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CHABLES ou ARBRES-CHABLES, CAABLES ou CHABLIS, adj. m. pris subst. (Eaux & Forêts.) sont des arbres de haute-futaie abattus ou brisés par les vents. Boucheul, sur la coûtume de Poitou, art. 159, n. 31, se sert du terme d’arbres-chables. On dit communément chablis. Voy. ci-après Chablis. (A)

* CHABLEAU, sub. m. terme de Riviere, longue corde qui sert à tirer, à monter, & à descendre les bateaux sur la riviere.

CHABLER, verbe act. & neut. terme de Riviere & de Marine ; c’est attacher un fardeau à un cable, le haler & l’enlever, comme on l’exécute dans les atteliers des charpentiers, & autres ouvriers, à l’aide des machines. Voyez Chable.

CHABLEUR, sub. mas. terme de Riviere ; c’est un officier préposé sur certaines rivieres pour faciliter aux gros bateaux le passage sous les ponts par les pertuis & autres endroits difficiles.

Ce nom vient de chable ou cable, qui signifie un gros cordage, parce que les chableurs ont de grands cables auxquels ils attachent les bateaux pour les tirer en montant ou en descendant.

Les fonctions des chableurs ont quelque rapport avec celles des maîtres des ponts, de leurs aides, & des maîtres des pertuis ; elles sont cependant différentes : les uns & les autres ont été établis en divers endroits sur la Seine, & autres rivieres affluentes, pour en faciliter la navigation & procurer l’abondance dans Paris. Anciennement ils étoient choisis par les prévôt des marchands & échevins de cette ville ; l’ordonnance de Charles VI. du mois de Février 1415, concernant la jurisdiction de la prévôté des marchands & échevinage de Paris, contient plusieurs dispositions sur les offices & fonctions des maîtres des ponts & pertuis & sur celles des chableurs ; le chap. 34 ordonne qu’il y aura à Paris deux maîtres des ponts & des aides ; il n’y est point parlé de chableurs pour cette ville, non plus que pour divers autres endroits où il y avoit des maîtres des ponts & pertuis. Les chapitres 53 & suivans, jusques & compris le 53, traitent de l’office de chableur des ponts de Corbeil, Melun, Montereau-faut-Yonne, des pertuis d’Auferne, Pont-sur-Yonne, Sens, & Villeneuve-le-Roi : il est dit que les chableurs seront pour monter & avaler les bateaux par-dessous les ponts, sans qu’aucun autre se puisse entre-mettre de leur office, à peine d’amende arbitraire ; que quand l’office de chableur sera vacant, les prévôt des marchands & échevins le donneront après information à un homme idoine, élû par les bons marchands, voituriers & mariniers du pays d’avall’eau. La forme de leur serment & installation y est réglée : il leur est enjoint de résider dans le lieu de leur office ; la maniere dont ils doivent faire le chablage y est expliquée ; & leur salaire pour chaque bateau qu’ils remontent ou descendent y est réglé pour certains endroits à huit deniers, & pour d’autres à trois.

L’ordonnance de Louis XIV. du mois de Décembre 1672, concernant la jurisdiction des prévôt des marchands & échevins de Paris, ch. 4, art. 1, enjoint aux maîtres des ponts & pertuis & aux chableurs de résider sur les lieux, de travailler en personne, d’avoir à cet effet flottes, cordes, & autres équipages nécessaires pour passer les bateaux sous les ponts & par les pertuis avec la diligence requise ; qu’en cas de retard, ils seront tenus des dommages & intérêts des marchands & voituriers, même responsables de la perte des bateaux & marchandises, en cas de naufrage faute de bon travail.

L’article 2 ordonne aux marchands & voituriers de se servir des maîtres des ponts & pertuis où il y en a d’établis ; il n’est pas parlé en cet endroit des chableurs.

L’article 3 défend aux maîtres des ponts & pertuis ou chableurs, de faire commerce sur la riviere, d’entreprendre voiture, tenir taverne, cabaret ou hôtellerie sur les lieux, à peine d’amende, même d’interdiction, en cas de récidive.

L’article 4 porte que les droits de tous ces officiers seront inscrits sur une plaque de fer-blanc qui sera posée au lieu le plus éminent des ports & garrets ordinaires.

Le 5 leur enjoint de dénoncer aux prevôt des marchands & échevins les entreprises qui seroient faites sur les rivieres par des constructions de moulins, pertuis, gors, & autres ouvrages qui pourroient empêcher la navigation.

Par édit du mois d’Avril 1704, il fut créé des maîtres chableurs des ponts & pertuis des rivieres de Seine, Oyse, Yonne, Marne, & autres affluentes ; ils furent confirmés en la propriété de leurs offices par édit du mois de Mars 1711. Au mois d’Août 1716, les offices créés par édit de 1704 furent supprimés, & la moitié de leurs droits éteints, à commencer du premier Janvier 1717. Un arrêt du conseil d’état du 19 Décembre 1719, supprima ces droits réservés ; on ne comprit pas dans cette suppression les offices établis avant l’édit de 1704, ni ceux de Paris, l’Isle-Adam, Beaumont-sur-Oyse, Creil, & Compiegne, rétablis par déclaration du 24 Juillet 1717.

Il y a actuellement à Paris des maîtres des ponts en titre d’office ; il y a aussi des chableurs ; la fonction de ces derniers est de faire partir les coches & gros bateaux du port où ils sont, & de les conduire jusqu’au-dehors des barrieres de Paris ; ils font la même chose pour les coches & bateaux qui arrivent à Paris. Voyez le Recueil des anciennes ordonnances de la ville ; l’Ordonnance du mois de Décembre 1672 ; Compilation chronologique de Blanchard en Août 1716 ; Dictionn. des Arrêts au mot Pont ; & celui du Commerce au mot Chableur ; & les mots Fleuve, Riviere, Pont, Pertuis, Maistres des Ponts. (A)

CHABLIS, (Géog. mod.) petite ville de France dans l’Auxerrois, sur les confins de la Champagne. Long. 21. 20. lat. 47. 47.

CHABLIS ou CHABLES, arbres chables, caables, ou arbres caablés, terme usité dans les forêts, dans les jurisdictions des eaux & forêts, & autres tribunaux en matiere de bois & de forêts, pour exprimer des arbres de haute futaie abattus, renversés, ou déracinés par les vents & orages, ou autres accidens ; soit que ces arbres aient été rompus par le pié ou ailleurs, au corps ou aux branches.

Dans les anciens titres latins ils sont appellés chablitia. En françois le terme de chablis est le plus usité.

Les anciennes ordonnances les nomment caables ou chables : il en est parlé dans celle de Charles V. du mois de Juillet 1376, article 22 ; celle de Charles VI. du mois de Septembre 1402, art. 21 ; & celle de François premier du mois de Mars 1515, article 38 qui défendent de vendre des arbres sur lesquels des arbres caables ou autres seroient encroüés.

L’ordonnance des eaux & forêts, tit. x. art. 7. les appelle arbres chablis ou encroüés. Ce terme encroüé signifie que l’arbre est tombé sur un autre, & s’est engagé dans ses branches ; ce qui arrive souvent aux chablis qui sont abattus sans précaution. Voyez Encroués. Voyez Bois.

Cette même ordonnance contient plusieurs dispositions au sujet des chablis qui se trouvent dans les bois & forêts du Roi.

Ces dispositions sont en substance, que les maîtres particuliers des eaux & forêts, en faisant leurs