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sers du compas & de la regle ; je me servis, pour le convaincre, alternativement de l’expérience & de la raison, &c.

SERVIS, s. m. (Jurispr.) du latin servire dont on a fait dans la basse latinité servitia, pour dire services, & par corruption servis, sont les devoirs dont le censitaire emphytéote est tenu envers le seigneur, à cause de l’héritage qui lui a été donné à cette condition.

Ce terme de servis est usité, surtout dans les provinces régies par le droit écrit. Il est synonyme de cens ; si ce n’est que l’on veuille dire que le cens est cette modique redevance qui se paye en argent, in recognitionem dominii, & que les servis sont les autres devoirs & prestations dûs au seigneur sur le même héritage, soit en grains, volailles & autres choses.

On joint ordinairement les termes de cens & servis : en demandant le payement de l’un, on ne manque point de demander le payement des autres.

Les arrérages des servis se prescrivent comme ceux du cens, par 30 ans ou par 50 ans, suivant l’usage des différentes provinces. Voyez Bordelage, Cens, Censive, Devoir, Prescription, Prestation. (A)

SERVITE, s. m. (Ordre monastique.) Les Servites sont un ordre de religieux suivans la regle de Saint-Augustin, & qui s’attachent au service de la Vierge. Le premier auteur de cet ordre fut Bonfilio Monaldi, marchand de Florence, qui ayant quitté le négoce avec six autres de sa profession, se retira en 1223 au mont Sénaire à deux lieues de Florence. En 1239 ils reçurent de l’évêque la regle de Saint-Augustin. Ensuite Bonfilio fut nommé général, & mourut en odeur de sainteté le premier Janvier 1261. Le concile de Latran approuva l’ordre des servites, & les papes lui ont accordé beaucoup de graces. Il n’est point établi en France ; mais Fra-Paolo, vénitien, qui étoit religieux servite, en a relevé la gloire en Italie, où l’on voit aussi des religieuses servites, ainsi nommées, parce qu’elles observent la regle des religieux du même nom. (D. J.)

SERVITEUR, s. m. (Morale.) Les noms de maîtres & de serviteurs sont aussi anciens que l’histoire, & ne sont donnés qu’à ceux qui sont de condition & de fortune différente ; car un homme libre se rend serviteur d’un autre, en lui vendant pour un certain tems son service, moyennant un certain salaire. Or, quoique cela le mette communément dans la famille de son maître, & l’oblige à se soumettre à sa discipline & aux occupations de sa maison, il ne donne pourtant de pouvoir au maître sur son serviteur que pendant le tems qui est marqué dans le contrat ou le traité fait entr’eux. Les serviteurs mêmes, que nous appellons esclaves, ne sont soumis à la domination absolue & au pouvoir arbitraire de leurs maîtres que par infraction de toutes les lois de la nature. (D. J.)

Serviteur, (Théologie.) terme qui, dans l’Ecriture-sainte, se prend en divers sens.

1°. La signification la plus commune emporte avec soi l’idée d’esclave : car anciennement chez les Hébreux & les peuples voisins, la plûpart des serviteurs étoient esclaves, c’est-à-dire, absolument assujettis à leur maître, qui avoit droit de disposer de leurs personnes, de leurs corps, de leurs biens, & même de leur vie dans certains cas.

Les Hébreux avoient de deux sortes de serviteurs ou d’esclaves, comme il paroît par le Lévitique, c. xxv. v. 44. & seq. Les uns étoient ou étrangers ou achetés, ou pris à la guerre, & leurs maîtres les gardoient, les échangeoient ou les vendoient, en un mot en disposoient comme de leurs biens. Les autres étoient des esclaves hébreux qui vendoient leur liberté, pressés par l’indigence, ou qui étoient

