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poésie pittoresque. Un petit nombre des personnages sans nombre dont il est rempli, paroît être attentif au miracle de la conversion de l’eau en vin, qui fait le sujet principal ; & personne n’en est touché autant qu’il le faudroit. Paul Véronèse introduit parmi les conviés des religieux bénédictins du couvent pour lequel il travaille. Enfin, ses personnages sont habillés de caprice ; & même il y contredit ce que nous savons positivement des mœurs & des usages du peuple dans lequel il choisit ses acteurs.

Comme les parties d’un tableau sont toujours placées l’une à côté de l’autre, & qu’on en voit l’ensemble du même coup d’œil, les défauts qui sont dans l’ordonnance nuisent beaucoup à l’effet de ses beautés. Du Bos, réflexion sur la Peinture. (D. J.)

Ordonnance, les Artificiers appellent ainsi l’intervalle uniforme du tems qu’on doit laisser entre le jeu des pots-à-feu sur les théâtres d’artifices, ce qui s’exécute par l’égalité de longueur & vivacité des porte-feux ou des étoupilles.

ORDONNÉE, s. f. (Géom.) c’est le nom qu’on donne aux lignes tirées d’un point de la circonférence d’une courbe à une ligne droite, prise dans le plan de cette courbe, & qu’on prend pour l’axe, ou pour la ligne des abscisses. Il est essentiel aux ordonnées d’être paralleles entr’elles. On les appelle en latin ordinatim applicatæ ; telles sont les lignes EM, EM, &c. Pl. coniq. fig. 26.

Quand les ordonnées sont égales de part & d’autre de l’axe, on prend quelquefois la partie comprise entre l’axe & la courbe pour demi-ordonnée, & la somme des deux lignes pour l’ordonnée entiere. On appelle aussi quelquefois ordonnées, des lignes qui partent d’un point donné, & qui se terminent à une courbe : telles sont (fig. 39. de la Géométrie) les lignes CM, CM, &c. terminées à la spirale CMA, & partant du centre C du cercle APp. Voyez Spirale. Voyez aussi Abscisse & Coordonnés.

Dans une courbe du second genre, si on tire deux lignes paralleles, qui rencontrent la courbe en trois points & qu’une ligne droite coupe chacune de ces paralleles, de maniere que la somme des deux parties terminées à la courbe d’un côté de la sécante soit égale à l’autre partie terminée à la courbe de l’autre côté, cette ligne droite coupera de la même maniere toutes les autres lignes, qu’on pourra tirer parallelement aux deux premieres, c’est-à-dire, de maniere que la somme des deux parties prises d’un côté de la sécante sera toujours égale à l’autre partie prise de l’autre côté. Voyez Courbe.

Il n’est pas essentiel aux ordonnées d’être perpendiculaires à l’axe, elles peuvent faire avec l’axe un angle quelconque, pourvu que cet angle soit toujours le même ; les ordonnées s’appellent aussi appliquées. Voyez Appliquée.

Ordonnée se prend aussi adjectivement.

Raison ou proportion ordonnée, est une proportion qui résulte de deux ou de plusieurs autres proportions, & qui est telle que l’antécédent du premier rapport de la premiere proportion, est au conséquent du premier rapport de la seconde, comme l’antécédent du second rapport de la premiere proportion est au conséquent du second rapport de la seconde, par exemple, soit a : bc . d. b : ed . g. on aura en proportion ou raison ordonnée a : ec . g.

Equation ordonnée est une équation où l’inconnue monte à plusieurs dimensions, & dont les termes sont arrangés de telle sorte, que le terme où l’inconnue monte à la plus haute puissance soit le premier, qu’ensuite le terme où l’inconnue monte à la puissance immédiatement inférieure, soit le second, &c. Par exemple, x3 + axx + bx + c = 0 est une équation ordonnée du 3°. degré, parce que le terme

x3x monte à la plus haute puissance est le premier, que ce terme où x monte à la seconde puissance, &c. Voyez Equation. (O)

ORDONNER, v. act. (Gram.) ce verbe a plusieurs acceptions diverses. Il commande, il enjoint, il prescrit. Le parlement a ordonné cette année 1761, que les jésuites fermeroient leurs noviciats, leurs colléges, leurs congrégations, jusqu’à ce qu’ils se fussent purgés devant sa majesté du soupçon de la doctrine sacrilege de monarchomachie, qu’ils eussent abjuré la morale abominable de leurs casuistes, & qu’ils eussent reformé leurs constitutions sur un plan plus conforme à nos lois, à la tranquillité publique, à la sureté de nos rois, & au bon ordre de la société. Un médecin ordonne une saignée, de la diette. Un testateur ordonne à l’exécuteur de ses dernieres volontés telle ou telle chose. Un évêque ordonne des prêtres. On ordonne aux subalternes cent écus d’appointement par mois. On ordonne une troupe, un repas, des peines ; le proverbe dit, charité bien ordonnée commence par soi-même. La générosité dit, au contraire, charité bien ordonnée commence par les autres.

ORDOVICES, les (Géog. anc.) anciens peuples de l’île d’Albion, que Ptolomée, liv. II. ch. iij. met sur la côte occidentale, entre les Brigantes au nord, & les Cornavi à l’orient. Le P. Briet explique le pays des Ordovices par les comtés de Flint, de Denbigh, de Caernaervan, de Merioneth & de Montgomeri, toutes contrées du pays de Galles. Ce peuple au reste faisoit partie de la seconde Bretagne. (D. J.)

ORDRE, s. m. (Métaph.) la notion métaphysique de l’ordre consiste dans le rapport ou la ressemblance qu’il y a, soit dans l’arrangement de plusieurs choses coexistentes, soit dans la suite de plusieurs choses successives. Comment prouveroit-on, par exemple, qu’Euclide a mis de l’ordre dans les élemens de Géométrie ? Il suffit de montrer qu’il a toujours fait précéder ce dont l’intelligence est nécessaire, pour comprendre ce qui suit. Cette regle constante ayant déterminé la place de chaque définition & de chaque proposition, il en résulte une ressemblance entre la maniere dont ces définitions & ces propositions coexistent, & se succedent l’une à l’autre.

Tout ordre détermine donc la place de chacune des choses qu’il comprend, & la maniere dont cette place est déterminée, comprend la raison pourquoi telle place est assignée à chaque chose. Que l’ordre d’une bibliothéque soit chronologique, c’est-à-dire, que les livres se suivent conformément à la date de leur édition, aussi-tôt chacun a sa place marquée, & la raison de la place de l’un, contient celle de la place de l’autre.

Cette raison énoncée par une proposition s’appelle regle. Quand la raison suffisante d’un certain ordre est simple, la regle est unique ; quand elle peut se résoudre en d’autres, il en résulte pluralité de régles à observer. Si je me contente de ranger mes livres suivant leurs formes, cette regle unique dispose de la place de tous les volumes. Mais si je veux avoir égard aux formes, aux reliures, aux matieres, à l’ordre des tems, voilà plusieurs regles qui concourent à déterminer la place de chaque livre. Dans ce dernier cas l’observation des regles les plus importantes doit préceder celle des moins considérables. Les régles qui doivent être observées ensemble, ne sauroient être en contradiction, parce qu’il ne sauroit y avoir deux raisons suffisantes opposées d’une même détermination, qui soient de la même force. Il peut bien y avoir des contrariétés de regles, ou collisions qui produisent les exceptions ; mais dans ce cas, on sent toujours qu’une regle est plus étendue & plus forte que l’autre. Les regles ne doivent