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est produit par des fourmis aîlées, qui le rassemblent dans les arbres creux ; la quatrieme espece est produite par des fourmis d’une grandeur singuliere, qui le font dans des especes de tas de terre d’une forme conique & percés d’une infinité de trous. Il y a de plus une autre sorte de miel, qui a plus de consistence & qui a la dureté du sucre, on le nomme tentele-sacondre ; les mouches qui le font, l’attachent aux feuilles de certains arbrisseaux, où elles sont ensuite transformées en chrysalides jaunes, vertes ou rouges. Quelques-uns ont cru que ce dernier miel ou sucre étoit le même que les Arabes nomment tabaxir. L’île de Madagascar fournit enfin un miel, qui est un poison très-violent ; ce qui vient, dit-on, de ce que les mouches qui le produisent sucent les fleurs d’un arbre, nommé caracarac, qui est d’une mauvaise qualité.

TENTER, v. act. (Gram.) ce verbe outre sa signification prise dans l’Ecriture, & dont nous avons déja parlé, a d’autres sens fort bons & fort communs ; on tente un valet pour le débaucher du service de son maître ; on tente un officier, un ministre pour le retirer des intérêts de son prince. Tenter dans ce sens, c’est faire à quelqu’un des propositions capables de corrompre sa fidélité. Quelques-uns disent aussi, tenter une personne, pour dire, sonder une personne : hypocrites pourquoi me tentez-vous ? Mais je pense que sonder seroit ici beaucoup meilleur. On dit fort bien tenter Dieu ; mais c’est dans une autre signification ; ceux-là tentent Dieu, qui attendent tout de sa providence, ou qui se jettant dans des dangers manifestes, esperent que Dieu fera des miracles pour les délivrer du péril. Tenter se prend encore pour hasarder, risquer ; tenter la fortune du combat.

Avant l’aurore éveiller des chanoines,
Qui jamais l’entreprit ! Qui l’oseroit tenter ?
Est-ce un projet, ô ciel ! qu’on puisse exécuter ?

Despréaux.

Il veut dire quelquefois essayer ; tenter tous les moyens de rentrer en grace ; il se dit aussi pour exciter, émouvoir :

Fui, traître, ne viens point braver ici ma haine,
Et tenter un courroux que je retiens à peine.

Racine, dans Phedre.


(D. J.)

Tenter, (Critique sacrée.) ce verbe signifie communément éprouver, dans l’Ecriture. Ainsi quand elle dit que Dieu tente les hommes, cela ne veut pas dire que Dieu cherche à les séduire pour les faire tomber dans le péché, mais cela signifie qu’il éprouve leur vertu, soit par des commandemens plus ou moins pénibles, soit par des traverses attachées à l’humanité. Tenter Dieu, dans l’ancien Testament, c’est vouloir éprouver follement sa toute-puissance ; c’est s’exposer à des dangers dont on ne peut sortir sans un effet miraculeux de son secours. Vous ne tenterez point le Seigneur, Deut. vj. 18. Voici une réponse de la Pythie qui se trouve dans Hérodote, tenter Dieu & le faire, c’est la même chose ; τὸ πειρηθῆναι τοῦ Θεοῦ, καὶ τὸ ποιῆσαι, ἴσον δύναται, lib. VI. num. 86. page 360. (D. J.)

TENTHRENIODES, (Lexicogr. Médec.) τενθρηνιώδης, épithete qu’Hippocrate donne au poumon, & par laquelle il désigne que ce viscere est percé d’un grand nombre de petits trous, semblables à ceux d’un rayon de miel, c’est-à-dire, selon Galien de usu partium, lib. VII. c. ix. que le poumon est d’une substance molle & poreuse. (D. J.)

TENTOI, s. m. (Haute-lisserie.) on nomme ainsi parmi les haute-lissiers les barres qui servent à tendre & à tourner les deux ensubles où sont attachés les fils de la chaîne de l’ouvrage, lorsqu’on monte le métier. La barre de l’ensuble d’en-haut s’appelle le

grand tentoi, & celle du rouleau d’en-bas le petit tentoi. Dict. du comm. (D. J.)

