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Fabrice de Hilden fait mention d’une caroncule de cette nature, qu’il a extirpée en partie. Les racines étoient trop profondes pour pouvoir être saisies avec des pincettes, il se servit de caustiques portés avec la plus grande circonspection au moyen d’une bougie, & parvint à détruire le principe du mal.

Les corps étrangers qui s’insinuent dans le conduit de l’oreille y causent quelquefois des douleurs extraordinaires, qui excitent même le délire & des convulsions. Le même Fabrice de Hilden a tiré, au bout de huit ans, une boule de verre qui avoit été la cause de symptômes très formidables. Il se servit d’une curette, après avoir coulé de l’huile dans l’oreille pour graisser le passage. On pourroit se servir de tire-fonds pour l’extraction de corps étrangers qui en permettroient l’usage. Il ne faut point employer des pincettes ni d’autres instrumens contre les insectes qui sont dans les oreilles : on les fait avancer vers la membrane du tambour, où ils excitent par le chatouillement des douleurs excessives. Il est plus convenable d’injecter de l’huile ou de l’esprit-de-vin dans l’oreille pour faire mourir l’animal. On le retire après si l’injection ne le fait pas sortir.

Bien des gens sont sourds par une cause toute naturelle : c’est la réplétion du conduit auditif par l’humeur cérumineuse qu’on y a laissé accumuler, & qui s’y est endurcie. L’huile d’amandes ameres tiede fond peu à-peu cette matiere, & on la détache avec une curette des parois du conduit. La plûpart des cures de surdité faites par le moyen des injections, n’ont été que l’effet de la désopilation du conduit, & de l’extraction de la matiere cérumineuse, qui semble quelquefois pétrifiée.

On injecte dans l’oreille des liqueurs anodynes, mondifiantes, résolutives, détersives, &c. Pour remplir différentes indications dans les ulcérations de l’oreille, avec ou sans carie, nous parlerons des injections par la trompe d’Eustache, à la suite du mot anatomique Trompe.

Nous ne ferons point mention de la cautérisation du cartilage antifrage de l’oreille contre la douleur des dents, parce que c’est un remede très-infidelle, qui peut bien dissiper pour un tems très-court l’odontalgie, mais qui ne peut absolument être curatif. Voyez Odontalgie.

Nous renvoyonsl’explication des instrumens acoustiques au mot Surdité. (Y)

Oreille, (Seméiotique.) Les signes que les oreilles peuvent fournir, se tirent ou de l’état extérieur de ces parties, ou des phénomenes relatifs à leur usage, c’est-à-dire, à l’ouïe : nous allons détailler les premiers, les autres seront exposés aux articles Ouïe & Surdité. Les oreilles froides, transparentes & resserrées, annoncent une mort prochaine ; Hippocr. aphor. 14. lib. VIII. L’inversion des lobes est aussi un mauvais signe ; progn. lib. I. n°. 3. Tel est l’état des oreilles dans cette funeste altération du visage, qu’on appelle face hippocratique. Une douleur opiniâtre d’oreille avec une fievre aiguë & quelque autre signe peu favorable, indique la mort dans sept jours pour les jeunes gens, & même plutôt s’ils sont dans le délire, à moins qu’il ne sorte beaucoup du pus par les oreilles, ou du sang par le nez, ou qu’il ne paroisse quelque bon signe : les vieillards dans qui ces accidens se rencontrent, n’ont pas à craindre une mort si assurée & si prochaine, soit parce que ces douleurs leur sont plus familieres, comme Hippocrate le remarque ailleurs, soit parce que les oreilles leur suppurent plutôt & qu’ils délirent moins ; cependant plusieurs éprouvent en conséquence des rechûtes auxquelles ils succombent ; coac. prænot. cap. v. n°. 1 & 11. Les rougeurs qui surviennent aux douleurs d’oreille pendant les fievres, dénotent une érésipelle future au visage, ou quelquefois elles préce-

