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l’espece de trafic qu’on y fait des cartes, en les changeant pour d’autres ou pour de l’argent. Le jeu dont on se sert est un jeu entier ; les cartes conservent leur valeur naturelle & ordinaire, excepté que l’as y vaut onze, & emporte le roi, la dame, &c.

On peut joüer au commerce jusqu’à dix, mais non au-dessous de trois. Après avoir vû à qui fera, celui qui donne les cartes en donne trois à chaque joüeur selon leur rang, en commençant par sa droite, les donnant toutes trois à la fois ou séparément, comme il lui plaît. Chacun met au jeu un des jettons qu’il a devant soi, & dont les joüeurs ont d’abord déterminé la valeur. On ne doit se proposer que le point, ou bien de se faire séquence ou tricon. Voyez Point, Sequence, Tricon ; & l’adresse du joüeur consiste à arranger son jeu de façon qu’il fasse l’un de ces trois jeux ; parce qu’il n’y a qu’un d’eux qui puisse gagner. Quand il n’y a point de séquence ni tricon, c’est le plus grand point ; s’il y a plusieurs séquences, c’est la plus haute ; ainsi que le plus haut tricon, lorsqu’il y en a plus d’un au jeu : ainsi l’on voit que le tricon gagne par préférence au point & à la séquence, & la séquence au point seulement. Les regles sont assez manifestées dans ce que nous avons dit de ce jeu, & de son banquier ; nous n’ajoûterons donc ici qu’une chose qui lui est commune néanmoins avec presque tous les autres jeux : c’est de refaire lorsque le jeu est faux ou qu’il y a quelque carte retournée.

L’on joüoit quelquefois ce jeu jusqu’à ce qu’un joüeur de la compagnie eût perdu son enjeu ; ce qui faisoit durer la partie fort long-tems, & d’autres fois la faisoit finir sur le champ, selon le malheur d’un joüeur, ou le bonheur de tous.

COMMERCER, négocier, trafiquer, exercer le commerce. Voyez Commerce.

Commercer pour argent, au jeu de commerce, c’est prendre une carte de la banque, en payant un jeton au banquier.

Commercer à la banque, c’est acheter la premiere carte du talon pour un jeton qu’on donne au banquier.

Commercer troc pour troc, c’est demander une carte à celui qui est à sa droite pour une autre qu’on lui donne, sans qu’il puisse rien exiger pour cet échange. Chacun peut commercer troc pour troc, selon sa place & son rang, jusqu’à ce que quelqu’un ait trouvé dans le jeu des autres ce qu’il cherchoit pour faire le sien.

COMMERCY, (Géograph. mod.) petite ville de France, au duché de Bar, avec titre de principauté, sur la Meuse. Long. 23. 15. lat. 48. 40.

COMMERE ACCOMMODEZ-MOI, (Jeu de) ce jeu ainsi appellé parce que toute l’habileté du joueur est de chercher à accommoder son jeu, a beaucoup de rapport à celui du commerce, & ne laisse pas d’être amusant, quoiqu’à en juger par son nom il ne soit guere joüé que par les petites gens.

On le sert d’un jeu de cartes tout entier. On peut y joüer sept ou huit personnes. Chacun prend autant de jetons que l’on veut, & dont on a déterminé la valeur. On met peu ou beaucoup au jeu, selon que l’on a intention de perdre ou de gagner de même. Celui à qui il est échû de faire, ayant mêlé & fait couper à l’ordinaire, donne trois cartes à chaque joüeur, toutes ensemble ou séparément. Les cartes ainsi distribuées on ne songe plus qu’à tirer au point, à la sequence, & au tricon, la sequence emportant le point, & le tricon la sequence & le point. Le plus fort gagne le plus foible, & s’ils sont égaux, c’est celui qui est le plus proche de celui qui a mêlé à droite. L’as vaut onze au jeu & est la premiere de toutes les cartes. Voyez Tricon, Sequence & Point.

Celui qui gagne la partie par le point ne tire que la poule ; celui qui gagne par une sequence, gagne un jeton de chaque joüeur avec la poule, & celui qui gagne avec tricon en gagne deux outre la poule.

Souvent les joüeurs ne trouvent point à s’accommoder dès la premiere donne, malgré tous les échanges qu’ils ayent pû faire, & pour lors celui qui a fait prend le talon & donne une carte à chaque joüeur, qui lui en rend une autre à la place, en commençant par la droite & mettant toûjours les cartes échangées sous le talon ; mais il faut que tous les joüeurs y consentent, sinon l’on refait.

Quand on a reçu cette carte du talon, on fait l’échange comme auparavant, en s’accommodant l’un l’autre jusqu’à ce qu’un des joüeurs ait fait son jeu. Si les joüeurs ne s’accommodoient point encore, on pourroit donner une seconde carte, ce qui pourtant n’arrive guere, non plus que de faire plus de deux donnes à ce jeu.

Celui qui donne mal n’est tenu que de refaire. Lorsque le jeu est reconnu faux, le coup est nul, mais les précedens sont bons ; & si même le coup où l’on s’apperçoit que le jeu est incomplet étoit fini, & que quelqu’un eût gagné, le coup seroit estimé valide.

COMMETAGE, (Corderie.) réunion de plusieurs fils ou cordons par le tortillement. Voyez Commettre & Corderie.

* COMMETTRE, (Gramm.) a plusieurs significations ; il est synonyme à faire ; il marque seulement plus de mauvaise intention : je dis mauvaise, parce qu’alors il ne se prend qu’en mauvaise part, au lieu que faire se prend en bonne & en mauvaise ; on dit faire une bonne action, faire une mauvaise action, mais on ne dit point commettre une bonne action : exemple, quelle action avez-vous commise !

Commettre son fief, (Jurisprud.) dans certaines coûtumes c’est le confisquer, ou pour mieux dire encourir la confiscation. Voyez l’ancienne coûtume d’Amiens, art. 27. Bar, art. 20. Troyes, 39. Chaumont, art. 24 ; celle d’Artois, art. 21. dit commettre & forfaire. (A)

Commettre, en termes de Commerce, c’est confier quelque chose à la conduite, à la prudence, à la fidélité d’une personne. Un marchand commet à sa femme, à son garçon le soin de sa boutique.

Commettre signifie aussi employer quelqu’un à quelque négoce, à quelque entreprise, manufacture, &c. ainsi l’on dit, j’ai commis telle personne pour le recouvrement des sommes qui me sont dûes. Dict. de Comm. & de Trév.

Commettre, est une des opérations principales de la Corderie ; c’est celle par laquelle on réunit ensemble, au moyen du tortillement, des fils pour faire des ficelles, des torons pour faire des aussieres, des cordons pour faire des grelins. Voyez l’article Corderie.

* COMMILITON, s. m. (Hist. anc.) soldat d’une même centurie. Les généraux s’en servoient volontiers ; il revient à notre camarade. Quand ils vouloient ôter à ce mot l’air de familiarité, & lui faire prendre un caractere de dignité, d’honneur, & de religion, ils y ajoûtoient l’epithete de sacratus, qui rappelloit au soldat son serment. Ceux qui auront jetté les yeux sur l’ouvrage original que M. le maréchal de Saxe a laissé sous le titre de mes réveries, sentiront toute l’importance de ces ressources si petites en apparence.

COMMINATOIRE, adj. (Jurisprud.) se dit de certaines peines ou clauses pénales apposées dans les actes & contrats, dans les testamens, dans les lettres de chancellerie, dans les jugemens, contre