TENTORES, s. m. (Littérat.) on nommoit ainsi chez les Romains les gardiens établis pour avoir soin des habitans, de ceux qui disputoient le prix du cirque dans la course des chars. Pitiscus. (D. J.)

TENTURE de deuil, s. f. terme de Juré-Crieur, bande de serge de plusieurs aunes de long qu’on tend dans la chambre, aux portes de la maison, & même dans l’église, aux funérailles de quelqu’un qui est décédé. Il y a une tenture noire & une tenture blanche. On se sert de la noire pour les gens mariés, & de la blanche pour les filles & les garçons. Savary. (D. J.)

Tenture de tapisserie, c’est un certain nombre de pieces ou d’aunes de tapisserie suffisante, pour tendre & tapisser un appartement.

TENTYRE, (Géog. anc.) ville d’Egypte, & la métropole d’un Nome, appellé Nomus Tentyrites, du nom de cette ville, selon Strabon, Pline, Ptolomée, & Etienne le géographe. Le premier, l. XVII. p. 814. ajoute que les Tentyrites faisoient la guerre aux crocodiles plus qu’aucune autre nation ; & qu’il y avoit des gens qui croyoient que les Tentyrites avoient un don particulier de la nature pour pouvoir réduire ces animaux ; mais Séneque, l. IV. c. ij. dans ses questions naturelles, nie que les Tentyrites eussent en cela reçu de la nature aucun avantage sur les autres hommes. Ils ne maîtrisent les crocodiles, dit-il, que par le mépris qu’ils en ont, & par leur témérité ; ils les poursuivent vivement ; ils leur jettent une corde, les lient, & les traînent où ils veulent : aussi en voit-on périr beaucoup de ceux qui n’apportent pas toute la présence d’esprit nécessaire dans une occasion si périlleuse.

Cette antipathie des Tentyrites pour les crocodiles que les habitans des autres villes adoroient, causa entr’eux une haine qui produisit une guerre ouverte, dont Juvenal parle dans sa quinzieme satyre, vers. 33.

Inter finitimos vetus atque antiqua simultas,
Immortale odium, & nunquàm sanabile vulnus
Ardet adhuc, Ombos & Tentyra, summus utrimque,
Indè furor vulgò, quod numina vicinorum
Odit uterque locus, quum solos credat habendos
Esse deos, quos ipse colit.


(D. J.)

TENU, adj. (Gram.) du latin tenuis ; menu, mince, délié ; une poudre tenue, une membrane tenue ; un trait mince & tenu ; une écriture tenue ; les particules tenues de l’air, de l’eau, du feu ; les consonnes de l’alphabet grec se divisent en moyennes, tenues & aspirées. De tenu on a fait tenuité, qui n’est guere d’usage qu’en Physique ; la tenuité des atomes.

TENUE, s. f. (Gram.) état fixe, stable ; on dit la tenue de l’esprit, du caractere, des idées.

On dit d’un cavalier qu’il n’a point de tenue à cheval ; on le dit aussi de la selle ; la selle à l’angloise n’a pas de tenue. En marine, qu’un fond n’a pas de tenue. La tenue d’une assemblée, d’un concile, d’un congrès. Voyez Tenir.

La tenue d’un fief. Voyez Tenure.

Faire au trictrac une tenue malheureuse. Voyez Tenir au trictrac.

Tenue, voyez Fond de bonne tenue.

Tenue, s. f. en Musique, est un son soutenu par une partie durant deux ou plusieurs mesures, tandis que d’autres parties travaillent. Voyez Mesure, Partie, Travailler. Il arrive quelquefois, mais rarement, que toutes les parties font des tenues à-la-fois. (S)

TENURE, s. f. (Gram. & Jurisprud.) est la maniere & le titre auquel on possede un héritage ; il y a plusieurs sortes de tenures, savoir la tenure en fran-