demeurer hors le fief.
La coûtume du Maine, art. 10. dit que les seigneurs bas justiciers ont la petite coûtume des denrées vendues en leur fief, comme blé, vin, bêtes, & autres meubles ; lequel levage & petite coûtume est un denier par bœuf & par vache, pipe de blé vendus & tirés hors le fief ; & pour autre menu bêtail, comme moutons, brebis, porcs vendus, & qui auroient séjourné huit jours, sera payé une maille ; & pour les autres meubles quatre deniers par charrete, deux deniers pour charge de cheval, & un denier (le tout tournois) pour faix d’homme.
L’article suivant parle du levage dû par l’acheteur pour les denrées qui ont séjourné huit jours, & ont été ensuite vendues ou autrement transportées hors du fief. Ce même article ajoûte que si le seigneur prenoit prevôté ou grande coûtume, il ne pourra prendre ni demander la petite coûtume ; ce qui suppose que levage & petite coûtume sont synonymes dans le Maine.
L’art. 35. porte que celui qui tient à soi & hommage son hébergement, soit noble ou coûtumier, ne paye à son seigneur aucunes petites coûtumes ni levages.
La coûtume du Maine s’explique à-peu-près de même, mais elle marque mieux la différence qu’il y a entre petite coûtume & levage.
L’art. 8 dit que les seigneurs bas justiciers ont la petite coûtume des denrées vendues en leur fief, comme blé, vin, bêtes, & autres choses.
Art. 9. Pareillement ont levage des denrées qui y ont séjourné huit jours, vendues & autrement transportées en mains d’autrui hors le fief, lequel levage est dû par l’acheteur … aussi ont le levage des biens de leurs sujets qui vont demeurer hors leur fief.
L’art. 10 dit que le levage & petite coûtume est un denier pour bœuf, vache, pipe de vin, & charge de blé ; que pour autre menu bétail, comme porcs, moutons & brebis vendus, & qui auroit séjourné huit jours, sera payé une obole ; que le levage des biens de ceux qui vont demeurer hors le fief, ne pourra excéder cinq sous ; que comme en plusieurs lieux on n’a point accoûtumé d’user de ces droits de petites coûtumes & levages, il n’y est en rien dérogé ; & que si aucun seigneur prenoit droit de prevôté ou de grande coûtume, il n’auroit la petite.
L’art. 30. est semblable à l’art. 35. de la coûtume du Maine. Voyez ci-devant Coutume (grande) & Coutume de Blé, &c.
Coutume du pié rond, fourché, ou du pié, signifie l’imposition que l’on a coûtume de payer au Roi pour chaque animal qui entre dans la ville de Paris, ou qui est vendu au marché aux chevaux.
Dans les anciens baux des fermes du Roi, il est parlé de la ferme & coûtume du pié rond, qui étoit autrefois d’un karolus pour chaque cheval entrant dans la ville de Paris, ou vendu au marché aux chevaux. Voyez Bacquet, des droits de justice, chap. x. n. 5.
Coutumes de prélegs, sont celles qui déferent les droits d’aînesse per modum prælegati, à la différence des autres coûtumes qui les déferent à titre d’universalité, & per modum quotæ.
Dans les coûtumes où l’aîné prend seul tous les fiefs, & dans celles où le droit d’aînesse se prend per modum quotæ, le pere peut préjudicier aux droits de l’aîné, c’est-à-dire qu’il peut par testament réduire le droit d’aînesse jusqu’à concurrence de ce dont il est permis de disposer par testament ; & sauf la légitime l’aîné contribue aux dettes à proportion de tout ce qu’il prend en qualité d’aîné : telle est la coûtume d’Amiens, art. 71.
Mais dans les coûtumes de prélegs, c’est-à-dire où le droit d’aînesse est réduit par la loi & laissé per modum prælegati, comme dans la coûtume de Paris, art. 15. on estime que l’aîné tient ce droit de la loi même, & que le pere n’y peut donner aucune atteinte en disposant au profit des puînés : car si la disposition étoit en faveur d’un étranger, même à titre purement gratuit, elle seroit valable, sauf la légitime de l’aîné. Dans ces mêmes coûtumes de prélegs l’aîné ne contribue pas aux dettes plus que les autres pour son droit d’aînesse, & c’est la raison pour laquelle on y considere le droit d’aînesse comme un prélegs fait par la coûtume, & ce qui a fait appeller ces coûtumes de prélegs. Voyez Louet, lett. C, somm. 24. & les dissertations de M. Boullenois, sur les questions qui naissent de la contrariété des lois & des coûtumes, quest. 21.
Coutumes privées, voyez Coutumes domestiques.
Coutumes de saisine, sont celles dans lesquelles, pour assûrer l’acquisition que l’on fait du droit de propriété ou d’hypotheque sur un héritage, il faut prendre saisine, c’est-à-dire prendre possession de l’héritage en notifiant le contrat au seigneur dont l’héritage releve. Les coûtumes de Clermont en Beauvaisis, celles de Senlis & de Valois, sont des coûtumes de saisine. Cette formalité a quelque rapport avec le nantissement, qui dans certains pays est nécessaire pour que le contrat produise hypotheque. Mais dans les coûtumes de saisine, le contrat ne laisse pas de produire hypotheque, quoiqu’il ne soit pas ensaisiné ; la saisine sert seulement à donner la préférence aux rentes constituées qui sont ensaisinées sur celles qui ne le sont pas ; les rentes ensaisinées sont préférées aux autres sur le prix de l’héritage du débiteur lorsqu’il est decrété ; & entre ceux qui ont pris saisine, les premiers ensaisinés sont préférés.
