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nature, ou qui sont déclarées telles par la disposition de la loi.

Ainsi l’on ne prescrit jamais contre le droit naturel, ni contre le droit des gens primitif, ni contre les bonnes mœurs, & contre l’honnêteté publique ; une coutume abusive quelque ancienne qu’elle soit, ne peut se soutenir ; car l’abus ne se couvre jamais ; il en est de même de l’usure.

On ne prescrit pas non plus contre le bien public.

Le domaine du roi est de même imprescriptible.

L’obéissance que l’on doit à son souverain & à ses autres supérieurs est aussi imprescriptible.

La prescription n’a pas lieu entre le seigneur & son vassal ou censitaire, & dans la plûpart des coutumes le cens est imprescriptible ; mais un seigneur peut prescrire contre un autre seigneur.

Les droits de pure faculté, tels qu’un droit de passage, ne se perdent point par le non usage.

La faculté de racheter des rentes constituées à prix d’argent, ne se prescrit jamais par quelque laps de tems que ce soit.

Enfin on ne prescrit point contre la vérité des faits, ni contre son propre titre.

Outre les prescriptions dont nous avons parlé, il y en a encore nombre d’autres beaucoup plus courtes, & qui sont plutôt des fins de non recevoir, que des prescriptions proprement dites.

Telle est la prescription de vingt-quatre heures contre le retrayant qui n’a pas remboursé ou consigné dans les vingt-quatre heures de la sentence qui lui adjuge le retrait.

Telle est aussi la prescription de huitaine contre ceux qui n’ont pas formé leur opposition à une sentence.

Il y a une autre prescription de neuf jours en fait de vente de chevaux. Voyez Chevaux & Redhibition.

Une prescription de dix jours pour faire payer ou protester dans ce délai les lettres de change, voyez Change & Lettres.

Une prescription de quinze jours, faute d’agir en garantie dans ce tems contre les tireurs & endosseurs d’une lettre de change protestée.

Une prescription de vingt jours dans la coutume de Paris, art. 77. pour notifier le contrat au seigneur.

Une de quarante jours pour faire la foi & hommage, fournir l’aveu, intenter le retrait féodal, réclamer une épave.

Une de trois mois pour mettre à exécution les lettres de grace, pardon & remission.

Une de quatre mois pour l’insinuation des donations.

Une de six pour la publication des substitutions, pour se pourvoir par requête civile, pour faire demande du prix des marchandises énoncées en l’article 126 de la coutume de Paris, & en l’article 8 du titre I. de l’ordonnance du commerce.

Une prescription d’un an pour les demandes & actions énoncées en l’article 125 de la coutume de Paris, & en l’article 127 du titre de l’ordonnance du commerce, pour former complainte, pour exercer le retrait lignager, pour relever les fourches patibulaires du seigneur sans lettres, pour demander le payement de la dixme, pour intenter l’action d’injure, & pour faire usage des lettres de chancellerie.

Il y a une prescription de deux ans contre les procureurs, faute par eux d’avoir demandé leurs frais & salaires dans ce tems, à compter du jour qu’ils ont été révoqués, ou qu’ils ont cessé d’occuper.

La prescription de 3 ans a lieu, comme on l’a dit, pour les meubles, & en outre pour la peremption d’instance, & pour celle du compromis. Les domestiques ne peuvent demander que trois ans de leurs gages.

La prescription de cinq ans a lieu pour les fonds en Anjou & Maine ; c’est ce qu’on appelle le tenement de cinq ans ; elle a lieu pareillement pour les arrérages d’une rente constituée, pour l’accusation d’adultere, pour la plainte d’inofficiosité ; pour les fermages & loyers, quand on a été cinq ans après la fin du bail sans le demander. Les lettres & billets de change sont aussi réputés acquittés après cinq ans de cessation de poursuite. Un officier qui a joui paisiblement d’un droit pendant cinq ans, n’y peut plus être troublé par un autre. On ne peut après cinq ans réclamer contre ses vœux, ni purger la contumace. Les veuves & héritiers des avocats & procureurs ne peuvent après ce tems être recherchés pour les papiers qu’ils ont eu, soit que les procès soient jugés ou non.

Enfin il y a une prescription de six années contre les procureurs, lesquels dans les affaires non jugées ne peuvent demander leurs frais, salaires & vacations pour les procédures faites au-delà de six années.

Voyez au digeste les titres de usurpationibus & usucapionibus ; de diversis temporalibus præscript. & au cod. de usucapione transformandâ, & celui de præscriptione longi temporis ; aux institutes, de usucapionibus.

Voyez aussi les traités des prescriptions par Alciat, Hostiensis, Rogerius, Mugello, Barthole, Balbus, Tiraqueau, Caepola, Oldendorp.

Il en est aussi parlé dans Cujas, Dumoulin, Dargentré, Coquille, Bouchel, Jovet, Tournet, Papon, Despeisses, Henrys, Auzanet, &c. Voyez Possession, Interruption, Fin de non recevoir. (A)

PRÉSÉANCE. s. f. (Gram.) place d’honneur qu’on a droit d’occuper dans les compagnies.

Préséance des Souverains, (Cérémonial.) il n’est pas possible de régler dans l’indépendance de l’état de nature la préséance des princes & des peuples en corps : dans l’état civil la chose n’est guere plus aisée. L’antiquité de l’état, ou de la famille régnante, l’étendue & l’opulence des pays qui sont sous leur domination, leurs forces, leur puissance, leur souveraineté absolue, leurs titres magnifiques, &c. rien de tout cela ne fonde un droit parfait à la préséance ; il faut qu’on l’ait acquis par quelque traité, ou du moins par la concession tacite des princes ou des peuples avec lesquels on a à négocier.

On s’avisa dans le seizieme siecle de régler à Rome le rang des rois ; le roi de France eut le pas après l’empereur ; la Castille, l’Arragon, le Portugal, la Sicile, devoient alterner avec l’Angleterre. On décida que l’Ecosse, la Hongrie, la Navarre, Chypre, la Bohème, & la Pologne, viendroient ensuite. Le Dannemark & la Suede furent mises au dernier rang ; mais cet arrangement prétendu des préséances, n’aboutit qu’à causer de nouveaux démêlés entre les souverains. Les princes d’Italie se souleverent à l’occasion du titre de grand-duc de Toscane, que le pape Pie V. avoit donné à Cosme I. & dans la suite le duc de Ferrare lui disputa son rang. L’Espagne en fit de même à l’égard de la France ; en un mot, presque tous les rois ont voulu être égaux, tandis qu’aucun n’a jamais contesté le pas aux empereurs ; ils l’ont conservé en perdant leur puissance. (D. J.)

PRÉSENCE, s. f. (Gram.) terme relatif à l’existence, au lieu, & à d’autres circonstances du lieu, du tems, des choses, & des personnes. Vous venez ici fort à propos ; votre présence y étoit nécessaire.

Présence réelle de Jesus-Christ dans l’Eucharistie, dogme de foi parmi les Catholiques, qui croyent que dans ce sacrement en vertu des paroles de la consécration, le corps, le sang, l’ame, & la divinité de Jesus-Christ, sont réellement présens sous les especes ou apparences du pain & du vin.

Les Luthériens reconnoissent cette présence réelle ;