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y gagna des sommes immenses, & Archidice qui eut un si grand renom par toute la Grece, vint aussi s’y établir. Enfin, cette ville prétendoit avoir bonne part à la protection de Vénus, & se vantoit de posséder une image miraculeuse de cette déesse, que l’on consacra dans son temple.

Origène remarque qu’on y honoroit particulierement le dieu Sérapis, quoiqu’anciennement on y eût adoré d’autres dieux. Athénée, Julius Pollux, Lycéas, & Polycharme, ne sont pas les seuls auteurs dont Naucratis soit la patrie ; car selon quelques-uns, Aristophane & Philistus y naquirent aussi.

Athénée & Julius Pollux étoient contemporains : le premier fut surnommé le Pline des Grecs, & passoit pour un des plus savans hommes de son tems ; il florissoit à la fin du second siecle. Il ne nous reste de lui que les Disnosophistes, c’est-à-dire les Sophistes à table, en 15 livres, dont il nous manque les deux premiers, une partie du troisieme, & la plus grande partie du quinzieme. On y trouve une variété surprenante de faits, qui en rendent la lecture très-agréable aux amateurs de l’antiquité. La bonne édition en grec & en latin est Lugd. 1612. 2 vol. in-fol.

Julius Pollux étoit un peu plus jeune qu’Athénée ; il obtint la protection de Commode, fils de Marc-Aurele, & devint professeur de Rhétorique à Athènes. On connoît son Onosmaticon, ou dictionnaire grec, ouvrage précieux, dont la meilleure édition est d’Amsterdam, en 1706, in fol. en grec & en latin avec des notes.

Voilà les habiles gens qui ont contribué à la gloire de Naucratis ; mais elle a tiré infiniment plus de profit de ses poteries & de son nitre. (D. J.)

NAUD, s. m. (Fontaines salantes.) c’est un réservoir placé à l’une des quatre faces de chaque berne ; ce réservoir ou bassin a la forme d’un grand coffre d’environ cinq piés de profondeur, & de pareille largeur, sur trente-six piés de long ; il est hors de terre, composé de madriers épais de plus de quatre pouces d’équarrissage, entouré de six en six piés de liens de fer, & calfaté dans les joints avec des étoupes, de la mousse, & de la terre glaise couverte de douves. C’est dans ces nauds qui contiennent chacun plus d’une cuite, ou plus de 63 muids, que les échenées amenent les eaux d’où elles se distribuent dans les poëles. Voyez Sels, Salantes Fontaines.

NAVÉE, s. f. terme de Mariniers, vaisseau chargé de poisson. Ce mot n’est en usage que dans quelques ports de mer de France, particulierement du côté de Normandie ; & l’on ne s’en sert guere que dans le négoce de la saline.

Navée, (Architect. civile.) c’est le nom que donnent les Mâçons à la charge d’un bateau de pierre de saint Leu, qui contient plus ou moins de tonneaux, selon la crue ou décrue de la riviere. (D. J.)

NAVET, napus, s. m. (Hist. nat. Bot.) genre de plante qui ne differe de la rave que par le port de la plante ; ce caractere fait distinguer très-aisément ces deux genres l’un de l’autre. Voyez Rave. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez Plante. (I)

Des cinq especes de navets que compte M. de Tournefort, nous ne décrirons que le plus commun, c’est-à-dire le navet cultivé, napus sativa, radice albâ, I. R. H. 229. Il a la racine oblongue, ronde, grosse par le collet, cependant moins grosse que la rave, charnue, tubéreuse, plus menue vers le bas, de couleur blanche ou jaune, quelquefois noirâtre en-dehors, blanche en-dedans, d’une saveur douce & piquante, agréable, plus suave & plus délicate que le raifort. Elle pousse une tige de la hauteur d’une coudée & davantage, qui se divise en ra-

meaux. Ses feuilles sont oblongues, profondément

découpées, rudes, vertes, sans pédicules, ou attachées à des pédicules membraneux ; les inférieures sont sinuées, embrassent la tige, & finissent en pointe.

Sa fleur est à quatre pétales disposés en croix, jaune comme celle du chou ; quand elle est passée, il lui succede une silique longue d’environ un pouce, ronde, qui se divise en deux loges, remplies de semences assez grosses, presque rondes, de couleur rougeâtre, ou purpurine, d’un goût âcre & piquant qui tient de l’amer. Cette âcreté est moindre que celle de la graine de moutarde, quoiqu’elle en approche.

On seme le navet, & on le cultive dans les jardins & dans les champs : il se multiplie de graine, & veut une terre légere & sablonneuse, quoiqu’il vienne également dans les terres fortes, quand elles sont bien labourées. Il y en a de plusieurs sortes, de gros & de petits ; les petits navets sont estimés les meilleurs & les plus agréables au goût. On fait cas à Paris des navets de Vaugirard, & de ceux de Freneuze, près de Poissy. Il y a beaucoup de navets qui sont tout-à fait insipides, ce qui vient du défaut de culture, & de dégénération de la graine. Il ne faut pas confondre cette graine avec celle qu’on appelle navette. Voyez Navette. (D. J.)

Navet, (Chimie, Pharmacie, Diete, & Mat. med.) navet cultivé, navet commun. Ce n’est que la racine de cette plante qui est employée soit en Médecine, soit pour l’usage de nos tables. Aussi est-ce proprement la racine de navet qui est désignée dans l’usage commun par le mot de navet.

Les navets donc, pour parler le langage ordinaire, ont, lorsqu’ils sont cruds, un goût sucré, relevé d’un montant vif & piquant, qui s’évapore facilement par la suite, pour ne laisser au navet que la simple saveur douce. Les principes par lesquels ils excitent l’un & l’autre sentiment, sont bien connus. Leur goût sucré & fixe est dû au corps muqueux-doux qu’ils contiennent abondamment ; & le goût piquant & fugitif a une petite portion d’alkali volatil spontané Voyez Doux, Muqueux, Végétal.

Le corps doux-muqueux contenu dans le navet, est de l’espece de ce corps qui a le plus d’analogie avec le mucus, ou la substance gélatineuse des animaux, & qui peut être regardée comme étant, à cet égard, le dernier chainon par lequel la série des végétaux se lie au regne animal. Voyez Végétal, & Substances animales.

Cette espece de corps muqueux, & celui que contient le navet en particulier, fournit aux animaux une nourriture abondante, un aliment pur, & peut-être l’aliment végétal par excellence. Voyez Nourrissant. Aussi le navet est-il généralement reconnu pour être très-nourrissant, de bon suc, & de facile digestion. Son usage diététique est trop connu, trop manifestement, & trop généralement salutaire, pour que la Médecine ait des préceptes à donner sur cet objet. Mais c’est pour cela même qu’il y a peu à compter sur les éloges que les Médecins ont donnés au bouillon & au syrop de navet. employés à titre de remede dans les toux, les phthysies, l’asthme, &c. Un aliment si pur, & si propre à tous les sujets, ne sauroit exercer chez quelques uns une vertu véritablement médicamenteuse. Si quelque médecin se proposoit cependant de soutenir un malade par un aliment doux, léger, pur, de prescrire une diete plus tenue que celle des bouillons de viande ; les bouillons de navet pourroient être regardés comme remplissant très-bien cette vûe. Cette diete mérite au moins d’être tentée, & comparée à la diete lactée, & à la diete farineuse, sur laquelle les observations manquent absolument aussi. Voyez Régime.