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Cette premiere partie des jours consacrés à la religion, qui commençoient ainsi dès le soir de la veille, étoit employée par les premiers chrétiens à chanter des hymnes, & à pratiquer d’autres actes de dévotion ; & comme ces exercices de piété ne finissoient souvent que fort avant dans la nuit, on les appelloit veilles ou vigiles. Voyez Veilles.

Ces vigiles s’alongerent successivement au point que tout le jour qui précédoit la fête, fut appellé à la fin vigile.

Forbes attribue l’origine des vigiles à une coutume de l’ancienne église, suivant laquelle les fideles de l’un & l’autre sexe s’assembloient la veille de Pâques pour prier & veiller ensemble, en attendant l’office qu’on faisoit de grand matin, en mémoire de la résurrection de J. C. Cette pratique est encore en usage en France dans plusieurs diocèses.

Tertullien dans le livre qu’il adresse à sa femme, observe que dans la suite les chrétiens firent la même chose à d’autres fêtes ; mais comme il s’y étoit glissé des abus, ces veilles furent défendues par un concile tenu en 1322, & à leur place on institua des jeûnes qui jusqu’à présent ont retenu le nom de vigiles. Ce sont les jours qui précedent immédiatement les fêtes les plus solemnelles, celles des apôtres & de quelques martyrs ; ce qui varie suivant les divers usages des diocèses.

Vigiles est aussi en terme de Breviaire, le nom qu’on donne aux matines & aux laudes de l’office des morts, qu’on chante soit devant l’inhumation d’un mort, soit pour un obit ou service. Les vigiles sont à trois, ou neuf leçons, selon qu’elles sont composées d’un ou de trois nocturnes. Voyez Nocturne.

VIGINTIVIRAT, le, (Hist. rom.) on comprenoit sous ce nom les emplois de vingt officiers chargés respectivement de la monnoie, du soin des prisons, de l’exécution des criminels, de la police des rues, & du jugement de quelques affaires civiles. Personne ne pouvoit être exempt de ces emplois, sans une dispense du sénat. Quand Auguste monta sur le trône, il voulut aussi qu’avant que d’obtenir la questure qui étoit le premier pas dans la carriere des honneurs, on eût rempli les fonctions du vigintivirat ; mais on fut bien plus curieux de se trouver dans l’antichambre de l’empereur, que d’exercer la questure ; & le vigintivirat devint l’office de gens de la lie du peuple. (D. J.)

VIGINTIVIRS, college des, (Hist. rom.) ce college étoit composé des magistrats inférieurs ordinaires, nommés les triumvirs monétaires, les triumvirs capitaux, les quatuorvirs nocturnes & les décemvirs. Tous ces officiers avoient chacun leurs fonctions particulieres. Voyez leurs articles pour en être instruit. (D. J.)

VIGNAGE, s. m. (Gram. & Jurisprud.) ancien terme qui signifioit un droit que le seigneur percevoit sur les marchandises & bestiaux qui passoient dans sa seigneurie. Il en est parlé dans la somme rurale au chapitre du fisc & des amendes. Voyez le gloss. de M. de Lauriere. (A)

VIGNE, s. f. vitis, (Hist. nat. Botan.) genre de plante à fleur en rose, composée de plusieurs pétales disposés en rond ; le pistil sort du milieu de cette fleur ; il est entouré d’étamines, qui font tomber ordinairement les pétales, & il devient dans la suite une baie molle, charnue & pleine de suc ; elle renferme le plus souvent quatre semences, dont la forme approche de celle d’une poire. Tournefort, inst. rei herb. Voyez Plante.

Tournefort distingue vingt une especes de ce gente de plante, entre lesquelles nous décrirons la vigne commune cultivée, parce que sa description se rapporte à toutes les autres especes.

Cette plante, nommée vitis vinifera par C. B. P.

299. J. B. 2. 67. Raii, hist. 1613. a la racine longue, peu profonde, ligneuse, vivace. Elle pousse un arbrisseau qui s’éleve quelquefois à la hauteur d’un arbre, & dont la tige est mal faite, tortue, d’une écorce brune, rougeâtre, crevassée, portant plusieurs sarmens longs, munis de mains ou vrilles qui s’attachent aux arbres voisins, aux charniers ou aux échalas. Ses feuilles sont grandes, belles, larges, presque rondes, incisées, vertes, luisantes, un peu rudes au toucher, d’un goût astringent. Ses fleurs naissent dans les aisselles des feuilles, petites, composées chacune de cinq pétales, disposées en rond, réunies par leur pointe, de couleur jaunâtre, odorantes, avec autant d’étamines droites à sommets simples.

Lorsque les fleurs sont tombées, il leur succede des baies rondes ou ovales, ramassées & pressées les unes contre les autres, en grosses grappes, vertes & aigres dans le commencement, mais qui en mûrissant prennent une couleur blanche, rouge ou noire, & deviennent charnues, pleines d’un suc doux & agréable ; chaque baie renferme ordinairement dans une seule loge cinq semences ou pepins osseux en cœur, plus pointus par un bout que par l’autre.

Cette plante se cultive dans les pays chauds & tempérés ; elle s’éleve en peu de tems à une grande hauteur, si l’on n’a soin de l’arrêter en la taillant, elle croît même jusqu’à surmonter les plus grands ormes, elle fleurit en été, & ses fruits ou raisins mûrissent en automne. Il n’y a guere de plante qui soit plus durable ; l’étendue qu’elle occupe est étonnante, car on a vu des maisons couvertes des branches d’une seule souche.

Nous préférons la vigne, disoit autrefois Columelle à tous les autres arbres & arbrisseaux du monde, non-seulement pour la douceur de son fruit, mais aussi pour la facilité avec laquelle elle s’éleve ; elle répond à la culture & aux soins des hommes presque en tout pays, à-moins qu’il ne soit ou trop froid ou trop brûlant, en plaines, en coteaux, en terre forte ou légere & meuble, grasse ou maigre, humide ou seche. Selon Pline, les terreins ne different pas plus entr’eux que les especes de vignes ou de raisins ; mais il seroit impossible de reconnoître aujourd’hui dans les noms modernes ceux de l’antiquité qui y répondent, parce que les anciens n’ont point caractérisé les diverses especes de vignes dont ils parloient, ni les fruits qu’elles portoient. (D. J.)

Vigne, (Agriculture.) la terre qui convient mieux aux vignes pour avoir de bon vin, est une terre pierreuse ou à petit cailloutage, située sur un coteau exposé au midi ou au levant. Il est vrai que la vigne n’y dure pas si long-tems que dans une terre un peu forte, & qui a plus de corps. Les terres grasses & humides ne sont point propres pour la vigne, le vin qui y croît n’est pas excellent, quelles que soient les années chaudes & hâtives qui puissent survenir.

Pour les terres situées sur des coteaux exposés au couchant, il n’en faut guere faire de crus pour y élever des vignes ; quoique ces vignes soient bien cultivées & fumées, leur fruit mûrit d’ordinaire imparfaitement. Quant aux coteaux exposés au nord, il n’y faut jamais planter de la vigne, parce qu’on n’y recueilleroit que du verjus.

La vigne se multiplie de crossettes & de marcottes. Pour avoir de bonnes crossettes, il faut en taillant la vigne les prendre sur les jets de la derniere année, & que ces crossettes aient à l’extrémité d’en-bas du bois de deux ans. On ne prend pas les crossettes sur la souche de la vigne, parce qu’elles ont en cet endroit des yeux plats & éloignés les uns des autres. On connoît la bonté des crossettes & du plant enraciné quand le dedans du bois est d’un verd-clair ; s’ils