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un exemple rapporté par M. Roung, d’un enfant de six ans qui rendoit presque toute son urine par le nombril.

Dans les mêmes Transactions, M. Richardson rapporte l’histoire d’un garçon de North Bierly, dans le comté d’Yorck, qui vécut dix-sept ans sans jamais uriner, & qui néanmoins étoit en parfaite santé. Il avoit une diarrhée continuelle, mais qui ne l’incommodoit pas beaucoup : il falloit, suivant la remarque de cet auteur, que les reins fussent bouchés ; car il n’avoit jamais envie de lâcher de l’eau.

Les urines sont de différentes sortes, & ont différentes propriétés. Après qu’on a bu abondamment quelque liqueur aqueuse, l’urine est crue, insipide, sans odeur, & facile à retenir. Celle que fournit le chyle bien préparé, est plus âcre, plus saline, moins abondante, un peu fétide, & plus irritante. Celle qui vient du chyle déjà converti en sérosité, est plus rouge, plus piquante, plus salée, plus fétide, & plus irritante. Celle que fournissent après une longue abstinence des humeurs bien digerées, & ses parties solides exténuées, est la moins abondante, la plus salée, la plus âcre, la plus rouge, très-fétide, presque pourrie, & la plus difficile à retenir. Ainsi l’urine contient la partie aqueuse du sang, son sel le plus âcre, le plus fin, le plus volatil, & le plus approchant de la nature alkaline ; son huile la plus âcre, la plus fine, la plus volatile, & la plus approchante de la putréfaction, & sa terre la plus fine & la plus volatile. Voyez Sang.

Le sel ammoniac des anciens se préparoit avec l’urine des chameaux. Voyez Ammoniac. Le phosphore qui est en usage parmi les Anglois, se prépare avec l’urine humaine. Voyez Phosphore. Le salpêtre se prépare aussi avec l’urine, & les autres excrémens des animaux. Voyez Salpêtre.

Les Indiens ne se servent guere d’autre remede que de l’urine de vache. Les Espagnols font grand usage de l’urine pour se nettoyer les dents. Les anciens Celtibériens faisoient la même chose.

L’urine s’employe aussi dans la teinture, pour échauffer le pastel, & le faire fermenter. L’urine teint l’argent d’une belle couleur d’or. Voyez Teinture. Les maladies que cause l’urine, sont de différentes sortes. Voyez Strangurie, Rétention, Diabete, Pierre, Nubecule, &c.

Urine, en Médecine, l’urine fournit un des principaux signes par où les médecins jugent de l’état du malade & du train que prendra la maladie. Voyez Signe, Symptome, Maladie, &c.

Dans l examen de l’urine on considere sa quantité, sa couleur, son odeur, son goût, sa fluidité & les matieres qui y nagent.

Une urine abondante marque un relâchement des conduits des reins, une diminution de la transpiration, de la sueur, de la salive, un sang imparfaitement mélangé, d’où il arrive que les parties aqueuses se séparent aisément du reste, une foiblesse de nerfs, une boisson copieuse de quelque liquide aqueux, ou qu’on a pris quelque diurétique.

Cette sorte d’urine présage un épaississement & une acrimonie des autres liqueurs du corps, une soif, une anxiété, des obstructions & leurs effets, une consomption accompagnée de chaleur, de sécheresse & de soif.

L’état contraire de l’urine indique des choses contraires, & présage la pléthore, l’assoupissement, la pesanteur, des tremblemens convulsifs, &c.

Une urine claire, limpide, insipide, sans couleur ni goût, dénote une grande contraction des vaisseaux des reins, & en même tems un grand mouvement des humeurs, une forte cohésion de l’huile, du sel & de la terre dans le sang, & un mêlange imparfait de la partie aqueuse avec les autres, une indisposition d’es-

prit, un accès hypocondriaque ou hystérique, une

foiblesse des visceres, une crudité, une pituite, des embarras dans les vaisseaux, & dans les maladies aiguës, un défaut de coction & de crise. Cette sorte d’urine pronostique à-peu-près la même chose qu’une urine trop abondante, & dans les maladies aiguës & inflammatoires, elle annonce un mauvais état des visceres, le délire, la phrénésie, les convulsions, la mort.

L’urine fort rouge, sans sédiment, dans les maladies aiguës, indique un mouvement & un froissement violent des parties qui constituent les humeurs, & une action violente des vaisseaux & des liquides les uns sur les autres, un mélange exact & intime de l’huile, du sel, de la terre, & de l’eau dans les humeurs, & par-là une grande crudité de la maladie, une longue durée & un grand danger. Une telle urine présage des embarras gangréneux dans les plus petits vaisseaux, sur tout dans ceux du cerveau & du cervelet, & par conséquent la mort. Elle annonce une coction difficile, une crise lente & douteuse, & tout cela à un plus haut degré, suivant que l’urine est plus rouge & plus exempte de sédiment. S’il y a un sédiment pesant & copieux, il dénote un violent froissement qu’ont souffert auparavant les parties des humeurs, un relâchement des vaisseaux, un sang âcre, salin, dissous, incapable de nourrir, des fievres intermittentes & le scorbut.

Cela présage la durée de la maladie, une atténuation des vaisseaux, la foiblesse, des sueurs colliquatives, un flux abondant de salive, l’atrophie, l’hydropisie. Si le sédiment d’une telle urine est sulfureux, écailleux, membraneux, &c. il présage les mêmes choses, & encore pires.

Une urine jaune avec un sédiment, comme le précédent, dénote la jaunisse, & les symptomes de cette maladie à la peau, dans les selles, les hypocondres, &c.

Une urine verte, avec un sédiment épais, dénote un tempérament atrabilaire, & que la bile s’est répandue dans le sang, & s’évacue par les reins ; elle annonce par conséquent des anxiétés de poitrine, des selles dérangées, des tranchées & des coliques.

Une urine noire indique les mêmes que la verte, mais à un plus haut degré de malignité.

Le sang, le pus, les caroncules, les filamens, les poils, les grumeaux, le sable, les graviers, la mucosité, au fond de l’urine, dénotent quelque mauvaise disposition dans les reins, les ureteres, la vessie, les testicules, les vésicules séminales, les prostales & l’uretre.

Une urine grasse donne ordinairement lieu à de petits sables, qui sont adhérens à une matiere visqueuse, & de cette maniere produit une espece de membrane ou pellicule huileuse, qui dénote dans le sang une abondance de terre & un sel pesant, & annonce le scorbut, la pierre, &c.

Une urine puante montre que les huiles & les sels sont atténués, dissous, & presque putrifiés : ce qui est très-dangereux, soit dans les maladies aiguës, soit dans les chroniques.

L’urine, qui étant agitée demeure long-tems écumeuse, dénote la viscosité des humeurs, & conséquemment la difficulté de la crise. Elle dénote aussi des maladies du poumon, & des fluxions à la tête.

Mais on consulte principalement l’urine dans les fievres aiguës, où elle est un signe très-certain ; car 1°. l’urine qui a un sédiment blanc, léger, égal, sans odeur, & figuré en cône, depuis le commencement de la maladie jusqu’à la crise, est d’un très-bon augure. 2°. L’urine abondante, blanche, qui a beaucoup de sédiment blanc, & que l’on rend dans le tems de la crise, dissipe & guérit les abscès. 3°. L’urine ténue, fort rouge & sans sédiment, l’urine blanche, ténue