Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 17.djvu/280

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ville marchande, villa mercatoria, pundinaria, n’est pas simplement celle où le commerce est florissant, mais celle qui jouit du droit de foire & de marché. Voyez Fleta.

Ville de commerce, ville marchande, c’est une ville où il se fait un grand trafic & négoce de marchandises & denrées, soit par mer, soit par terre, soit par des marchands qui y sont établis, soit par ceux qui y viennent de dehors. On donne aussi le même nom aux villes où il se fait des remises d’argent & des affaires considérables par la banque & le change. Paris, Lyon, Rouen, Bordeaux, Orléans, S. Malo, Nantes, la Rochelle, Marseille sont des villes les plus marchandes de France. Londres d’Angleterre, Amsterdam & Rotterdam de Hollande, Cadix d’Espagne, Lisbonne de Portugal, Dantzik de la Pologne, Archangel de la Russie, Smyrne & le Caire du levant, &c.

Ville d’entrepôt, c’est une ville dans laquelle arrivent des marchandises pour y être déchargées, mais non pour y être vendues, & d’où elles passent sans être deballées aux lieux de leur destination, en les chargeant sur d’autres voitures par eau ou par terre. Voyez Entrepôt.

Ville franche, se dit en général d’une ville libre & déchargée de toutes sortes d’impôts ; mais par rapport au commerce, il s’entend d’une ville aux portes, ou sur les ports de laquelle toutes les marchandises, ou seulement quelques-uns ne payent aucun droit d’entrée ou de sortie, ou n’y sont sujettes seulement qu’en entrant ou seulement qu’en sortant. Voyez Port franc.

Ville, signifie quelquefois non tous les habitans, mais seulement les magistrats municipaux qui composent ce qu’on appelle le corps de ville, & qui veillent à la police, à la tranquillité & au commerce des bourgeois, comme les bourguemestres en Hollande, en Flandres & dans presque toute l’Allemagne, les maires & aldermans en Angleterre, les jurats & capitouls en quelques villes de France, les prevôts des marchands & échevins à Paris & à Lyon. Voyez tous les noms de ces dignités, & autres semblables sous leurs titres particuliers. Dict. de comm.

Villes libres ou Villes impériales, (Hist. mod.) en Allemagne, ce sont des villes qui ne sont soumises à aucun prince particulier, mais qui se gouvernent, comme les républiques, par leurs propres magistrats. Voyez Empire.

Il y avoit trois villes libres, liberæ civitates, même sous l’ancien empire romain : telles étoient les villes auxquelles l’empereur, de l’avis ou du consentement du sénat, donnoit le privilege de nommer leurs propres magistrats, & de se gouverner par leurs propres lois. Voyez Cités.

Ville sacrée, (Littérat.) les princes ou les peuples consacroient à une divinité un pays, une ville, ou quelqu’autre lieu. Cette consécration, ἀφιέρωσις, se faisoit par un decret solemnel : une ville ainsi sacrée étoit regardée comme sacrée, ἱερὰ, & on ne pouvoit sans crime en violer la consécration.

Souvent une partie du territoire d’une ville étoit destinée à l’entretien du temple de la divinité & de ses ministres, & ce territoire étoit sacré, χώρα ἰερά.

Les princes ou les peuples, pour augmenter l’honneur & le culte de la divinité, déclaroient que la ville étoit non-seulement sacrée, ἰερά, mais encore qu’elle étoit inviolable, ἄσυλος. Ils obtenoient des nations étrangeres que ce droit ou privilege, ἀσυλία, seroit exactement observé. Le roi Seleucus Callinicus écrivit aux rois, aux princes, aux villes & aux nations, & leur demanda de reconnoître le temple de Vénus Stratonicide à Smyrne comme inviolable, & la ville de Smyrne comme sacrée & inviolable.

Les monumens de la villede Téos en Ionie, pu-

bliés par Chishall, dans ses antiquités asiatiques, nous

donnent des détails intéressans sur la maniere dont ce privilege, ἀσυλία, étoit reconnu par les étrangers. La ville de Téos rendoit un culte particulier à Bacchus, & la fait représenter sur un grand nombre de ses médailles. Les Téïens, vers l’an 559 de Rome, 195 avant Jesus-Christ, déclarerent par un decret solemnel que leur ville, avec son territoire, étoit sacrée & inviolable. Ils firent confirmer leur decret par les Romains, par les Etoliens & par plusieurs villes de l’île de Crete. On rapporte, d’après les inscriptions, les decrets de confirmation donnés par ces différens peuples.

Semblablement Démétrius Soter, roi de Syrie, dans sa lettre au grand-prêtre Jonathas & à la nation des juifs déclara la ville de Jérusalem, avec son territoire, sacrée, inviolable & exemte de tributs. Vaillant a donné la liste des villes sacrées de l’antiquité, on peut le consulter. (D. J.)

Ville métropolitaine, chez les Romains, c’étoit la capitale d’une province ; parmi nous, c’est une ville où est le siege d’une métropole ou église archiépiscopale. Voyez Métropole & Archevêché.

Villes municipales, municipia, étoient chez les Romains des villes originairement libres, qui, par leurs capitulations, s’étoient rendues & adjointes volontairement à la république romaine, quant à la souveraineté seulement, gardant néanmoins leur liberté en ce que le fonds de ces villes n’appartenoit point à la république, & qu’elles avoient leurs magistrats & leurs lois propres. Voyez Aulugelle & Loyseau, des seign.

Parmi nous, on entend par ville municipale celle qui a ses magistrats & ses lois propres.

Ville murée, on entend par ce terme une ville qui est fermée de murailles, ou du-moins qui l’a été autrefois : ces villes sont à certains égards distinguées des autres ; par exemple, pour posséder une cure dans une ville murée, il faut être gradué. Voyez Cure. Dans les villes & bourgs fermés, on ne peut employer aux testamens que des témoins qui sachent signer. Ordonnance des testamens.

Ville de paix, c’étoit celle où il n’étoit pas permis aux sujets d’user du droit de guerre, ni de se venger de leur adversaire. Paris jouissoit de ce privilege, & étoit une des villes de paix, comme il paroît par une commission du 26 Mai 1344. Voyez le glossaire de M. de Lauriere.

Ville de réfuge, est celle où le criminel trouve un asyle. Dieu avoit établi six villes de réfuge parmi les Israélites. Thèbes, Athènes & Rome jouissoient aussi du droit d’asyle. Il y a encore des villes en Allemagne qui ont conservé ce droit. Voyez Asyle.

Ville royale, est celle dont la seigneurie & justice appartiennent au roi, & dans laquelle il y a justice royale ordinaire.

Ville seigneuriale, est celle dont la seigneurie & justice ordinaire appartiennent à un seigneur particulier, quand même il y auroit quelque jurisdiction royale d’attribution, comme une élection, un grenier à sel.

Ville-Comtal, (Géogr. mod.) misérable bicoque, que quelques géographes nomment petite ville de France, dans le Rouergue, à quatre lieues de Rodes. (D. J.)

Ville-Dieu, (Géog. mod.) nom commun à plusieurs bourgs de France ; mais le principal est un gros bourg de ce nom en Normandie, au diocèse de Coutances, dont il est à sept lieues. Il est remarquable par une commanderie de Malthe fondée par Richard III. roi d’Angleterre, & par son commerce en poëleries, commerce ancien. Cénalis, évêque d’Avranches au xvj. siecle, écrit dans un de ses ouvrages ; habet constantia civitas, sub suâ hierarchicâ ditione.