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leur inefficacité, à titre d’amulette ; on a cru, par exemple, que la pierre néphrétique portée dans une ceinture, calmoit les douleurs des reins ; & j’ai vu un homme de beaucoup d’esprit qui employoit ce remede, véritablement avec un léger degré de confiance. La langue de serpent est regardée comme très propre à faire sortir les dents des enfans, lorsqu’on la leur suspend au col. La pierre d’aigle passe pour faciliter l’accouchement, si les femmes la portent attachée à la cuisse, & pour agir même avec tant d’énergie, que si on n’a soin de la détacher d’abord après l’accouchement, elle entraine la matrice ; fait attesté par des observations rapportées par de très-graves auteurs de Medecine ; mais qui paroît si chimérique, que la plus sévere méthode du doute ne sauroit ce semble autoriser à discuter par de nouvelles expériences. (b)

Pierre infernale, (Chimie. Mat. med.) on nomme ainsi le sel formé par l’union de l’acide nitreux, & de l’argent dépouillé par la fusion de toute son eau de crystallisation. Voici comme on le prépare d’après Lémery, Cours de chimie.

Faites dissoudre dans une phiole telle quantité d’argent de coupelle qu’il vous plaira, avec deux ou trois fois autant d’esprit de nitre ; mettez votre phiole sur le feu de sable, & faites évaporer environ les deux tiers de l’humidité : renversez le restant tout chaud dans un bon creuset d’Allemagne assez grand, à cause des ébullitions qui se feront. (Une capsule de verre est préférable à un creuset, parce qu’une grande quantité de la matiere pénetre le creuset, & s’imbibe dedans ; & souvent passe à travers, sur-tout si c’est la premiere fois qu’on le fait servir à cette opération ; note de M. Baron.) Placez-le sur un petit feu, & l’y laissez jusqu’à ce que la matiere qui se sera beaucoup rarefiée, s’abaisse au fond du creuset : augmentez alors un peu le feu, & elle deviendra comme de l’huile ; versez-la dans une lingotiere un peu graissée & chauffée, elle se coagulera ; après quoi vous pourrez la garder dans une phiole bien bouchée. C’est un caustique qui dure toujours, pourvu qu’on ne le laisse pas exposé à l’air : on peut faire cette pierre avec un mélange de cuivre & d’argent ; mais elle ne se garde pas tant, parce que le cuivre étant fort poreux, l’air s’y introduit facilement, & la fond. Si vous avez employé une once d’argent, vous retirerez une once & cinq dragmes de pierre infernale.

On moule la pierre infernale en petits crayons pour l’usage.

Ce caustique n’attaque point la peau, mais il ronge très-promptement & très-efficacement les chairs découvertes, en les touchant seulement plus ou moins légerement. Les chirurgiens n’en emploient presque point d’autre aujourd’hui pour consumer les bords calleux des ulceres, ou les chairs qui poussent trop pendant le traitement des plaies : elle peut servir encore aussi-bien que les caustiques préparés avec le mercure, à détruire les chancres & autres excroissances vénériennes qui viennent aux parties de la génération de l’un & l’autre sexe, &c.

Les chirurgiens portent leur pierre à cautere montée sur un porte-crayon qui se visse dans un étui d’argent, pour la préserver de l’humidité de l’air qui l’attaque cependant assez médiocrement. (b)

Pierre a cautere, (Chimie, Mat. med.) on appelle ainsi l’alkali fixe du tartre, ou commun, rendu plus caustique par la chaux. Voyez Tartre & Chaux commune. Voici comme on la prépare, d’après la description de Lémery.

