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ment les taches de leur visage dans ce miroir, de même les taches de leur cœur les plus secretes paroissent à découvert aux yeux des dieux immortels.

Il y a un grand nombre de ces temples, qui n’ont aucune idole ou image du Cami auquel ils sont consacrés ; & en général l’on peut dire qu’ils n’ont point d’images dans leurs temples, à moins que quelque incident particulier ne les engage à y en mettre ; tels par exemple, que la grande réputation & la sainteté du sculpteur, ou quelque miracle éclatant qu’aura fait le Cami. Dans ce dernier cas, on place dans le lieu le plus éminent du temple, vis-à-vis de l’entrée, ou du frontispice grillé, une châsse appellée fonga, c’est à-dire, le véritable temple, & devant cette châsse les adorateurs du Cami se prosternent ; l’idole y est enfermée, & on ne l’en tire qu’à la grande fête du Cami, qui ne se célebre qu’une fois tous les cent ans. On enferme aussi dans cette châsse des reliques du même dieu, comme ses os, ses habits, ses épées, & les ouvrages qu’il a travaillés de ses propres mains.

Le principal temple de chaque lieu a plusieurs chapelles qui en dépendent, qui sont ornées par-dehors de corniches dorées. Elles sont soutenues par deux bâtons pour être portées avec beaucoup de pompe à la grande fête du dieu auquel le temple est consacré.

Les ornemens du temple sont ordinairement des dons qui ont été faits en conséquence de quelque vœu, ou par d’autres raisons pieuses.

Les temples du Sintos sont desservis par des laïques, qui sont entretenus ou par des legs, ou par des subsides, ou par des contributions charitables. Ces desservans du temple sont soumis pour le temporel aux juges impériaux des temples que nomme le monarque séculier.

Quant à ce qui regarde les temples des budsdos, c’est-à-dire, des sénateurs du paganisme étranger reçu au Japon, nous nous contenterons de remarquer que ces temples ne sont pas moins magnifiques que ceux des sintoistes. Ils sont également remarquables par leur grandeur, par leur situation charmante, & par leurs ornemens : mais les ecclésiastiques qui les desservent, n’ont ni processions, ni spectacles publics, & ne se mêlent d’autre chose que de faire leurs prieres dans le temple aux heures marquées. Leur supérieur releve d’un général qui réside à Miaco. Ce général est à son tour soumis aux commissaires de l’empereur, qui sont protecteurs & juges de tous les temples de l’empire ; voyez de plus grands détails dans Koempfer. J’ajouterai seulement que tous les temples du Japon ressemblent beaucoup aux pagodes des Chinois ; que ces temples sont extrèmement multipliés, & que leurs prêtres sont sans nombre ; pour prouver ce dernier article, il suffira de dire qu’on compte dans Miaco & aux environs 3894 temples, 37093 prêtres pour y faire le service. (D. J.)

Temples des Indiens, les Européens les nomment pagodes. Voyez Pagode.

Temples des Juifs modernes, voyez Synagogue.

Temples des Mages, (Hist. des Perses.) c’est Zoroastre qui les éleva. Il fleurissoit pendant que Darius Hystaspe occupoit le trone de Perse, 486 ans avant J. C. Après être devenu le plus grand mathématicien & le plus grand philosophe de son siecle, il reforma le magisme, & établit sa nouvelle religion chez les Perses, les Parthes, les Bactriens, les Chowaresmiens, les Saces, les Medes, & dans une partie des Indes.

Avant lui les Mages dressoient des autels pour y conserver leur feu sacré en plein air ; mais la pluye, les tempêtes, les orages, éteignoient souvent ce feu, & interrompoient le culte ; Zoroastre pour remédier

à cet inconvénient, ordonna d’ériger partout des temples ; & pour rendre plus vénérable le feu des temples qu’il avoit érigés, il feignit d’en avoir apporté du ciel, & le mit sur l’autel du premier temple dans la ville de Xis en Médie, d’où on dit que le feu fut répandu dans tous les autres temples des Mages.

Ayant divisé les prêtres en trois ordres, il fit bâtir trois sortes de temples, dont le principal fut élevé à Balch, où il résida lui-même en qualité d’archimage. Mais après que les mahométans eurent ravagé la Perse dans le vij. siecle, l’archimage fut obligé de se retirer dans le Kerman, sur les bords de l’Océan méridional vers les Indes, & c’est-là que jusqu’ici ses successeurs se sont maintenus.

Le temple de Kerman n’est pas moins respecté de nos jours de ceux de cette secte, que celui de Balch l’étoit autrefois. (D. J.)

Temples des Mahométans, voyez Mosquée.

Temples des Péruviens, (Antiq. péruviennes.) leurs temples étoient consacrés au Soleil & à la Lune. Garcilasso de la Vega nous a donné la description de celui de Cusco, capitale du Pérou ; on sera peut-être bien-aise d’en trouver ici le précis.

Le grand autel étoit du côté de l’Orient, & le toit de bois fort épais, couvert de chaume par-dessus, parce qu’ils n’avoient point l’usage de la tuile ni de la brique. Les quatre murailles du temple, à les prendre du haut en bas, étoient lambrissées de plaques d’or. Sur le grand autel on voyoit la figure du Soleil, marquée sur une plaque d’or ; cette figure s’étendoit presque d’une muraille à l’autre ; elle échut par le sort à un gentilhomme castillan, qui la joua, & la perdit dans une nuit.

On peut juger par cet échantillon qui échut en partage à cet officier, combien étoit grand le trésor que les Espagnols trouverent dans ce temple. Aux deux côtés de l’image du Soleil, étoient les corps de deux de leurs yncas, artistement embaumés, & assis sur des trones d’or, élevés sur des plaques de même métal.

Les portes de ce temple étoient toutes couvertes de lames d’or. A côté du temple on voyoit un cloitre à quatre faces, & dans sa plus haute enceinte, une couronne d’or fin, qui pouvoit bien avoir une aune de large. Tout-autour de ce cloitre regnoient cinq pavillons en quarré, couverts en forme de pyramide.

Le premier étoit destiné à loger la Lune femme du Soleil ; ses portes avec son enclos étoient tapissés de plaque d’argent, pour donner à connoître par la couleur blanche, que c’étoit l’appartement de la Lune, laquelle étoit représentée sur une plaque d’argent, & avoit le visage d’une femme.

L’appartement le plus proche de celui de la Lune étoit celui de Vénus, des Pléiades, & d’autres étoiles. Ils honoroient extrémement l’astre de Vénus, parce qu’ils le regardoient comme le messager du Soleil, allant tantôt devant lui, tantôt après. Ils ne respectoient pas moins les Pléiades à cause de la disposition de ses étoiles, qui leur sembloient toutes égales en grandeur.

Pour les autres étoiles en général, ils les appelloient les servantes de la Lune, & elles étoient logées près de leur dame, pour obéir commodément à ses ordres. Cet appartement & son portail étoient couverts de plaques d’argent comme celui de la Lune. Son toit étoit semé d’étoiles d’argent de différentes grandeurs.

Le troisieme appartement étoit consacré à l’éclair, au tonnerre & à la foudre. Ils ne regardoient point ces trois choses comme des dieux, mais comme des génies subordonnés au Soleil, & toujours prêts à exercer sa justice sur la terre.

Ils consacroient à l’arc-en-ciel le quatrieme ap-