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tion du sang, lorsqu’elle est déreglée, & détruit par ce moyen les causes des maladies occasionnées par ce dérangement. Willis nous en donne un exemple dans son traité de la Phrénésie, à l’occasion d’une fille qui fut guérie de cette maladie par un seul bain froid que l’on lui fit prendre : cette malade étoit dans cet état depuis plusieurs jours ; les saignées, les délayans, les amples boissons émulsionnées, &c. n’avoient pas pû diminuer la fievre violente dont elle étoit attaquée, & la soif qui la dévoroit. Le bain d’eau simple pris dans la riviere, pendant un quart-d’heure, calma tous les accidens, lui procura un sommeil tranquille, & elle fut guérie sans avoir besoin d’autres remedes. On trouve dans la pratique plusieurs exemples de ces guérisons miraculeuses arrivées par hasard ; car souvent des gens attaqués de phrénésie se sont jettés d’eux-mêmes dans des fontaines ou bassins, & ont été guéris.

Ce que l’on peut encore assûrer, c’est que l’usage des bains de riviere, pendant les chaleurs de l’été, est un sûr préservatif contre les maladies qui regnent ordinairement dans cette saison.

Il reste à présent à chercher la raison des effets du bain de mer, que l’on regarde comme le remede le plus salutaire contre la rage, & que je tâcherai de déduire des mêmes principes : ce qui ne sera pas impossible en faisant attention d’abord, que la fluidité & l’humidité que nous trouvons dans l’eau commune, se rencontre dans l’eau de mer ; que sa pesanteur est augmentée par le sel qu’elle contient, & qui lui donne une qualité beaucoup plus pénétrante ; enfin, que la terreur du malade, née de l’appareil & du danger où il se trouve lorsqu’on le plonge, fait un contraste capable de rétablir le déreglement de l’imagination, qui est aussi dérangée dans ce cas, que dans la phrénésie la plus violente : d’ailleurs, on prend la précaution d’aller à la mer pour y être plongé, lorsque l’on a le soupçon d’être attaqué de la rage, sans en avoir de certitude. Voyez Rage.

On conçoit aisément que les bains de vapeurs pénetrent la texture de la peau, & parviennent par les pores jusques à l’intérieur, où elles occasionnent à peu près les mêmes effets que si l’on avoit appliqué les médicamens dont on les tire ; c’est ce que l’on éprouve de la part de l’esprit-de-vin, de celui de vapeurs de cinabre, qui excitent même quelquefois la salivation, effet que produisent les frictions mercurielles ; enfin celui de marc de raisin en pénétrant, soit par sa chaleur, soit par les parties spiritueuses qu’il contient, donne de nouveau aux fibres le ressort qu’elles avoient perdu, & les rétablit dans leur état naturel.

On doit prendre les précautions suivantes pour tirer quelque fruit de l’usage du bain, de quelque espece que ce soit : il faut se faire saigner & purger, le prendre le matin à jeun, ou si c’est le soir, quatre heures après le repas, afin que la digestion des alimens soit entierement finie ; se reposer, ou ne faire qu’un exercice très-moderé après que l’on est sorti du bain ; enfin ne se livrer à aucun excès pendant tout le tems que l’on le prendra, & dans quelque saison que ce soit, ne point se baigner lorsque l’on est fatigué par quelque exercice violent. V. Eau, Eaux thermales, Eaux acidules ou froides. (N)

Bain, en Chimie, se dit d’une chaleur moderée par un intermede mis entre le feu & la matiere sur laquelle on opere, & ce bain est différemment nommé, selon les différens intermedes qu’on y employe.

C’est pourquoi on dit bain de mer, ou par corruption bain-marie, lorsque le vase qui contient la matiere sur laquelle on opere, est posé dans un autre vaisseau plein d’eau, de sorte que le vase soit entouré d’eau, & que le vaisseau qui contient l’eau, soit immédiatement posé sur le feu. Voyez nos figures de Chimie.