Mettez dans une grande terrine une partie de chaux vive, & deux parties de cendre gravelée ; versez dessus beaucoup d’eau chaude, & les ayant laisse tremper cinq ou six heures, faites-le un peu bouillir : passez ensuite ce qui sera clair, par un papier

gris, & le faites évaporer dans une bassine de cuivre, ou dans une terrine de grais : il vous restera un sel au fond, qu’il faut mettre dans un creuset sur le feu ; il se fondra & bouillira jusqu’à ce qu’il se soit fait évaporation de l’humidité qui étoit restée : quand vous verrez qu’il sera réduit au fond en forme d’huile, jettez-le dans une bassine, & le coupez en pointe, pendant qu’il sera encore chaud : mettez promptement ces caustiques dans une bouteille de verre sort que vous boucherez avec de la cire & de la vessie, car l’air les resoud facilement en liqueur : il faut encore observer de les mettre en un lieu bien sec pour les garder. Lémery, Cours de chimie.

Il est très-vraissemblable qu’on n’emploie par préférence les cendres gravelées, que parce qu’elles sont d’un moindre prix que le sel de tartre ; car il paroît (contre l’opinion, & malgré la théorie de M. Baron, Notes sur le cours de chimie de M. Lémery, que le tartre vitriolé qui se trouve dans les cendres gravelées, nuit à la perfection de la pierre à cautere, plutôt qu’elle n’y sert : car le tartre vitriolé n’est point caustique, & le tartre vitriolé ne dispose point la chaux à la causticité.

La pierre à cautere est le plus actif des caustiques employés dans la Chirurgie, puisqu’il attaque même la peau entiere, ce que ne font point les autres caustiques usités. Son usage chirurgical est d’être employée à établir ces ulceres ou égoûts artificiels connus sous le nom de cautere, voyez Cautere, Méd. & d’ouvrir des abscès. Voyez Absces.

Pierre d’azur, (Mat. méd.) lapis lazuli, elle a la vertu de purger par haut & par bas. Des auteurs la recommandent sort contre la mélancolie, la fievre quarte, l’apoplexie & l’épilepsie : Dioscoride & Galien lui reconnoissent une vertu corrosive avec un peu d’astriction. Il ne faut pas douter que la couleur bleue de cette pierre ne vienne de quelque partie de cuivre, d’où dépendent aussi ses vertus corrosive, purgative & émethique ; mais on demande pourquoi on fait entrer ce remede acre & violent purgatif dans la confection alkermès, qui est une composition cordiale & fortifiante.

Comme l’on a beaucoup de remedes plus sûrs pour produire les effets dont on vient de parler, on se sert rarement de cette pierre ; & à-présent, on n’a coutume de l’employer que dans la composition alkermes. Geoffroi, Mat. méd.

On est plus avancé aujourd’hui que du tems de M. Geoffroi, car on ne fait plus entrer la pierre d’azur dans la confection alkermes.

Pierre divine ou ophtalmique, (Pharmacie, Mat. méd.) prenez vitriol bleu, nitre & alun, de chacun trois onces ; mettez-les en poudre subtile, mêlez-les exactement & placez-les dans un matras, & les exposez à une chaleur simplement suffisante pour les faire fondre ; lorsque le mélange sera liquide, mêlez-y exactement un gros de camphre en poudre, & lorsque la masse sera figée par le refroidissement, cassez le matras, retirez-la, & gardez-la pour l’usage.

C’est ici un simple mélange de drogues. Le vitriol, l’alun & le nitre sont du genre des sels qui contiennent assez d’eau dans leur crystallisation pour être capables de la liquidité aqueuse par l’action d’une legere chaleur. Or dans cet état l’acide vitriolique n’agit point sur le nitre, & chacun de ces trois sels reste inalteré dans le mélange

Une liqueur appropriée, chargée d’une legere teinture de cette pierre, est un bon collyre. Voyez Collyre & Ophtalmique. (b)

Pierre médicamenteuse de Crollius, Pierre médicamenteuse de Lemery. Pierre admirable, (Pharmac. & Mat. méd.) on trouve dans presque toutes les pharmacopées, & les chimies médicinales sous le nom de pierre médicamenteuse, admirable, divine, des philoso-