Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 10.djvu/802

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

face frappée, le seul de ces deux mouvemens qui agisse est le perpendiculaire ; & chaque direction oblique de mouvement est la diagonale d’un parallélogramme, dont les directions perpendiculaires & paralleles sont les deux côtés. De plus, si après avoir décomposé une impulsion oblique sur une surface dans la perpendiculaire à cette surface, il arrive que cette surface ne puisse pas se mouvoir suivant la direction que cette impulsion tend à lui donner, & qu’elle puisse seulement changer sa direction, il faut encore redécomposer cette impulsion perpendiculaire en deux autres, dont l’une soit celle que la surface peut suivre, & l’autre celle qu’elle ne sauroit suivre. Voyez Composition de mouvement.

Pour donner une idée de l’action du vent sur les moulins, nous emploierons une comparaison. Représentons-nous un gouvernail attaché obliquement à la quille d’un navire, & frappé par le courant de l’eau parallelement à la quille, c’est-à-dire, frappé obliquement ; il est aisé de voir, en tirant la ligne qui exprime l’impulsion perpendiculaire, que cette impulsion tendra à arracher le gouvernail du navire, & que cette direction, perpendiculaire au gouvernail, est oblique à la quille. Or, comme ce gouvernail, poussé par une impulsion oblique qui tend à l’arracher du vaisseau, ne sauroit en être détaché par la maniere dont il y est assuré, il s’ensuit que des deux mouvemens dont l’impulsion oblique est composée, il ne faut avoir égard qu’à celui qui est dans la direction que le gouvernail peut suivre, & abandonner l’autre comme inutile. Or, la direction dans laquelle le gouvernail ne peut se mouvoir sans se détacher de la quille, est celle qui le pousse circulairement autour de son extrémité comme centre. L’effet de l’impulsion oblique de l’eau sur le gouvernail doit donc être réduit d’abord à une impulsion perpendiculaire, & ensuite cette impulsion à celle qui tend véritablement à faire tourner le gouvernail. Voyez Gouvernail. Présentement, dans un mouvement oblique & composé dans lequel il n’y a qu’une des forces composantes qui soit à employer, il est clair que plus la proportion que cette force aura à l’égard de l’autre sera petite, moins le mouvement aura d’effet & au contraire. Or, en examinant les mouvemens composés sur le gouvernail, on trouve que plus il est oblique à l’égard de la quille, plus la proportion de la force qui tend à le faire tourner est grande par rapport à l’autre. Mais, d’un autre côté, plus il est oblique à l’égard de la quille, ou, ce qui revient au même, plus il est oblique à la direction de l’eau, plus l’impulsion est foible. L’obliquité du gouvernail a donc en même tems un avantage & un desavantage ; mais comme cet avantage & ce desavantage ne sont point égaux & qu’ils varient suivant les différens angles de l’inclinaison, ils se compliquent d’une maniere fort variable, & prévalent chacun à leur tour l’un sur l’autre.

On a agité la question de la situation la plus avantageuse à donner au gouvernail. M. Renau, dans sa théorie de la manœuvre des vaisseaux, a trouvé que la meilleure situation à lui donner étoit celle où il faisoit un angle de 55 degrés avec la quille.

Cette théorie sur le gouvernail peut s’appliquer aux moulins à vent. En effet, supposons présentement qu’un moulin exposé à l’action du vent eût ses quatre ailes perpendiculaires à l’arbre auquel elles sont adaptées, comme elles reçoivent alors le vent perpendiculairement, il est clair que son impulsion ne tendroit qu’à les détruire. Il est donc nécessaire, pour qu’elles soient de quelque utilité, qu’elles aient une direction oblique à l’axe, & qu’elles reçoivent par conséquent le vent obliquement.

