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solue par Clotaire, par ses princes ou juges, c’est-à-dire par trente-quatre évêques, trente-quatre ducs, soixante-douze comtes, & même par tout le peuple.

La loi Bavaroise, dressée par le roi Thiery, revûe par Childebert, par Clotaire, & en dernier lieu par Dagobert, porte qu’elle est l’ouvrage du roi, de ses princes & de tout le peuple chrétien qui compose le royaume des Mérovingiens.

La loi gombette contient les souscriptions de trente comtes, qui promettent de l’observer, eux & leurs descendans.

La principale matiere de ces lois, ce sont les crimes & sur-tout ceux qui étoient les plus fréquens chez des peuples brutaux, tels que le vol, le meurtre, les injures ; la peine de chaque crime y est réglée selon les circonstances, à l’égard desquelles la loi entre dans un fort grand détail, voyez ce qui est dit de ces lois dans l’histoire du Droit françois de M. l’abbé Fleury, & ce qui a été dit ici au mot code des lois antiques, & au mot lois antiques, & aux articles où il est parlé de chacune de ces lois en particulier.

Il y eut quelques lois de la premiere race qui furent nommées édits, tel que l’édit de Théodoric, roi d’Italie, qui se trouve dans ce code des lois antiques.

D’autres furent nommées en latin constitutiones.

D’autres enfin furent appellées capitulaires, parce que leurs dispositions étoient distinguées par chapitres ou plutôt par articles que l’on appelloit capitula. Ces capitulaires se faisoient par nos rois dans des assemblées, composées d’évêques & de seigneurs ; & comme les évêques y étoient ordinairement en grand nombre, & que l’on y traitoit d’affaires ecclésiastiques, ces mêmes assemblées ont souvent été qualifiées de concile. Le recueil des capitulaires de l’édition de M. Baluze, comprend quelques capitulaires du tems de la premiere race, lesquels remontent jusqu’au regne de Childebert.

Les ordonnances qui nous restent des rois de la seconde race, sont toutes qualifiées de capitulaires, & comprises dans l’édition qu’en a donnée M. Baluze en deux volumes in folio avec des notes.

Les capitulaires de Charlemagne commencent en l’an 768, premiere année de son regne ; il y en a des regnes suivans, jusques & compris l’an 921, tems fort voisin de la fin du regne de Charles le Simple.

La collection des capitulaires porte en titre capitula regum & episcoporum, maximèque nobilium francorum omnium.

Et en effet, ils sont appellés par les rois leur ouvrage & celui de leurs féaux. Charlemagne en parlant de ceux faits pour être insérés dans la loi salique, dit qu’il les a fait du consentement de tous ; celui de 816 porte, que Louis le Débonnaire a assemblé les grands ecclésiastiques & laïcs pour faire un capitulaire pour le bien général de l’église ; dans un autre il remet à décider jusqu’à ce que ses féaux soient en plus grand nombre.

Charles le Chauve dit, tels sont les capitulaires de notre pere que les Francs ont jugé à-propos de reconnoître pour loi, & que nos fideles ont résolu dans une assemblée générale, d’observer en tous tems ; & dans un édit qu’il fit à Poissy en 844. pour une nouvelle fabrication de monnoie, il est dit que cet édit fut fait ex consensu, par où l’on entend que ce fut dans une assemblée du peuple.

Les capitulaires sont distingués en plusieurs occasions d’avec les autres lois qui étoient plus anciennes ; & en effet, il y avoit différence en ce que les capitulaires n’avoient été faits que pour suppléer ce qui n’avoit pas été prévû par les lois, cependant ils avoient eux-mêmes force de lois ; & l’on voit

dans plusieurs capitulaires de Louis le Débonnaire & de Charles le Chauve, qu’ils ordonnent que les capitulaires seront tenus pour loi.

Ceux de Charlemagne forment même un corps complet de législation politique, ecclésiastique, militaire, civile & économique.

Les lois & capitulaires, tant de la premiere que de la seconde race, se faisoient donc dans des assemblées de la nation qui se tenoient en plein champ, & qu’on a appellées parlement, parce que c’étoit dans ces assemblées que l’on parloit & traitoit des affaires sur lesquelles le roi vouloit bien se concerter avec ses sujets.

Sous la premiere race, ces assemblées se tenoient au mois de Mars, d’où on les appelloit quelquefois champ de Mars ; d’abord toutes les personnes libres y étoient admises, le peuple comme les grands ; mais la confusion que cause toujours la multitude, fit que l’on changea bien tôt la forme de ces assemblées. On assembla chaque canton en particulier, & l’on n’admit plus aux assemblées générales que ceux qui tenoient quelque rang dans l’état ; les évêques y furent admis de sort bonne heure, c’est de-là que Grégoire de Tours, Reginon & autres auteurs nomment souvent ces assemblées synodes ou conciles.

Ces mêmes assemblées sont nommées dans la loi salique mallus, mot tudesque qui veut dire parole ; c’étoit-là en effet que la nation parlementoit avec le roi, c’est-à-dire conféroit, communiquoit avec lui ; elles furent aussi appellées judicium francorum & placitum, & dans la suite parlamentum parlement.

C’est dans ces assemblées que se faisoient les nouvelles lois & capitulaires, ou autres ordonnances ; on y délibéroit entr’autres choses de la conservation des lois & des changemens qui pouvoient être nécessaires.

Au reste, ces assemblées, soit générales ou réduites à un certain nombre de personnes, ne se tenoient point par une autorité qui fût propre à la nation ; & l’on ne peut douter, suivant les principes universellement reconnus parmi nous, que rien ne se faisoit dans ces assemblées que par la permission du roi.

Aussi voit-on que nos rois en changerent la forme, & même en interrompirent le cours, selon qu’ils le jugerent à propos : le pouvoir & la dignité de ces assemblées ne furent pas long-tems uniformes ; elles ne resterent pas non plus long-tems dans leur intégrité, tant à cause des différens partages qui se firent de la monarchie, qu’à cause des entreprises de Charles Martel, lequel irrité contre le clergé qui composoit la plus grande partie de ces assemblées, les abolit entierement pendant les vingt-deux ans de sa domination, ses enfans les rétablirent. Pepin les transfera au mois de Mai, il y donna le premier rang aux prélats ; Charlemagne rendit ces assemblées encore plus augustes, tant par la qualité des personnes qui s’y trouvoient, que par l’ordre qu’il y établit & par la bonté qu’il avoit d’écouter les avis de son peuple au sujet des lois que l’on proposoit dans ces assemblées, cherchant ainsi à prévenir toutes les difficultés & les inconvéniens qui auroient pû se trouver dans la loi.

Les lois antiques de la premiere race continuerent à être observées avec les capitulaires jusques vers la fin de la seconde race, dans tous les points auxquels il n’avoit pas été dérogé par les capitulaires ; la loi salique fait même encore une de nos plus saintes lois par rapport à l’ordre de succéder à la couronne.

Du reste, toutes ces lois anciennes & le surplus de la loi salique elle-même, ainsi que les capitulaires, sans avoir jamais été abrogés formellement,