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Kircher dans sa Phonurgie, dit qu’il avoit inventé il y avoit 24 ans, & publié dans sa Musurgie, la même trompette qu’en dernier lieu on a fait passer en Angleterre pour une invention nouvelle. Il ajoute que Jacobus Albanus Ghibbisius, & le P. Eschinardus lui attribuent cette invention, & que G. Schottus lui rend témoignage que dans le college Romain il avoit cet instrument dans sa chambre, & qu’il s’en servoit pour appeller le portier, & pour en recevoir reponse.

Lorsque l’on fait attention au fameux porte-voix dont Alexandre le Grand se servoit pour parler à son armée, & que l’on pouvoit entendre distinctement à cent stades (huit stades font un mille d’Angleterre, qui fait un tiers de lieue de France), il paroît un peu surprenant que les modernes prétendent à cette invention ; la trompette stentorophonique d’Alexandre, dont on conserve une figure au Vatican, étant presque la même chose que la trompette parlante dont on fait usage aujourd’hui. Chambers.

Trompette écoutante, est un instrument inventé par Joseph Landini, pour faire entendre une personne qui parle à une distance considérable, sans le secours d’aucune trompette parlante : c’est une espece de cornet. Voyez Cornet.

Trompette, jeu d’orgue de la classe de ceux qu’on appelle jeux d’anches. Il est composé d’un tuyau d’étain E C, fig. 44. Pl. d’Orgue, de forme conique comme tous les autres jeux d’anche, excepté le cromorne ; à l’extrémité inférieure est soudée une noix de plomb c, dans laquelle l’anche & sa languette sont assujetties par le moyen d’un coin de bois. Voyez l’article Anche. Un peu plus haut est un anneau de plomb D, soudé sur le corps du tuyau dans lequel passe la rasette ba, qui passe aussi dans la noix e du tuyau, & qui va s’appuyer sur la languette de l’anche, pour fixer la longueur de la partie qui doit vibrer. La partie inférieure DC de la trompette entre dans une boîte AB qui est d’étoffe, c’est-à-dire de plomb & d’étain fondus ensemble ; savoir deux parties du premier, & une du troisieme. La trompette entre dans la boîte, en sorte que la bague D vienne appuyer sur la partie supérieure qu’elle doit fermer exactement ; en sorte que le vent du sommier qui passe dans la boîte par l’ouverture de son pié B, ne puisse trouver d’issue pour sortir qu’entre la languette & l’anche du tuyau par où il passe dans le corps de la trompette, ce qui la fait parler. Voyez pour l’explication de la formation du son dans les jeux d’anches, l’article Orgue, où la facture des jeux d’anches est expliquée.

La trompette sonne l’unisson du huit piés ouvert, ou du clavecin, & l’octave au-dessous du prestant, sur lequel on l’accorde. Voyez la table du rapport & de l’étendue des jeux de l’Orgue.

Trompette de récit, jeu d’orgue de la classe de ceux qu’on appelle jeux d’anches. Le jeu qui est d’étain, sonne l’unisson des dessus & des tailles de la trompette, dont il ne differe qu’en ce qu’il est de plus menue taille. Quelquefois ce jeu descend jusqu’au fa de la clé de fa, ou des basses tailles de la trompette. Il est sur un clavier séparé, & sur le même sommier que le cornet de récit, qui est placé dans le haut de l’orgue. Voyez la table du rapport & de l’étendue des jeux de l’orgue. Voyez l’article Orgue & Jeux, & la fig. 46. Pl. d’Orgue, qui représente un tuyau de trompette de récit dans sa boîte.

Trompette, double trompette, jeu d’orgue ne differe de la trompette dont il sonne l’unisson, qu’en ce qu’il est de plus grosse taille, pour éviter la confusion que deux unissons de même taille font entendre dans les sons qu’ils rendent.

Trompette, s. m. (Art. milit.) c’est le cavalier qui sonne de cet instrument.