Les coûtumes de la province de Picardie & celles d’Artois, sont aussi des coûtumes de saisine : mais la saisine est une des voies nécessaires pour y acquérir droit réel ou hypotheque sur l’héritage.
Suivant l’art. 8 de la coûtume de Paris, ne prend saisine qui ne veut.
Coutumes soucheres, sont celles où pour succéder à un propre il faut être descendu du premier acquéreur qui a mis le propre dans la famille ; au lieu que dans les coûtumes de simple côté, il suffit d’être le plus proche parent du côté d’où le propre est venu : & dans les coûtumes de côté & ligne, il suffit d’être le plus proche parent du défunt du côté & ligne du premier acquéreur.
La coûtume de Mantes est une de ces coûtumes soucheres. Voyez l’art. 167.
Dans ces coûtumes lorsqu’il ne se trouve personne descendu en ligne directe du premier acquéreur, le plus proche parent du défunt succede au propre comme si c’étoit à un acquêt. Voyez le traité des successions de Lebrun, liv. II. chap. j. sect. 2. & au mot Propres.
Coutumes de subrogation, sont celles qui pour assûrer quelque chose aux héritiers, subrogent les meubles & acquêts au lieu des propres, & ne permettent point à un testateur de disposer de la totalité de ses meubles & acquêts lorsqu’il n’a point de propres. Voyez Lebrun, des success. liv. II. chap. jv. n. 33. & suiv.
Coutumes de vest & de devest, sont la même chose que coûtume de saisine & dessaisine ; car vest signifie possession, & devest, dépossession. Voyez ci-devant Coutume de saisine.
Coutume du Vexin François, dont il est parlé dans les art. 3. 4. & 33. de la coûtume de Paris, n’est point une coûtume qui en soit distincte & séparée ; c’est un usage particulier qui ne consiste qu’en ce qui en est énoncé dans ces articles de la coûtume de Paris ; savoir que dans les fiefs qui se reglent suivant cette coûtume du Vexin françois, il n’est jamais dû de quint au seigneur pour les mutations de fief par vente ; mais aussi il est dû relief à toute mutation, au lieu que dans la coûtume de Paris il est dû le quint pour vente ou contrat équipollent à vente d’un fief, pour succession, donation & substitution en collatérale ; & en quelques autres cas il est dû relief : mais aussi en succession, donation, & substitution en directe, il n’est dû au seigneur par le nouveau vassal que la bouche & les mains. Cette coûtume du Vexin françois n’a point de territoire circonscrit & limité ; elles n’est suivie que pour les fiefs.
Coutume, (sage) est un surnom que l’on donne à la coûtume de Normandie, non pas pour signifier que les autres coûtumes soient moins sages que celle-ci dans leurs dispositions, mais pour exprimer que la coûtume de Normandie est une coûtume savante ; le terme sage étant synonyme en cet endroit, de même que les sept sages de la Grece furent ainsi nommés parce qu’ils étoient les plus savans du pays ; de même aussi que les sages-femmes ou matrones ont été ainsi appellées, comme plus expérimentées que les autres femmes au fait des accouchemens. Il est dit dans le journal du palais, tome I. p. 663. que la coûtume de Normandie est appellée la sage coûtume, parce qu’en effet il n’y a guere de cas importans qu’elle n’ait prévû. Je ne sai néanmoins si ce surnom de sage ne viendroit pas plûtôt de ce que cette coûtume a emprunté plusieurs de ses dispositions des lois romaines, telles que celles qui concernent la dot, les paraphernaux, l’obligation des femmes mariées pour le bénéfice d’inventaire, les prescriptions, &c. (A)
Coutumes volontaires, (Droit féod.) c’étoit un droit qui entroit dans les revenus de nos rois sous les deux premieres races. Ce droit étoit dû par ses vassaux dans quatre cas extraordinaires ; savoir, quand le roi faisoit son fils aîné chevalier, lorsqu’il marioit sa fille aînée, lorsqu’il survenoit une guerre, & lorsqu’il étoit fait prisonnier. Les seigneurs des fiefs exerçoient aussi ces quatre droits sur leurs terres. Abr. chron. du P. Hénaut. Art. de M. le Chevalier de Jaucourt.
Coutumes, (Comm.) ce sont les droits qui se payent sur les côtes de Guinée, & sur-tout dans les rivieres de Gambie & de Senégal, pour obtenir des rois Negres la permission de commercer sur leurs terres.
Ces coûtumes sont plus ou moins fortes selon les pays : il y en a qui vont jusqu’à deux mille liv. monnoie de France, mais qu’on ne paye qu’en marchandises propres au pays, comme du fer, de l’eau-de-vie, des toiles, des couteaux, &c.
Coûtumes se dit aussi de certains droits qui se payent à Bayonne pour la sortie ou entrée des marchandises.
Coûtumes signifie encore un droit que les voituriers & passagers payent à l’entrée de quelques villes, bailliages & vicomtés de France, pour l’entretien des ponts, chaussées, passages, grands chemins.
Coutume. Grande & petite coûtume, sont les droits qui composent la recette de comptablie de Bordeaux : ils montent ensemble à quatorze deniers maille pour livre de l’appréciation des marchandises, outre les deux sous pour livre de contrôle. Voyez Comptablie.
Se mettre en coûtume, se dit à Bordeaux des barques & autres bâtimens chargés de sel, qui font leur déclaration aux bureaux de la comptablie & du convoi, pour être visités, & leur sel mesuré. Voyez Convoi. Diction. de Trévoux, de Chamb. & de Dish. (G)