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put, & pilos pedum & barbam universam. Is. vij. 20. En ce tems-là le Seigneur se servira du roi des Assyriens, comme d’un rasoir pour raser la tête, la barbe, & le poil des piés ; dimisisti pedes tuos omni transeunti ; vous vous êtes abandonné à tous les passans, Ezech. xiv. 25.

4°. Pié, signifie l’arrivée de quelqu’un. Quam speciosi pedes evangelisantium pacem. Is. lij. 7. Que c’est une chose agréable de voir arriver ceux qui annoncent la paix !

5°. Il se prend pour la conduite, pes meus stetit in directo, Ps. xv. 12. mes piés sont demeurés fermes dans le droit chemin.

6°. Il signifie un soutien, un appui : oculus fui cæco & pes claudo, Job. xxix. 15. Il éclaire l’aveugle & soutient le boiteux.

7°. Il désigne ce qui est fort cher. Si pes tuus scandalisat te, abscinde eum. Matth. xviij. 8. Si ton pié te fait tomber, coupe-le.

8°. Etre sous les piés de quelqu’un, marque l’asservissement ; omnia subjecisti sub pedibus ejus. Ps.viij. 8. Vous avez tout soumis à sa puissance.

9°. La trace d’un pié, signifie une très-petite quantité de terre. Neque enim dabo vobis de terrâ eorum, quantum potest unius pedis calcare vestigium. Deut. ij. 5.

10°. Mettre le pié dans un lieu, signifie en prendre possession. Locus quem calcaverit pes vester, vester erit. Deut. xj. 24. L’endroit où vous mettrez le pié, vous appartiendra.

11°. Parler du pié, c’est gesticuler du pié. Salomon dans les proverbes vj. 13. attribue ce langage à l’insensé. (D. J.)

Piés, le baisement des, (Hist. mod.) marque extérieure de déférence qu’on rend au seul pontife de Rome ; les panchemens de tête & de corps, les prosternemens, les génuflexions, enfin tous les témoignages frivoles de respect devinrent si communs en Europe dans le vij. & viij. siecles, qu’ils ne furent plus regardés comme le sont aujourd’hui nos révérences ; alors les pontifes de Rome s’attribuerent la nouvelle marque de respect qui leur est restée, celle du baisement des piés. Il est vrai que Charles, fils de Pepin, embrassa les piés du pape Etienne à S. Maurice en Valois ; mais ce même pape Etienne venant en France, s’étoit prosterné de son côté aux piés de Pepin, pere de Charles. On croît généralement que le pape Adrien I. qui prétendoit être au rang des princes, quoiqu’il reconnût toujours l’empereur grec pour son souverain, établit le premier sur la fin du viij. siecle, que tout le monde lui baisât les piés en paroissant devant lui. Le clergé y acquiesça sans peine par retour sur lui-même ; enfin les potentats & les rois se soumirent depuis, comme les autres, à cette étiquette, qui rendoit la religion romaine plus vénérable aux peuples. (D. J.)

Pié, en poésie, en latin pes & mieux metrum, du grec μέτρον. Alliance ou accord de plusieurs syllabes ; on l’appelle pié par analogie & proportion, parce que comme les hommes se servent des piés pour marcher, de même aussi les vers semblent avoir quelqu’espece de piés qui les soutiennent & leur donnent de la cadence.

On compte ordinairement dans la poésie grecque & latine vingt-huit piés différens, dont les uns sont simples & les autres composés.

Il y a douze piés simples ; savoir, quatre de deux syllabes & huit de troîs syllabes. Les piés simples de deux syllabes sont le pyrrichée ou pyrrique, le spondée, l’iambe & le trochée. Les piés simples de trois syllabes sont le dactyle, l’anapeste, le molosse, le tribrache, l’amphibrache, l’amphimacre, le bacche, l’antibacche. Voyez tous ces mots à leur article.

On compte seize piés composés, qui tous ont quatre syllabes ; savoir, le dispondée ou double spon-

dée, le procéleusmatique, le double trochée, le double iambe, l’antipaste, le choriambe, le grand ionique, le petit ionique, le péon ou péan, qui est de quatre especes, & l’épitrite, qui se diversifie aussi en quatre manieres. Voyez Dispondée, Antipaste, &c.

Pié & mesure dans la poésie latine & grecque sont des termes synonymes.

Un auteur moderne explique aussi fort nettement l’origine des piés dans l’ancienne poésie. On ne s’avisa pas tout d’un coup, dit-il, de faire des vers ; ils ne vinrent qu’après le chant. Quelqu’un ayant chanté des paroles, & se trouvant satisfait du chant, voulut porter le même air sur d’autres paroles ; pour cela, il fut obligé de régler les paroles du second couplet sur celles du premier. Ainsi la premiere strophe de la premiere ode de Pindare se trouvant de dix-sept vers, dont quelques-uns de huit syllabes, quelques-uns de six, de sept, d’onze ; il fallut que dans la seconde, qui figuroit avec la premiere, il y eût la même quotité de syllabes & de vers, & dans le même ordre.

On observa ensuite, que le chant s’adaptoit beaucoup mieux aux paroles, quand les breves & les longues se trouvoient placées en même ordre dans chaque strophe pour répondre exactement aux mêmes tenues des tons. En conséquence on travailla à donner une durée fixe à chaque syllabe en la déclarant breve ou longue, après quoi l’on forma ce qu’on appella des piés, c’est-à-dire, de petits espaces tout mesurés, qui fussent au vers ce que le vers est à la strophe. Cours de Belles-lettres, tom. I.

Le nom de pié ne convient qu’à la poésie des anciens ; dans les langues modernes on mesure les vers par le nombre de syllabes. Ainsi nous appellons vers de douze syllabes nos grands vers, ou vers alexandrins ; & nous en avons de dix, de huit, de six, de quatre, de deux syllabes, & d’autres irréguliers d’un nombre impair de syllabes. Voyez Vers & Versification.

PIÉ-CORNIER, terme des Eaux & Forêts ; on appelle en style des eaux & forêts piés-corniers, les gros arbres qui sont dans les encognures des ventes qui se font dans les forêts, & qui se marquent par le garde-marteau.

Il est dit dans l’article 9. du titre de l’assiette, baillivage & martelage, &c. que les arbres de lisieres & de parois seront marqués du marteau du roi, & celui de l’arpenteur sur une face, à la difference des piés-corniers, qui le seront sur chaque face qui regardera la vente. Lorsque l’on vend quelques parties des forêts du roi, l’espace vendu est enfermé dans des lignes, que l’on tire suivant la situation des lieux. Ces lignes sont appellées parois, & les arbres que l’on laisse à côté ou au bout de la ligne entre deux piés-corniers, sont arbres de paroi ou de lisiere. Exemple.

Pié-cornier. Paroi.
Paroi.
Pié-cornier
Paroi. Paroi.
Pié-cornier Pié-cornier

On voit par cette figure, que les piés-corniers sont les arbres laissés & marqués aux extrémités de la vente. On voit encore qu’entre deux piés-corniers il y a une parois ou deux, eu égard aux distances des piés-corniers. Les piés-corniers doivent être marqués du marteau du maître, de celui du garde-marteau, & de celui du mesureur. Les places taillées sur les piés-corniers sont appellées miroirs, parce qu’elles sont tournées pour regarder & mirer la droite ligne qui conduit d’un pié-cornier à l’autre, & les côtés où les miroirs sont faits sont nommés faces.

La marque du maître est au-dessus des autres, celle du garde-marteau est ensuite, & en bas de l’arbre. Voyez sur cette matiere Rousseau sur les ordonnances