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cun quartier particulier dans les lignes, si ce n’est quelquefois celui du général ; mais on n’y manquoit point du tems des princes d’Orange, & dans le commencement du regne de Louis XIV. Les lignes ayant alors plusieurs quartiers particuliers fortifiés, qui offroient une retraite aux troupes dans le besoin, elles n’étoient pas forcées pour avoir été percées dans quelqu’une de leurs parties. La briéveté qu’on a voulu employer dans les sieges, a fait supprimer plusieurs attentions qu’on prenoit autrefois pour mettre les lignes à l’abri de toute insulte. Le grand nombre de troupes qu’on a en campagne, qui suffisent pour faire le siege, & former une armée d’observation, a rendu une partie des anciennes précautions inutiles. Mais par cette conduite il arrive que le succès du siege dépend de celui que l’armée qui le soutient éprouve lorsque l’ennemi vient l’attaquer. Les anciens n’étoient point exposés à cet inconvénient : il peut arriver d’ailleurs qu’on soit obligé de faire un siege sans avoir le secours d’une armée d’observation ; il paroît que dans ce cas il faudroit au moins s’appliquer, non-seulement à faire de bonnes lignes, mais encore à fortifier les quartiers pour mettre les troupes en état de les défendre avec plus de sureté & d’opiniatreté. On peut voir sur ce sujet le II. volume de la guerre des sieges, deuxieme édition, où l’on est entré dans un grand détail sur tout ce qui concerne la fortification des lignes & des différens quartiers d’une armée qui fait un siege.

Outre les quartiers dont on vient de parler, les armées prennent en Espagne, en Italie, & dans les autres pays chauds, des quartiers d’été. Ce sont des especes de cantonnemens qu’on fait occuper aux troupes pendant les grandes chaleurs, où ils ne pourroient que très-difficilement supporter les fatigues & les travaux militaires.

Il y a aussi les quartiers d’assemblée & les quartiers de rafraichissement. Les premiers sont différens lieux où les troupes doivent s’assembler pour se mettre en marche ; les autres sont des endroits abondans en vivres & en fourrages, où l’on envoie quelquefois des troupes harassées & fatiguées, même pendant la campagne, pour se rétablir, & se mettre en état de l’achever.

Nous observerons ici que le terme de quartier s’emploie ordinairement à la guerre pour le bon traitement qu’on promet à des troupes qui se rendent, ou qui mettent les armes bas. Lorsqu’on ne veut point les recevoir à composition, on dit qu’on ne leur donnera point de quartier. Demander quartier, c’est demander à se rendre. Cette façon de parler vient, suivant le dictionnaire de Chambers, de ce que les Hollandois & les Espagnols étoient autrefois convenus que la rançon d’un officier ou d’un soldat se payeroit avec un quartier de sa paye. De sorte que quand on ne vouloit point le recevoir à rançon, c’étoit refuser l’offre d’un quartier de sa solde. (Q)

Quartier-maitre, (Hist. mod.) c’est le nom qu’on donne parmi les troupes allemandes, angloises & hollandoises, à un bas officier dont la fonction est de marquer les quartiers ou les logemens des troupes, ce qui répond à ce qu’on appelle en France maréchal des logis. Le quartier-maître général, est le maréchal des logis de l’armée.

Quartier, (Hist. mod.) se prend pour un canton ou division d’une ville, qui consistent en differentes rangées de bâtimens, séparées les unes des autres par une riviere, ou par une grande rue, ou autre séparation arbitraire.

La ville de Paris, par exemple, étoit partagée en seize quartiers sous Henri III. Elle l’est maintenant en vingt. Celle de Rome a été plusieurs fois divisée différemment en quartiers, appellés régions, suivant ses divers accroissemens ; comme on l’apprend par les

différens Antiquaires qui ont écrit tant sur l’état ancien, que sur l’état moderne de cette ville.

Il y a dans plusieurs villes des commissaires de quartier, qui ont soin de faire observer la police chacun dans le leur.

A Rome, le prieur des caporions se prétend chef & colonel des quatorze régions ou quartiers. Muscarat, pag. 134.

Franchise de quartiers, voyez Franchise.

Quartier descente, terme de Généalogie, qui signifie chaque degré d’ordre & de succession des descendans dans une ligne ou une famille. Voyez Descendant.

Ainsi on dit deux quartiers, trois quartiers de noblesse, &c. Un homme est reputé de bonne noblesse quand il prouve quatre quartiers du côté du pere, & autant du côté de la mere ; c’est-à-dire quand son bisayeul, son ayeul & son pere, tant du côté paternel que du côté maternel, ont été gentilshommes. Voyez Gentilhomme, Quartier, &c.

Pour entrer dans certains chapitres nobles d’Allemagne, il faut faire preuve de seize quartiers, tant du côté paternel que du côté maternel ; & comme selon le calcul le plus reçu, on compte trois générations pour un siecle, la noblesse de ces candidats doit au moins remonter à cinq cens ans. Aussi n’y a-t-il point de nation plus jalouse de sa noblesse, & plus attentive à ne pas se mésallier que la nation allemande.

Quartier, s. m. terme de Blason, partie de l’écu où l’on met quelques armes de famille. On place dans le premier quartier les armes de la maison principale, & dans les autres quartiers les armes d’alliance. On dit d’un écu écartelé, au premier & quatrieme quartier, il porte de France ; au second & troisieme quartier d’Angleterre, &c. On dit un quartier tiercé en face ou en pal. Un franc quartier est un quartier qui est seul, & qui fait une des parties honorables de l’écu. Ménétrier. (D. J.)

Quartier, (Archit. générale.) C’est une partie d’une ville séparée par une riviere ou par une grande rue, comme, par exemple, les 20 quartiers de la ville de Paris. La ville de Rome a été plusieurs fois divisée différemment en quartiers appellés régions, suivant son accroissement. C’est ce que nous apprennent les topographies d’Aurelius Victor, d’Onuphre Panvinius, de Marillan, de Pitro Ligorio, de Boissard, & autres antiquaires. (D. J.)

Quartiers de Rome, (Littérat.) regiones, quartiers de la ville de Rome. Servius Tullius fut le premier qui partagea la ville de Rome en quatre quartiers ou régions, savoir la suburane, l’esquiline, la colline, & la palatine ; & les choses demeurerent en cet état jusqu’au tems d’Auguste, qui divisa Rome en quatorze quartiers, à chacun desquels il établit deux commissaires nommés curatores viarum, qu’on faisoit tous les ans, & qui tiroient leurs quartiers au sort. Ils portoient la robe de pourpre, & avoient chacun deux licteurs qui marchoient devant eux dans le quartier dont ils avoient l’intendance. Ils avoient sous eux les esclaves commis aux incendies qui arrivoient. Leur charge consistoit à pourvoir à la tranquillité & à la netteté du quartier dont ils avoient soin, de prendre garde que les nouveaux bâtimens n’avançassent trop, & ne s’élevassent au-delà de la hauteur prescrite. Ils avoient pour se soulager deux dénonciateurs dans chaque quartier qui les avertissoient des désordres qui y survenoient, avec des compagnies du guet pour dissiper les assemblées nocturnes, & se saisir des vagabonds & des filoux.

Ces quatorze quartiers avoient 424 rues, dont il y en avoit trente-une de principales appellées grandes rues, ou royales, qui commençoient à cette colonne dorée qui étoit à l’entrée de la grande place ; & à