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dans aucune discussion théorique sur l’enchaînement qu’il y a entre ces signes & les choses signifiées.

Suivant une observation généralement connue, l’extrème finesse de l’ouïe est un très-mauvais signe ; la dureté d’oreille est beaucoup moins défavorable, il y a même bien des cas où elle est d’un heureux présage, quoiqu’elle soit poussée au degré de surdité. Ce n’est que dans le cas de grande foiblesse & d’affaissement que la diminution ou la perte d’ouïe est un signe mortel, Hippocr. aph. 73. lib. VII. la dépravation de l’ouïe a lieu lorsque l’oreille entend des sons autrement qu’ils ne sont produits, & dans le tems même où il n’y en a point d’excité par les corps extérieurs : c’est ce qui arrive dans le tintemant d’oreille & le bourdonnement ; voyez ces mots, & dans quelques especes de délire où le malade croit entendre des personnes qui parlent, ou le son des instrumens, sans que pourtant ces objets soient réels ; ce vice de l’ouïe peut alors être regardé comme un signe de délire présent ou prochainement futur.

Le bourdonnement & le tintement d’oreille sont dans les maladies aiguës des signes avant-coureurs de la mort. Coac. prænot. cap. v. n°. 5. Waldscrichd a remarqué que ces mêmes signes étoient très-fâcheux dans les nouvelles accouchées. Les tintemens d’oreille joints à des douleurs de tête, vertige, engourdissement des mains, lenteur de la voix sans fievre, font craindre, suivant cet auteur & Hippocrate, la paralysie, ou l’épilepsie, ou la perte de mémoire ; les ébranlemens de la tête avec tintement d’oreille annoncent une hémorrhagie par le nez, ou l’éruption des regles, sur-tout s’il y a une chaleur extraordinaire répandue le long de l’épine du dos, ibid. cap. iv. n°. 8. on doit s’attendre au délire & à l’hémorrhagie du nez lorsque ce tintement se rencontre avec l’obscurcissement de la vûe & une pesanteur à la racine du nez, ibid. cap. v. n°. 6. En général, remarque Hippocrate, de insom. cap. xij. 11. la lésion de l’ouïe, de même que celle de la vûe, dénotent l’affection de la tête. (m)

Ouïes, s. f. (Musiq.) les ouvriers nomment ainsi les deux ouvertures qui sont sur la table des violes, & de quelques autres instrumens de Musique. Ces ouvertures, qu’on pourroit appeller écheia, ont différentes figures, & ce sont les endroits par où sort le son harmonieux ; mais quand il s’agit de poche de violon, de basse de violon, on appelle ordinairement leurs ouvertures des effes, parce qu’elles ont la figure d’une f. (D. J.)

OVILIA ou SEPTA, (Hist. anc.) c’étoit un endroit du champ de Mars dans l’ancienne Rome, qui fut d’abord fermé & entouré de barrieres comme un parc de brebis, d’où lui est venu le nom d’Ovilia. Dans la suite, cet endroit fut environné de murailles de marbre, & l’on y pratiqua des galeries où l’on se promenoit ; on y plaça aussi un tribunal d’où l’on rendoit la justice.

C’étoit dans l’enceinte de ce lieu que le peuple donnoit les suffrages pour l’élection des magistrats. Voyez Champ de Mars.

On montoit à l’Ovilia non par des degrés, mais par des especes de ponts destinés à cet usage. Chaque curie, chaque tribu, chaque centurie (selon que l’assemblée étoit par centurie, par tribus ou par curies), avoit son pont particulier. De-là vint l’espece de proverbe, de ponte dejiciendus, pour dire qu’une personne devoit être privée du droit de suffrage. Voyez Comitia.

OUILLE, oleo ou oglio, (Cuisine.) un mets délicieux, ou ragoût composé d’une grande variété d’ingrédiens, & que l’on sert principalement sur les bonnes tables en Espagne.

