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SOUMISSION, s. f. (Gram. & Jurisprud.) est une déclaration par laquelle on s’engage à faire quelque chose, ou l’on consent que quelque chose soit faite.

Ainsi l’on se soumet aux rigueurs d’un tribunal, comme de la conservation de Lyon.

On fait ses soumissions pour un office, pour une ferme, ou quelqu’autre exploitation ou entreprise, en consignant une somme ou en faisant une déclaration que l’on s’oblige de payer. Voyez Consignation, Offres, Obligation, Payement. (A)

SOUMONTSOUI, (Hist. nat. Botan.) arbre de l’île de Madagascar, dont le bois est violet & marbré ; il sert à teindre en rouge.

SOUN, s. m. (Marine.) ce sont à la Chine les principaux bâtimens, tant de guerre que vaisseaux marchands. Les plus grands de charge sont de 300 lastes ; ceux qu’on équipe en guerre, ne passent pas 100.

SOUPAPE, en Hydraulique, Pneumatique, &c. est une espece de couvercle de tuyau, qui est fait de maniere qu’il s’ouvre d’un côté, & que de l’autre plus il est pressé, plus il bouche exactement l’ouverture : de sorte qu’il laisse entrer un fluide dans le tuyau, & l’empêche de retourner, ou bien le laisse sortir & l’empêche de rentrer.

Les soupapes sont d’un grand usage dans les machines pneumatiques, dans lesquelles elles sont ordinairement faites de morceaux de vessie. Voyez Pneumatique & Canne à vent.

Dans les machines à vent hydrauliques, comme aux pistons des pompes, elles sont ordinairement de cuir. Voyez Piston.

Quelquefois elles sont faites de deux morceaux de cuir ronds, renfermés entre deux plaques de cuivre.

Quelquefois elles sont faites de cuivre, toujours couvertes de cuir, & garnies d’un petit ressort qui donne passage quand il est pressé fortement, & qui ramene la soupape sur l’ouverture sitôt que la force cesse de le presser. Voyez Pompe, &c.

L’usage des soupapes dans l’Hydraulique est principalement nécessaire pour pouvoir élever l’eau à une hauteur considérable par le moyen des pompes ; en effet la force de l’air ne pouvant élever l’eau qu’à la hauteur de 32 piés, il est certain que si on vouloit transporter par le moyen d’une pompe simple une certaine quantité d’eau dans un lieu élevé, on ne pourroit jamais la transporter à plus de 32 piés de hauteur. Or les soupapes, par leur solidité & leur construction, sont destinées à soutenir l’eau qui est au-dessus, & par conséquent déchargent, pour ainsi dire, l’atmosphere de la force qu’il faudroit qu’elle employât pour les tenir en équilibre ou pour les élever, de sorte que le surplus de cette force est employé à élever une nouvelle quantité d’eau.

On a cru jusqu’à présent qu’on ne pouvoit donner un trop grand diametre à l’ouverture des soupapes des pompes ; & on se fondoit sur ce principe très vrai, qu’une certaine quantité d’eau passera plus facilement par une grande ouverture. Cependant le contraire est fort possible ; voici l’éclaircissement du paradoxe. Si la fonction d’une soupape ne consistoit qu’à laisser passer l’eau par son ouverture, le principe seroit vrai sans difficulté, mais une soupape a deux autres fonctions à remplir.

1°. Il faut qu’après avoir laissé passer l’eau, & dès qu’il n’en passe plus, elle retombe & ferme le passage par où l’eau est entrée dans le corps de pompe.

2°. Il faut qu’étant retombée sur son ouverture qu’elle ferme, elle porte toute la colonne qui y est entrée.

Pour le premier effet, il lui faut une pesanteur spécifique plus grande que celle de l’eau, sans quoi

elle ne retomberoit pas malgré la résistance de l’eau, comme elle le doit faire. Pour le second effet, il lui faut une solidité proportionnée à la colonne d’eau qu’elle soutiendra. Les deux effets s’accordent à exiger en général la même chose.

Je suppose une soupape parfaite, qui s’ouvre ou qui s’éleve, se referme ou retombe à souhait, qui ait précisément la solidité nécessaire pour soutenir la colonne d’eau entrée dans le corps de pompe. Je suppose ensuite que pour y faire entrer l’eau encore plus facilement qu’elle n’y entroit, on augmentât l’ouverture de cette soupape, tout le reste demeurant le même ; qu’en arrivera-t-il ? En augmentant l’ouverture, il aura fallu nécessairement augmenter le diametre de la soupape, & par conséquent son poids : l’eau qui n’aura que la même vîtesse, & qui n’ouvre ou qui n’éleve les soupapes que par cette force, élevera donc moins la nouvelle soupape ou la soupape plus pesante, & le passage de l’eau sera retréci & rendu plus difficile, tout au contraire de l’intention qu’on avoit eue. Hist. & mém acad. 1739.

La nature a fait un fréquent usage des soupapes dans la construction des vaisseaux du corps humain ; elles servent à faciliter la circulation du sang & des autres liqueurs. (O)

Soupapes, c’est dans le sommier de l’orgue les pieces qui ferment le passage au vent qui, lorsqu’elles sont ouvertes, passe de la laie dans la gravure, dont la soupape est abaissée. Les soupapes sont tenues fermées par les ressorts fge, fig. 6. & 9. Voyez Ressort. Elles ne sont ouvertes que lorsqu’on les tire en en-bas par le moyen des boursettes, targettes de sommier & du clavier, & des touches que l’organiste abaisse avec ses doigts Voyez Sommier.

SOUPCON, s. m. (Morale.) défiance sur la probité, sur la sincérité d’une personne, ou sur la vérité de quelque chose ; c’est une croyance desavantageuse accompagnée de doute.

Les soupçons, dit ingénieusement le chancelier Bacon, sont entre nos pensées, ce que sont les chauve-souris parmi les oiseaux, qui ne volent que dans l’obscurité. On ne doit pas écouter les soupçons, ou du moins y ajouter foi trop facilement. Ils obscurcissent l’esprit, éloignent les amis, & empêchent qu’on n’agisse avec assûrance dans les affaires. Ils répandent sans cesse des nuages dans l’imagination. Tyrans de l’amour & de la confiance, ils rendent les rois cruels, les maris odieux, les femmes furieuses, les maîtres injustes, les gens de bien insociables, & disposent les sages à la mélancolie & à l’irrésolution.

Ce défaut vient plutôt de l’esprit que du cœur, & souvent il trouve place dans des ames courageuses. Henri VII. roi d’Angleterre, en est un bel exemple. Jamais personne n’a été plus brave, ni plus soupçonneux que ce prince ; cependant dans un esprit de cette trempe, les soupçons ne font point tant de mal ; ils n’y sont reçus qu’après qu’on a examiné leur probabilité ; mais sur les esprits timides, ils prennent trop d’empire.

Rien ne rend un homme plus soupçonneux que de savoir peu. On doit donc chercher à s’instruire contre cette maladie. Les soupçons sont nourris de fumée, & croissent dans les ténebres ; mais les hommes ne sont point des anges : chacun va à ses fins particulieres, & chacun est attentif & inquiet sur ce qui le regarde.

Le meilleur moyen de modérer sa défiance est de préparer des remedes contre les dangers dont nous nous croyons menacés, comme s’ils devoient indubitablement arriver, & en même tems de ne pas trop s’abandonner à ses soupçons, parce qu’ils peuvent être faux & trompeurs. De cette façon, il n’est pas possible qu’ils nous servent à quelque chose.

Ceux que nous formons nous-mêmes, ne sont pas