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DECOUPLÉ, adj. en terme de Blason, signifie la même chose que partagé ou divisé.

Ainsi un chevron découplé, est un chevron qui manque de pointe, & dont les deux extrémités sont à une certaine distance l’une de l’autre. (V)

DECOUPLER, terme de Riviere ; c’est délier les bateaux qui sont en trait lorsque l’on passe des ponts ou pertuis.

Découpler les chiens, (Venerie.) c’est les délier quand ils sont deux à deux.

DECOUPOIR, s. m. c’est le ciseau dont se servent les ouvrieres qui découpent la gaze ; il n’a rien de particulier, sinon que ses deux lames s’approchent & se séparent comme les deux branches d’une pince par un ressort fixé à la partie convexe d’une des branches.

DECOUPURE, s. f. voyez Tapisserie en papier.

DECOURBER, terme de Riviere ; c’est dételer des chevaux attelés aux cordages.

DECOURS, s. m. (Astronom.) On dit que la lune est en décours pendant le tems qu’elle passe de l’opposition à la conjonction, c’est-à-dire dans la derniere moitié de son mois, qui s’écoule entre la pleine lune & la nouvelle lune suivante. Il y a apparence que ce mot vient de ce que la lumiere de la lune diminue depuis la pleine lune jusqu’à la nouvelle ; aussi ce mot est-il opposé à croissant. Voyez Croissant. Au reste on n’en fait plus guere d’usage qu’en Astrologie, c’est-à-dire pour des observations sans fondement & des prédictions ridicules. Voyez Influence, Astrologie, &c. (O)

DECOUSU, adject. voyez Coudre. Cet adjectif marque la destruction de l’assemblage appellé couture.

DECOUSURES, s. m. (Venerie.) c’est ainsi qu’on appelle les blessures que le sanglier fait aux chiens avec ses défenses.

DECOUVERT, adj. voyez les articles Découverte & Découvrir.

Découvert, manége découvert. Voyez Manége.

DECOUVERTE, s. f. (Philosoph.) On peut donner ce nom en général à tout ce qui se trouve de nouveau dans les Arts & dans les Sciences ; cependant on ne l’applique guere, & on ne doit même l’appliquer, qu’à ce qui est non-seulement nouveau, mais en même tems curieux, utile, & difficile à trouver, & qui par conséquent a un certain degré d’importance. Les découvertes moins considérables s’appellent seulement inventions. Voyez Découvrir.

Au reste il n’est pas nécessaire pour une découverte que l’objet en soit tout à la fois utile, curieux, & difficile ; les découvertes qui réunissent ces trois qualités sont à la vérité du premier ordre ; il en est d’autres qui n’ont pas ces trois avantages à la fois ; mais il est nécessaire qu’elles en ayent au moins un. Par exemple, la découverte de la boussole est une chose très-utile, mais qui a pû être faite par hasard, & qui ne suppose par conséquent aucune difficulté vaincue. La découverte de la commotion électrique (voyez Coup foudroyant) est une découverte très-curieuse, mais qui a été faite aussi comme par hasard, qui par conséquent n’a pas demandé de grands efforts, & qui d’un autre côté n’a pas été jusqu’à présent fort utile. La découverte de la quadrature du cercle supposeroit une grande difficulté vaincue ; mais cette découverte ne seroit pas rigoureusement utile dans la pratique, parce que les approximations suffisent, & qu’on a des méthodes d’approximation aussi exactes qu’il est nécessaire. Voyez Quadrature.

Observons cependant que dans une découverte dont le principal mérite est la difficulté vaincue, il faut que l’utilité au moins possible s’y joigne, ou du

moins la singularité : la quadrature du cercle dont nous venons de parler seroit dans ce dernier cas ; ce seroit une découverte difficile & singuliere, parce qu’il y a long-tems qu’on la cherche.

Les découvertes, suivant ce que nous venons de dire, sont donc le fruit du hasard ou du génie : elles sont souvent le fruit du hasard dans les choses de pratique, comme dans les Arts & Métiers ; c’est sans doute pour cette raison que les inventeurs des choses les plus utiles dans les Arts nous sont inconnus, parce que le plus souvent ces choses se sont offertes à des gens qui ne les cherchoient pas, & qu’ainsi le mérite de les avoir trouvées n’ayant point frappé, l’invention est restée sans qu’on se souvînt de l’inventeur. A cette raison on pourroit encore en joindre une autre ; c’est que la plûpart des choses qui ont été trouvées dans les Arts, ne l’ont été que peu-à-peu ; qu’une découverte a été le résultat des efforts successifs de plusieurs artistes, dont chacun a ajoûté quelque chose à ce qui avoit été trouvé avant lui, de maniere qu’on ne sait proprement à qui l’attribuer. Ajoûtez enfin à ces deux raisons, que les Artistes pour l’ordinaire n’écrivent point, & que la plûpart des gens de lettres qui écrivent, uniquement occupés de leur objet, ne prennent pas un intérêt bien vif à constater les découvertes des autres.

Les découvertes faites par le génie ont lieu principalement dans les Sciences de raisonnement : je ne veux pas dire par-là que le génie ne découvre aussi dans les Arts, je veux dire seulement que le hasard, en matiere de Sciences, découvre pour l’ordinaire moins que le génie. Cependant les Sciences ont aussi des découvertes de pur hasard : par exemple, l’attraction du fer par l’aimant ne pouvoit pas se deviner, ni par elle-même, ni par aucune analogie ; il a fallu qu’on approchât par hasard une pierre d’aimant d’un morceau de fer, pour voir qu’elle l’attiroit. En général on peut dire en matiere de Physique, que nous devons au hasard la connoissance de beaucoup de faits. Il y a aussi dans les Sciences des découvertes, qui sont tout-à-la-fois le fruit du génie ou du hasard ; c’est lorsqu’en cherchant une chose, & employant pour cela différens moyens que le génie suggere, on trouve une autre chose qu’on ne cherchoit pas. Ainsi plusieurs chimistes en cherchant à faire certaines découvertes, & en imaginant pour cela différens procédés composés & subtils, ont trouvé des vérités singulieres auxquelles ils ne s’attendoient point. Il n’y a aucune science où cela n’arrive. Plusieurs géometres, par exemple, en cherchant la quadrature du cercle, qu’ils ne trouvoient pas, ont trouvé par hasard de beaux théorèmes, & d’un grand usage. De pareilles découvertes sont une espece de bonheur ; mais c’est un bonheur qui n’arrive qu’à ceux qui le méritent ; & si on a dit qu’une repartie fine & faite à propos étoit la bonne fortune d’un homme d’esprit, on peut appeller une découverte de l’espece dont il s’agit la bonne fortune d’un homme de génie : nous rappellerons à cette occasion ce que le roi Guillaume disoit du maréchal de Luxembourg si souvent son vainqueur : Il est trop heureux pour n’être que cela.

Les découvertes qui sont le fruit du génie (& c’est de celles-là sur-tout qu’il doit être question) se font de trois manieres ; ou en trouvant une ou plusieurs idées entierement nouvelles, ou en joignant une idée nouvelle à une idée connue, ou en réunissant deux idées connues. La découverte de l’Arithmétique semble avoir été de la premiere espece ; car l’idée de représenter tous les nombres par neuf chiffres, & sur-tout d’y ajoûter le zéro, ce qui en détermine la valeur, & donne le moyen de faire d’une maniere abregée les opérations du calcul ; cette idée, dis-je, paroît avoir été absolument neuve & originale, &