Il y a différentes manieres de faire des ouilles ;

mais pour donner une idée de cet assemblage étrange, nous insérerons ici la recette qui vient d’un maître qui a fait ses preuves.

Prenez de la culote & des langues de bœufs bouillies & séchées, avec des saucisses de Boulogne ; faites bouillir le tout ensemble pendant deux heures, & pour-lors ajoutez-y du mouton, du porc frais, de la venaison & du lard, comme aussi des navets, des carotes, des oignons, des choux, de la bourache, de la chicorée blanche, des soucis, de l’oseille & des épinars ; ensuite les épices, comme du safran, des clous-de-girofle, du macis & de la noix de muscade, &c.

Cela fait, mettez dans une autre marmite un dindon ou une oie, avec des chapons, faisans, butors, canards sauvages, perdrix, sarcelles, bisets, becasses, cailles & alouettes, & faites-les bouillir dans de l’eau avec du sel. Dans un troisieme vaisseau, préparez une sauce de vin blanc, de consommé, de beurre, de culs d’artichaux, de marrons, de choux-fleurs, de chapelure de pain, de moëlle, de jaunes d’œufs, de macis & de safran : enfin dressez l’ouille dans un plat proportionné à la quantité des choses dont elle est composée : tirez d’abord de la marmite le bœuf & le veau, ensuite la venaison, le mouton, les langues & les saucisses ; dispersez par-tout les racines & légumes ; arrangez autour le plus gros gibier, entremêlez du petit, & versez votre sauce sur le tout.

OUJON, (Géog.) petite ville d’Asie dans la Perse, selon Tavernier, qui lui donne 61d. 35′. de longit. & 32d. 24′. de latit. (D. J.)

OVIPARE, adj. terme d’Histoire naturelle, que l’on applique aux animaux qui se multiplient en faisant des œufs comme les oiseaux, insectes, &c. Voyez Œuf, Insecte, Animal, &c.

On oppose ce genre d’animaux à ceux qui produisent leurs petits tous vivans, & que l’on appelle vivipare, comme l’homme, les quadrupedes, &c. Voyez Génération.

Ces animaux sont ceux qui pondent des œufs, lesquels ayant été couvés par la mere, ou mis en fermentation par quelque autre principe de chaleur, produisent enfin des petits : ceux-ci se mettent eux-mêmes au monde, après avoir consumé l’humidité ou l’humeur dont ils étoient environnés, & après avoir acquis un certain volume & des forces suffisantes pour rompre la coque de l’œuf.

Ce genre, outre les oiseaux, renferme diverses especes d’animaux terrestres, comme les serpens, lésards, tortues, cancres, écrevisses, &c. Voyez Ovaire.

OUI-POU, (Diete.) c’est le nom que les habitans sauvages du Brésil donnent à une espece de farine fort nourrissante, qu’ils font avec la racine d’épi & avec celle de manioc. On fait sécher ces racines au feu, après quoi on les ratisse avec des cailloux tranchans, on fait cuire ces raclures dans un pot avec de l’eau jusqu’à ce que le mélange s’épaississe ; lorsqu’il est refroidi, son goût est assez semblable à celui du pain blanc de froment. En mêlant cette farine avec du jus de viande, on fait un mets qui ressemble à du ris bouilli. Ces mêmes racines pilées lorsqu’elles sont fraîches donnent un jus blanc comme du lait, qui, exposé au soleil, se coagule comme du fromage, & qui cuit au feu fait un aliment assez agréable. Voyez Cassave.

OUIR, v. act. (Gram.) entendre, ouir la messe. Assigné pour être oui, ouir à confesse.

OVISSA, (Hist. mod. culte.) c’est le nom sous lequel les habitans du royaume de Benin en Afrique désignent l’Etre suprème. Ils ont, suivant le rapport des voyageurs, des idées assez justes de la divinité, qu’ils regardent comme un être tout-puissant, qui