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bée, elle influe à son tour sur cette même constitution. Les vents qui ont passé sur des montagnes couvertes de neige, refroidissent toujours les plaines voisines où ils se font sentir : c’est la raison pour laquelle certains pays sont plus froids ou moins chauds qu’ils ne devroient être par leur situation sur notre globe. Les neiges qui couvrent perpétuellement les sommets des plus hautes montagnes de la chaîne des Cordillieres, moderent beaucoup les chaleurs qu’on ressent au Pérou, qui sans cela pourroient être excessives. Il en est de même de plusieurs autres pays situés dans la zone torride, ou, hors de cette zone, dans le voisinage des tropiques. Par la même raison certains pays, comme l’Arménie, sont très-froids, quoique sous la latitude de 40 degrés. M. Arbuthnot, dans son Essai des effets de l’air sur le corps humain, remarque que la neige des Alpes influe sur le tems qu’il fait en Angleterre. On observe dans le bas-Languedoc que lorsque les montagnes d’Auvergne & de Dauphiné, dont les premieres sont au nord, & les autres à l’est de cette province, sont également couvertes de neige, le vent de sud ne souffle presque jamais ; en sorte qu’on jouit au milieu de l’hiver du tems le plus serein. La raison en est que la froideur de la neige condensant l’air qui est au-tour de ces montagnes, cet air devenu plus pesant tend vers le sud, où il se raréfie, & fait par conséquent un vent de nord. La même chose arrive par la même raison quand les montagnes d’Auvergne sont plus chargées de neige que celles de Dauphiné ; mais si ces dernieres sont couvertes de neige pendant que celles d’Auvergne en sont déchargées, le vent du sud pourra souffler avec violence, l’air qui est au nord lui résistant alors trop foiblement. Physique de Regis, liv. V. chap. xj.

La neige se formant dans l’air, & n’étant que de l’eau congelée, doit être mise au nombre des météores aqueux. Voyez Météore.

Tout le monde sait que la neige en se fondant fournit une grande quantité d’eau aux ruisseaux & aux fleuves, & que sa fonte trop subite cause souvent des inondations considérables.

Un très-grand nombre de plantes se conservent ensevelies dans la neige pendant l’hiver, & on les voit pousser au printems avec rapidité, pourvu que la neige qui les couvroit, se soit fondue lentement & peu-à-peu ; car en fondant subitement, elle pourroit détruire l’organisation & le tissu des végétaux. Rien n’est sur-tout plus pernicieux aux arbres & aux plantes qu’une neige, qui séjournant sur la terre, se fond en partie pendant le jour pour se geler de nouveau la nuit suivante. C’est ce qui fit mourir dans plusieurs contrées du bas-Languedoc & de la Provence quantité d’oliviers, de figuiers & d’autres arbres fruitiers pendant l’hiver de 1755, où l’on vit se renouveller en partie ce qu’on avoit éprouvé en 1709.

La neige peut être employée au défaut de la glace, dans la préparation d’une infinité de boissons rafraîchissantes nécessaires pour les délices de la vie, que la Philosophie même ne doit pas toujours négliger. Ces mêmes boissons sont d’usage en Médecine. Je ne dirai rien ici de plusieurs vertus attribuées à la neige assez gratuitement, non plus que de la propriété qu’elle a de guérir les membres gelés sur lesquels elle est appliquée. J’ai parlé ailleurs de cette propriété, & j’ai fait voir que la neige ne faisoit en pareil cas que ce qu’auroit fait de l’eau médiocrement froide. Voyez Gelée & Glace. Cet article est de M. de Ratte, secrétaire perpétuel de la société royale des Sciences de Montpellier.

Neige, (Mat. méd. & Diete.) c’est une des matieres que l’on emploie pour appliquer un degré de froid considérable, le froid glacial aux corps hu-

mains, ou à différentes substances destinées à fournir

aux hommes des alimens & des boissons, ou des remedes. Les considérations qu’on a fait sur la glace, dans ce point de vue, conviennent pareillement & très-exactement à la neige. (Voyez Glace, Médecine.) Nous remarquerons seulement ici que c’est la neige spécialement que le peuple du nord emploie, d’après un très-ancien usage de leur pays, pour rappeller la chaleur & la vie dans les membres gelés. C’est communément sous forme de frictions que la neige s’emploie dans ces cas ; mais la simple application peut suffire. Agricola (Chirurgiæ parer. tract. 5.) assure que les engelures du nez ou des oreilles sont guéries dans un quart d’heure par l’application de la neige. Barkllei rapporte dans son Euphormion, part IV. chap. viij. qu’un roi d’Angleterre fut guéri en très-peu de tems d’une engelure au doigt, l’ayant plongé dans la neige par le conseil de certains habitans de Norvege.

Il y a dans l’art un usage fort bizarre qui paroît avoir été peu suivi, & qui enfin paroît entierement abandonné avec raison ; c’est d’éteindre le sentiment par l’application de la neige dans une partie sur laquelle on est sur le point d’exécuter une opération chirurgicale ; cependant ce moyen singulier pourroit absolument être employé peut-être avec avantage dans quelque cas singulier. (b)

Neige, eau de, (Chimie.) Voyez à l’article Eau, Chimie.

Neige, Oiseau de, (Hist. nat.) c’est un oiseau semblable à la linotte par la figure, le bec & la couleur, qui se trouve à Spitzberg. Son nom lui vient de ce qu’il ne se voit jamais que sur la neige glacée. Il est de la grosseur d’un moineau. Il a le bec court & pointu, & la tête aussi grosse que le cou. Ses jambes sont celles de la linotte, mais ses piés sont divisés en trois doigts armés d’ongles longs & crochus : il est blanc depuis la tête jusqu’à la queue, ainsi que sous le ventre ; les plumes du dos & des aîles sont grises. Ces oiseaux sont si familiers qu’ils se laissent prendre à la main ; ce qui est produit par la faim qu’ils éprouvent dans ce climat glacé. Leur chair est d’un assez bon goût.

Neige ou Nage, terme de riviere, espece d’oreillons qui se fabriquent aux deux extrémités d’un train, qui servent à porter les avirons pour nager, & qui sont faits d’un fort chantier chacun.

Neige, s. f. (terme de Confiseur.) composition de sucre & de jus de certains fruits, comme de framboise, de groseille ou de cerise qu’on fait glacer, & qu’on sert sur la table.

Neige, (Bout. Passement.) petite dentelle faite au métier, & qui est de peu de valeur.

NEILLE, s. f. terme de Tonnelier, qui signifie du chanvre ou de la ficelle décordée dont ces ouvriers se servent pour étouper une piece de vin qui suinte par le fonds à l’endroit du jable. Pour cet effet ils enfoncent ce chanvre dans le jable, à l’endroit par où le vin sort, avec un petit instrument de fer appellé le clouet.

NEISCHABOUR, (Géog.) Voyez Nichabour.

NEISS ou NEISSE, (Géogr.) ville d’Allemagne dans la basse Silésie, proche d’une riviere dont elle a pris le nom, & arrosée d’une autre riviere nommée Biélan. Elle est la résidence ordinaire de l’évêque de Breflau, & ne le cede point à Lignitz. Elle fut bombardée par le roi de Prusse en 1741. Sa situation est à 14 lieues S. E. de Breslau, 11 N. E. de Glatz. Long. 36. 10. lat. 50. 32.

La riviere de Neiss prend sa source dans la montagne du côté de Glatz, & va se perdre dans l’Oder à quelque distance de Bricg.

NEITH, (Mythol. égypt.) divinité que les Egyp-