vendus pour leurs dettes, ou étoient livrés pour être esclaves par leurs parens, dans les cas de leur nécessité. Ces sortes d’esclaves hébreux ne demeuroient en esclavage que jusqu’à l’année du jubilé. Alors ils pouvoient rentrer en liberté, sans que le maître pût les retenir malgré eux. Que s’ils restoient volontairement chez leur maître, on les amenoit devant les juges, ils y faisoient leur déclaration qu’ils renonçoient pour cette fois au privilege de la loi ; on leur perçoit l’oreille avec une alêne, en les appliquant au montant de la porte de leur maître ; & dès-lors ils ne pouvoient plus recouvrer leur liberté, si ce n’est en l’année du jubilé qui se célebroit au bout de 49 ans.

2°. Serviteur se prend aussi pour marquer un homme attaché au service d’un autre par choix & librement, par inclination : comme Josué étoit serviteur de Moïse, Elisée d’Elie, Giezi d’Elisée, S. Pierre, S. André & les autres de Jesus-Christ.

3°. Serviteur se met souvent pour les sujets d’un prince. Les serviteurs de Pharaon, les serviteurs de Saül & ceux de David sont leurs sujets en général, ou leurs officiers & leurs domestiques en particulier. De même aussi les Philistins, les Syriens & plusieurs autres peuples sont appellés dans l’Ecriture serviteurs de David, parce que ce prince les avoit soumis & qu’ils lui payoient tribut.

4°. Les serviteurs de Dieu, les serviteurs du Seigneur sont les prêtres, les prophetes, ceux qui font profession d’une piété particuliere. On donne souvent à Moïse le nom d’homme de Dieu, de serviteur de Dieu par excellence ; & S. Paul prend aussi lui même cette qualité.

On se donne quelquefois à soi-même, dit M. de Voltaire, des titres fort humbles, pourvu que l’on en reçoive des autres de fort élevés. Le pape s’appelle lui-même serviteur des serviteurs de Dieu. Un bon prêtre du Holstein écrivit un jour à Pie IV. à Pie IV. serviteur des serviteurs de Dieu. Il alla ensuite à Rome solliciter son affaire, & l’inquisition le fit mettre en prison pour lui apprendre à écrire.

5°. Dans l’Ecriture, serviteurs ou esclaves, opposés à libres & aux enfans des promesses, marque les Juifs par opposition aux chrétiens. Les Juifs n’étoient que les esclaves figurés par Agar & par Ismaël ; les chrétiens sont les enfans de la liberté figurés par Sara & par Isaac, comme S. Paul l’établit dans ses épîtres, & sur-tout dans celle aux Galates. Calmet, Dictionn. de la Bibl. tom. III. pag. 545.

Serviteurs, s. m. pl. (terme de comm. de Chirurg.) on appelle serviteurs ou garçons, chez les maîtres chirurgiens de Paris, ceux qu’on nomme compagnons chez les maîtres de communautés des arts & métiers. Les garçons ou serviteurs peuvent aspirer à la maîtrise, & être admis à faire le grand chef-d’œuvre quand ils ont servi six ans consécutifs chez un des maîtres, ou sept ans chez plusieurs. (D. J.)

Serviteur, en terme de Raffinerie, sont des ouvriers loués à l’année, qui sont sous les ordres du contre-maître, & doivent lui obéir sans replique. Il faut que ce soit des hommes sorts & robustes, pour supporter les grandes fatigues d’une raffinerie. C’est pour cela qu’on les nourrit sans leur épargner ni pain, ni vin, ni bonne chere. Ils s’engagent pour un an. On ne peut les renvoyer qu’après ce terme, à moins que ce ne soit pour cause de bassesse ou d’infidélité.

SERVITUDE, s. f. (Gramm. & Jurisprud.) en général est l’état d’une personne ou d’un héritage qui est assujetti à certains devoirs ou services envers une autre personne, ou envers un autre héritage.

Quelquefois par le terme de servitude, on entend le droit d’exiger ces sortes de services & de devoirs ; quelquefois au contraire on entend par servitude, l’o-