On pourroit aussi employer d’autres fluides que

l’eau, comme l’huile, le mercure même, pour transmettre différentes chaleurs, ce qui feroit différentes especes de bain-marie.

On dit bain de vapeur, lorsque le vase qui contient la matiere est seulement exposé à la vapeur de l’eau qui est sur le feu. Voyez nos figures. Le bain de vapeur dans un vaisseau ouvert, ou qui laisse échapper la vapeur qui s’exhale de l’eau, est moins fort, c’est-à-dire, donne une chaleur plus douce que ne la donne le bain-marie de l’eau boüillante : mais si le vaisseau est fermé exactement, & qu’on pousse le feu dessous, il devient plus fort que le bain-marie, il tient alors de la force de la machine de Papin, ce qui fait voir qu’on peut faire un bain de vapeur très-fort, au lieu que le bain-marie ne peut avoir que les différens degrés de chaleur de l’eau tiede, de l’eau chaude, de l’eau frémissante & de l’eau bouillante. Il est vrai que la chaleur de l’eau bouillante n’est point une chaleur invariable ; elle est différente selon que l’eau est différente, & suivant la différente pesanteur de l’air. L’eau bouillante qui tient en dissolution des sels, est plus chaude qu’une eau bouillante qui seroit simple & pure. Voyez Digestoire.

La chaleur de l’eau bouillante est plus grande quand le barometre est plus élevé, c’est-à-dire, quand l’air est plus pesant ; & elle est moindre quand le barometre est plus bas, c’est-à-dire, quand l’air est plus léger. L’eau bouillante, sur le sommet d’une haute montagne, a moins de chaleur que l’eau bouillante dans un fond, parce que plus l’air est pesant, & plus il presse sur la surface de l’eau, & par conséquent plus il s’oppose à l’échappement des parties de feu qui sont en mouvement dans l’eau, & qui la traversent. C’est pourquoi la plus grande chaleur que puisse avoir l’eau, n’est pas dans le tems qu’elle bout le plus fort, c’est dans le premier instant qu’elle commence à bouillir. Ces connoissances ne sont pas inutiles : il faut y faire attention pour certaines expériences.

On dit bain de sable ou de cendre, lorsqu’au lieu d’eau, on met du sable ou de la cendre. Voyez nos figures de Chimie.

Bains vaporeux, sont termes de Medecine, qui ne signifient autre chose que ce qu’on entend en Chimie par bain de vapeur. Le bain vaporeux est une espece d’étuve qui se fait en exposant le malade à la vapeur chaude d’une eau medicinale, ou de décoctions d’herbes appropriées à la maladie qu’on veut guérir. (M)

Bain, en Chimie & à la Monnoie ; on dit qu’un métal est en bain, lorsque le feu l’a mis en état de fluidité : c’est alors qu’on le remue, ou qu’on le brasse avec des cuillieres de fer, si c’est argent ou cuivre ; pour l’or, il ne se brasse point avec le fer, mais avec une espece de quille faite de terre à creuset, & cuite. Voyez Brasser, Brassoir, Quille

Bain, est un terme générique ; il se prend chez un grand nombre d’Artistes, & pour les liqueurs, & pour les vaisseaux dans lesquels ils donnent quelques préparations à leurs ouvrages.

Bain ou Bouin, terme d’Architecture ; on dit maçonner à bain ou à bouin de mortier, lorsqu’on pose les pierres, qu’on jette les moellons, & qu’on assied les pavés en plein mortier. (P)

Bain, mettre à bain, en Maçonnerie, c’est employer à la liaison des parties d’un ouvrage, la plus grande quantité de plâtre qu’il est possible ; on se sert du mot bain, parce qu’alors les pierres ou moellons sont entierement couverts & enduits de tout côté.

Bain, c’est ainsi que les Plumassiers appellent une poelle de cuivre battu dans laquelle ils plongent ou jettent les plumes qu’ils veulent mettre en couleur. Ils donnent aussi ce nom à la matiere colorante contenue dans la poelle.

Bain, se dit chez les Teinturiers, ou de la cuve