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lument dans l’espace immuable vers l’orient avec 10001 degrés de vîtesse, & relativement à la terre avec neuf degrés de vîtesse vers l’occident.

On voit par conséquent qu’un corps peut être dans un repos relatif, quoiqu’il soit mu d’un mouvement commun relatif ; car les marchandises qui sont dans un vaisseau à voile ou dans une barque y reposent d’un repos relatif, & sont mues d’un mouvement relatif commun, c’est-à-dire avec le vaisseau même dont ils font comme partie.

Il se peut aussi qu’un corps paroisse mu d’un mouvement relatif propre, quoiqu’il soit cependant dans un repos absolu. Supposons qu’un vaisseau fasse voile d’orient en occident, & que le pilote jette d’occident en orient une pierre qui aille avec autant de vîtesse que le vaisseau même, mais qui prenne un chemin tout opposé ; cette pierre paroîtra à celui qui est dans le vaisseau avoir autant de vîtesse que le vaisseau, mais celui qui est sur le rivage & qui la considere verra cette même pierre, & elle est effectivement dans un repos absolu, puisqu’elle se trouve toujours dans la même portion de l’espace. Comme cette pierre est poussée d’orient en occident à l’aide du mouvement du vaisseau, & qu’elle est poussée avec la même vîtesse d’occident en orient par la force de celui qui la jette, il faut que ces deux mouvemens qui sont égaux & qui se détruisent l’un l’autre laissent de cette maniere la pierre dans un repos absolu. Musch. Ess. de Phys. p. 77.

Les Philosophes ont agité la question, si le repos est quelque chose de positif ou une simple privation. Voyez sur cela l’article Mouvement.

C’est un axiome de philosophie, que la matiere est indifférente au repos ou au mouvement ; c’est pourquoi Newton regarde comme une loi de la nature que chaque corps persevere dans son état de repos ou de mouvement uniforme, à-moins qu’il n’en soit empêché par des causes étrangeres. Voyez au mot Nature. Les Cartésiens croient que la dureté des corps consiste en ce que leurs parties sont en repos les unes auprès des autres, & ils établissent ce repos comme le grand principe de cohésion par lequel toutes les parties sont liées ensemble. Voyez Dureté. Ils ajoutent que la fluidité n’est autre chose que le mouvement intestin & perpétuel des parties. Voyez Fluidité & Cohésion. Pour éviter l’embarras que la distinction de repos absolu & repos relatif mettroient dans le discours, on suppose ordinairement lorsqu’on parle du mouvement & du repos, que c’est d’un mouvement & d’un repos absolu ; car il n’y a de mouvement réel que celui qui s’opere par une force résidente dans le corps qui se meut, & il n’y a de repos réel que la privation de cette force.

Il n’y a point dans ce sens de repos dans la nature, car toutes les parties de la matiere sont toujours en mouvement, quoique les corps qu’elles composent puissent être en repos ; ainsi, on peut dire qu’il n’y a point de repos interne.

Il n’y a point de degrés dans le repos, comme dans le mouvement ; car un corps peut se mouvoir plus ou moins vîte : mais quand il est une fois en repos, il n’y est ni plus, ni moins. Cependant le repos & le mouvement ne sont souvent que relatifs pour nous ; car les corps que nous croyons en repos, & que nous voyons comme en repos, n’y sont pas toujours.

Un corps qui est en repos ne commence jamais de lui-même à se mouvoir. Car puisque toute matiere est douée de la force passive, par laquelle elle résiste au mouvement, elle ne peut se mouvoir d’elle-même. Pour que le mouvement ait lieu, il faut donc une cause qui mette ce corps en mouvement. Ainsi, tout corps en repos resteroit éternellement en repos, si quelque cause ne le mettoit en mouvement, comme

il arrive, par exemple, lorsque je retire une planche, sur laquelle une pierre est posée, ou que quelque corps en mouvement communique son mouvement à un autre corps, comme lorsqu’une bille de billard pousse une autre bille. C’est par le même principe qu’un corps en mouvement ne cesseroit jamais de se mouvoir, si quelque cause n’arrêtoit son mouvement en consumant sa force ; car la matiere résiste également au mouvement & au repos par son inertie ; d’où résulte cette loi générale. Un corps persévere dans l’état où il se trouve, soit de repos, soit de mouvement, à moins que quelque cause ne le tire de son mouvement ou de son repos. Voyez. Institut. de Physique de madame du Châtelet, §. §. 220. 229. Cet article est de M. Formey.

Repos, (Critique sacrée.) ce mot que la vulgate rend par requies, signifie cessation, relâche, soulagement, affranchissement des maux. Au jour du sabbat étoit la cessation de toute sorte de travail, requies, Exod. xxxj. 15. Lorsque le Seigneur aura terminé vos maux, Is. xiv. 3. Cum requiem dederit tibi Deus. 2°. repos se prend encore pour habitation, demeure fixe. La tribu d’Issachar, vit que le lieu de sa demeure, (requiem) étoit avantageux. 3°. Le ciel est appellé par métaphore un repos. Il reste un repos, un état de repos, σαϐϐατισμὸς, pour le peuple de Dieu ; entrons donc dans ce repos, κατάπαυσιν, dit S. Paul aux Héb. iv. 9. & 11. (D. J.)

Repos, (Mytholog.) les Romains avoient personnifié le repos, & en avoient fait une déesse, parce que quies en latin est féminin. Elle avoit deux temples à Rome, l’un hors de la porte Collatine, & l’autre sur la voie Lavicane. (D. J.)

Repos, (Poésie.) c’est la césure qui se fait dans les grands vers, à la sixieme syllabe, & dans les vers de dix à onze à la quatrieme syllabe ; on appelle cette césure repos, parce que l’oreille & la prononciation semblent s’y reposer ; c’est pourquoi le repos ne doit point tomber sur des monosyllabes où l’oreille ne s’auroit s’arrêter. Le mot repos se dit encore en poésie, de la pause qui se fait dans les stances de six ou de dix vers ; savoir, dans celles de six, après le troisieme vers ; dans celles de dix après le quatrieme, & après le septieme vers. A la fin de chaque stance ou couplet, il faut qu’il y ait un plein repos, c’est-à-dire, un sens parfait. Mourgues. (D. J.)

Repos, s. m. en Musique ; c’est le lieu où la phrase se termine, & où le chant se repose plus ou moins parfaitement. Le repos ne peut s’établir que par une cadence pleine ; si la cadence est évitée, il ne peut y avoir de repos, car il est impossible à l’oreille de se reposer sur une dissonnance. On voit par-là qu’il y a précisement autant d’espece de repos que de sorte de cadences (voyez Cadence) ; & ces différens repos produisent dans la musique l’effet de la ponctuation dans le discours.

Quelques-uns confondent mal-à-propos le repos avec les silences, quoique ces choses soient fort différentes. Voyez Silence. (S)

Repos, (Méd. Diéte.) se dit de la cessation du mouvement du corps que l’on fait en se livrant à l’exercice, au travail : c’est l’état opposé à celui de l’action qu’opere ce mouvement.

C’est, par conséquent, en ce sens, une des choses de la vie des plus nécessaires à l’économie animale ; une des six choses qu’on appelle dans les écoles non-naturelles, qui est très-utile à la santé, lorsque l’usage en est reglé, mais dont l’excès, comme le défaut, lui est très-nuisible, & influe beaucoup à y faire naître des desordres considérables. Voyez Mouvement, Exercice, Oisiveté, Hygiene, Non-naturelles (choses), Régime.