dent des convulsions avec exsolution & interception

de voix, n°. 12. Les tumeurs aux oreilles, à la suite des excrétions fétides, paroissant trop tard, avec une fievre aiguë & tension des hypocondres, sont un signe mortel ; celles qui viennent dans de légeres paralysies, sont aussi mauvaises : s’il en survient dans le cours des maladies chroniques qui ne suppurent pas, on doit s’attendre à la mort du malade ; il arrive souvent alors que le ventre se lâche ; les douleurs de tête n’accompagnent elles pas la formation des abscès à l’oreille ? les malades dans ce cas ne suent-ils pas par les parties supérieures ? n’ont-ils pas par-dessus des frissons ? le sommeil ne se joint-il pas au dévoiement ? les urines ne sont-elles pas aqueuses, variées, fétides, remplies de nuages blanchâtres ? coac. prænot. n°. 13, 15. Toutes ces questions qu’Hippocrate paroît faire, & qu’il ne décide pas, sont autant de faits qu’il a vû arriver quelquefois, mais qui ont besoin de nouvelles observations pour être décidées & pour avoir la force d’aphorismes.

Si ces abscès, ou ces tumeurs suppurées qui viennent aux oreilles dans les maladies longues, ne fournissent pas un pus légitime, bien blanc, & entierement dépourvû d’odeur, la mort est assurée & surtout dans les femmes. Ces abscès sont plus familiers dans les maladies aiguës & dans les fievres ardentes ; mais si, lorsqu’ils paroissent, la maladie ne cesse pas, s’ils ne viennent pas tout de suite à maturation, ou s’il n’y a point d’hémorrhagie du nez, ou si les urines ne contiennent pas un sédiment épais, le malade est dans un danger pressant, la plûpart de ces tumeurs s’affaissent ; cependant, pour régler son pronostic, il faut examiner si la maladie augmente ou diminue. Pendant que ces abscès aux oreilles persistent, l’excrétion des urines est mauvaise, & le frisson qui survient est très-dangereux ; la toux qui est accompagnée d’expectoration, sur venant à ces abscès, les dissipe plus favorablement. Id. ibid. n°. 16, 19. (m)

Oreille d’ane, (Botan.) nom vulgaire de la grande consoude, voyez Consoude, (Botan.)

Oreille de judas, (Botan.) espece de champignon, nommé par Tournefort agaricus auriculoe forma, I. R. H. & représenté par Micheli, tab. LXVI. fig. premiere, est une substance fongueuse, qui croît au-bas du tronc des vieux sureaux. Cette substance est unie & n’est percée d’aucun trou. Elle est spongieuse, coriace, membraneuse, repliée comme une oreille ; blanchâtre, grise en-dessous, noirâtre en-dessus, sans odeur, d’un goût de terre, & insipide ; elle est portée sur une queue très courte, ou plutôt elle n’en a point du tout ; mais elle est attachée à la souche de l’arbre. Quelquefois ce champignon est unique, quelquefois il est double. On lui donne, comme aux autres champignons, des qualités astringentes & dessicatives. (D. J.)

Oreille de lievre, (Botan.) par les Botanistes, bupleuron ; voyez Perce-feuille, (Botan.)

Oreille d’ours, (Hist. nat. Botan.) auricula ursi, genre de plante à fleur monopétale, en forme d’entonnoir profondément découpée. Le pistil sort du calice, il est attaché comme un clou à la partie inférieure de la fleur, & il devient dans la suite un fruit rond & enveloppé en partie par le calice de la fleur. Ce fruit s’ouvre par la pointe, & renferme plusieurs semences attachées à un placenta. Tournefort, inst. rei herb. Voyez Plante. (I)

Ce genre de plante se nomme en anglois comme en françois bear’s-ear. Tournefort en compte vingt-sept especes qui produisent des variétés sans fin ; la plus commune auricula ursi, flore luteo. I. R. H. 120. pousse de sa racine de grandes feuilles, polies, grasses, tantôt dentelées, tantôt entieres, d’un goût