Afin de traiter la question plus facilement, ne

considérons qu’une aîle verticale : l’impulsion du vent sur cette aîle étant oblique, doit être réduite à l’impulsion perpendiculaire ; & comme l’aile ne sauroit suivre cette direction, il faut encore la décomposer en deux autres, dont l’une tende à la faire tourner sur son axe, & dont l’autre tendroit à la renverser. Mais il n’y a que la premiere de ces deux impulsions qui puisse avoir son effet ; il faut donc que l’impulsion entiere du vent sur l’aîle n’agisse que pour la faire tourner ou de droite à gauche ou de gauche à droite, suivant que son angle aigu est tourné d’un côté ou de l’autre, &c. Ce qu’il y a d’heureux dans la construction de cette machine, c’est que les trois autres aîles ne peuvent tourner que du même côté.

Supposons donc que le vent vienne dans la direction de l’axe, & que x soit l’angle de l’aîle avec l’axe, l’effort perpendiculaire du vent sur l’aîle sera d’abord , en appellant f la force absolue que le vent exerceroit contre l’aîle s’il la frappoit perpendiculairement : or cette force se décompose en deux, une parallele à l’axe qui n’a point d’effet, & l’autre perpendiculaire à l’axe, & qui est la force qui tend à faire tourner l’aîle. Or on trouvera très-aisément que celle-ci est , qui doit être un maximum : donc la différence = 0. Voyez Maximum. Donc ou ce qui donne Échec de l’analyse (SVG (MathML peut être activé via une extension du navigateur) : réponse non valide(« Math extension cannot connect to Restbase. ») du serveur « http://localhost:6011/fr.wikisource.org/v1/ » :): {\displaystyle \scriptstyle \sin{x} =} à environ le sinus de 55 degrés.

L’obliquité de l’aîle du moulin à l’égard de l’arbre auquel elle tient, a précisément le même avantage & le même désavantage que l’obliquité du gouvernail à l’égard de la quille ; & M. Parent qui a cherché par la nouvelle analyse la situation la plus avantageuse de l’aîle sur l’arbre, a trouvé que c’étoit précisément le même angle de 55 degrés. Cependant dans la pratique cette regle est peu observée, & apparemment est peu connue. On donne ordinairement aux aîles l’angle de 60 degrés, qui differe assez sensiblement du vrai.

Au reste il n’est pas inutile de rappeller ici ce que M. Daniel Bernoully a remarqué dans son hydrodynamique sur la maniere dont on résout ordinairement le problème de la position la plus avantageuse des aîles du moulin à vent à l’égard du vent. Il observe que dans la solution de ce probleme on doit avoir égard à la vîtesse respective du vent par rapport au moulin, au lieu qu’on regarde d’ordinaire la vîtesse du vent comme infinie ; & cet auteur fait voir qu’en ayant égard à la vîtesse du moulin & la regardant comme donnée, le problème est beaucoup plus compliqué que dans l’hypothese où on le résout ordinairement. On peut ajouter à ce qu’il a dit que dans la solution de ce problème on ne peut pas regarder la vîtesse du moulin comme donnée à volonté, ainsi que la vîtesse du vent. Il y a une certaine vîtesse à laquelle l’aîle doit arriver pour se mouvoir uniformément, & qui est telle que quand elle a cette vitesse, la force du vent pour la mouvoir est zéro. D’où il s’ensuit que la figure & la position de l’aîle étant donnée, sa vîtesse proprement dite, celle à laquelle elle doit arriver pour se mouvoir uniformément, est nécessairement donnée. Le problème consiste donc à savoir quelle doit être la figure & la position de l’aîle, pour que cette vîtesse soit la plus grande qu’il est possible.

La raison qui à obligé M. Daniel Bernoully à avoir égard à la vitesse respective du vent & du moulin, c’est qu’il prétend avoir observé que la vîtesse du vent bien loin d’être infinie par rapport à celle du moulin, est quelquefois à-peu-près égale à la vîtesse de la partie supérieure des aîles. De plus, il remarque que dans le calcul des forces motrices des aîles des moulins, on doit avoir égard aux diffé-