Il y a des trompettes dans toutes les compagnies de cavalerie, & dans toutes celles de la maison du roi & de la gendarmerie.

Les trompettes, dans les marches & dans les revues, marchent à la tête de l’escadron, trois ou quatre pas en avant ; dans un combat, ils sont sur l’aîle ou dans les intervalles des escadrons. (Q)

Trompettes, fétes des, (Hist. jud.) solemnité célébrée chez les anciens Hébreux & chez les Juifs modernes, mais avec quelque différence.

Elle se célébroit chez les anciens le premier jour du septieme mois de l’année sainte qui étoit le premier de l’année civile. Ce mois s’appelloit tizri, & répondoit à la lune de Septembre. On annonçoit le premier jour de l’année au son des trompettes. Ce jour étoit solemnel. Toute œuvre servile y étoit défendue ; on y offroit un holocauste solemnel au nom de toute la nation, d’un veau, de deux béliers, de sept agneaux de l’année ; avec les offrandes de farine, de vin, que l’on avoit coutume de joindre à ces sacrifices. L’Ecriture ne nous apprend point la raison de l’établissement de cette fête. Théodoret, quæst. XXXII. in levitic. croit que c’étoit en mémoire du tonnerre que l’on avoit entendu sur le mont Sinaï, lorsque Dieu y donna sa loi. Les rabbins veulent que ce soit en mémoire de la délivrance d’Isaac, à la place duquel Abraham immola un bélier.

Aujourd’hui les Juifs ont coutume ce soir-là de se souhaiter l’un à l’autre une bonne année, de faire meilleure chere qu’à l’ordinaire, & de sonner de la trompette à trente diverses fois. Léon de Modene, céremon. des Juifs, part. III. c. v. remarque qu’il y a eu autrefois dispute entre les rabbins sur le tems auquel le monde a commencé, les uns prétendant que c’étoit au printems, & les autres en automne ; que ce dernier sentiment a prévalu, & que c’est sur cela qu’est fondée la fête des trompettes qui se célebre au commencement de tizri qui répond à Septembre. Pendant cette fête qui dure les deux premiers jours du mois : le travail & les affaires sont suspendues ; les Juifs tiennent par tradition que ce jour-là Dieu juge particulierement les actions de l’année précédente, & dispose des événemens de celle où l’on va entrer. C’est pourquoi dès les premiers jours du mois précédent, ou du moins huit jours avant la fête des trompettes, la plûpart vaquent aux œuvres de pénitence & de mortification ; & la veille, plusieurs se font donner trente-neuf coups de fouet, par forme de discipline.

Le premier soir qui commence l’année & qui précede le premier jour de tizri, en revenant de la synagogue. Ils se disent l’un à l’autre : Soyez écrit en bonne année, & l’autre répond, & vous aussi. Lorsqu’ils sont dans leur maison, on sert sur la table du miel & du pain levé & tout ce qui peut faire augurer une année abondante & douce. Il y en a plusieurs qui vont le matin de ces deux fêtes vêtus de blanc à la synagogue en signe de pureté & de pénitence. Parmi les Allemands quelques-uns portent alors l’habit qu’ils ont destiné pour leur sépulture. On récite ce jour-là dans la synagogue plusieurs prieres & bénédictions particulieres. On y tire solemnellement le pentateuque de l’armoire, & on y lit à cinq personnes le sacrifice qu’on faisoit ce jour-là. Ensuite on sonne trente fois du cor, tantôt d’une maniere fort lente, & puis d’une maniere fort brusque. Ils disent que c’est pour faire songer au jugement de Dieu, pour intimider les pécheurs & les porter à la pénitence. Après quelques prieres, ils s’en retournent à la maison, ils se mettent à table, & passent le reste du jour à entendre quelques sermons & à d’autres exercices de dévotion. Les deux jours de la fête se passent dans de semblables cérémonies.

Pour se préparer à la fête des trompettes ou du com-