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retour de la guerre de Troie. Pythagore s’y retira de Crotone, & y finit ses jours. Hipparque l’astronome y dressa ses tables. Quelques géographes veulent que ce soit à-présent Feliciore dans la Calabre ultérieure ; d’autres pensent que c’est Trébigazze : enfin d’autres prétendent que c’est Torré di Mare. (D. J.)

MÉTAPTOSE, s. f. (Gram.) de μεταπιπτω, changer en pis ou en mieux, signifie le changement d’une maladie en une autre, soit en pis, soit en mieux. On l’appelle diadoche, lorsque le changement se fait en mieux, & par le transport de la matiere morbifique d’une partie noble dans une autre qui l’est moins ; ou métastase, quand le changement se fait en pis, & que la matiere morbifique passe dans une partie plus noble que celle où elle étoit auparavant.

MÉTARY, s. f. (Saline.) ouvriere occupée dans les fontaines salantes à détremper le sel en grain avec de la muire, voyez Muire, à en remplir une écuelle ou moule de bois, & à la présenter à la fassari. Voyez Fassari & Salantes Fontaines.

MÉTASTASE, s. f. (Méd.) Ce mot est entierement grec (μεταστασς), dérivé & formé de μετατιθημι, qui signifie transporter, changer de place. Il désigne, suivant le sens littéral & le plus reçu en Médecine, un transport quelconque d’une maladie d’une partie dans une autre, soit qu’il se fasse du dehors en dedans, soit au contraire qu’il ait lieu du dedans au dehors. Quelques auteurs restreignent la signification de métastase au changement qui se fait en mal, lorsque la maladie passe dans une partie plus noble que celle où elle étoit auparavant. Ils en font une espece de métaptose, μεταπτωσις, qui, suivant eux, est le mot générique qui signifie tout changement en mal ou en bien, donnant les noms de διαδοκη ou διαδεξις au transport salutaire qui arrive lorsque la maladie va d’une partie noble à une autre qui l’est moins ; mais le nom de métastase est le plus usité, il est pris indifféremment dans presque tous les ouvrages de Médecine, pour exprimer un changement quelconque fait dans le siege d’une maladie. Galien dit qu’exactement (κυρίως) la métastase est le transport d’une maladie d’une partie dans une autre (comment. in aphor. 7, lib. V.) ; & Hippocrate, dans cet aphorisme, s’en sert pour marquer un changement salutaire ou même une entiere solution, lorsqu’il dit que les affections épileptiques, survenues avant l’âge de puberté, souffrent une métastase (μεταστασιν εχει), mais que celles qui viennent à vingt-cinq ans ne se guérissent jamais.

Les symptomes qui accompagnent la métastase varient extrèmement suivant l’espece, la gravité de la maladie, l’état, la disposition, la situation, l’usage de la partie que la maladie quitte & de celle où elle va se déposer, & le dérangement qu’elle y occasionne. Si la métastase se fait du dedans au dehors, les symptomes de la maladie primitive cessent, les fonctions des visceres affectés se rétablissent, & l’on apperçoit à l’extérieur des abscès, ulceres, éruptions cutanées, tumeurs, &c. On voit souvent des maladies invétérées de poitrine se terminer par des tumeurs aux testicules, des abscès aux jambes, des évacuations de pus par les urines ; des migraines, des coliques néphrétiques se changent en goutte ; à la mélancholie surviennent quelquefois des éruptions cutanées, des parotides jugent des fievres malignes, &c. Lorsqu’au contraire la métastase se fait du dehors au dedans, les tumeurs disparoissent, s’effacent entierement, les ulceres se ferment, les éruptions rentrent, les abscès se dissipent, la goutte remonte, &c. mais à l’instant on voit succéder des symptomes très-multipliés & pour l’ordinaire très pressans. Il y a beaucoup d’observations qui font voir qu’en pareils cas les metastases ont déterminé

des attaques d’apoplexie, d’épilepsie, des gouttes sereines, des toux opiniâtres, asthme suffoquant, dépôt dans la tête, la poitrine, le bas-ventre, hydropisie, ictere, cachexie, marasme, &c. il est inconcevable avec quelle rapidité ces métastases sont suivies des accidens les plus fâcheux & de la mort même. J’ai vû un homme qui avoit depuis longtems un vieux ulcere à la jambe ; peu satisfait de quelques applications indifférentes que je lui conseillois & qui entretenoient toûjours l’écoulement de l’ulcere, il s’adresse à un chirurgien qui lui promit des secours plus efficaces ; il réussit en effet à cicatriser l’ulcere : mais à-peine eut-il cessé de couler, que le malade tombe comme apoplectique avec une respiration stertoreuse, les forces paroissent épuisées, le pouls est petit, foible, fuyant sous le doigt. Appellé de nouveau pour voir ce malade, je fais à l’instant rouvrir l’ulcere, appliquer un caustique puissant aux deux jambes, mais en-vain ; le malade mourut : deux heures après, le cadavre ouvert, nous trouvâmes le poumon rempli de matiere purulente.

La maniere dont ces métastases s’operent est assez surprenante & obscure, pour fournir matiere à bien des disputes & des discussions. Elle a beaucoup exercé les esprits des Médecins dissertateurs : la plûpart, suivant par habitude la théorie vulgaire qu’ils ont la paresse de ne pas approfondir, ont cru bonnement qu’il y avoit toûjours un transport réel de la matiere qui avoit excité premierement la maladie dans la partie où elle établissoit son nouveau siege ; & qu’ainsi une tumeur extérieure disparoissant, ce sang coagulé qui la formoit étoit porté dans la poitrine, par exemple, & excitoit dans les poumons une semblable tumeur. Ils ont avancé que ce transport étoit opéré par un repompement de cette matiere morbifique par les vaisseaux absorbans qui la transmettoient aux vaisseaux sanguins, d’où elle étoit portée par le torrent de la circulation aux différentes parties du corps, & qu’en chemin faisant elle s’arrêtoit dans la partie la plus disposée à la recevoir. D’autres, frappés de la promptitude de cette opération, plus instruits des véritables lois de l’économie animale, moins embarrassés pour en expliquer les phénomenes, n’ont pu goûter un transport inutile, un repompement gratuit & souvent impossible ; ils ont fait jouer aux nerfs tout le méchanisme de cette action : ainsi le transport d’un abscès d’une partie du corps à l’autre leur a paru opéré par un simple changement dans la direction du spasme suppuratoire. Il est très-certain que pendant que la suppuration se forme, il y a dans toute la machine, & sur-tout dans la partie affectée, un état de gêne, d’irritation, de constriction, qui est très-bien peinte sur le pouls où l’on observe alors une roideur & une vibratilité très-marquée. La constriction spasmodique qui détermine dans la partie engorgée la suppuration, est formée & entretenue par un spasme particulier du diaphragme qui, changeant & de place & de direction, produit le même effet dans une autre partie & fait ainsi changer de place un abscès : ce changement est beaucoup plus simple dans les maladies sans matiere, qui sont exactement nerveuses. Cette idée isolée & prise séparément, est ici dénuée des preuves qui résultent de l’ensemble de toutes les parties de l’ingénieux système, que l’auteur a proposé dans l’idée de l’homme physique & moral, & institutiones ex novo Medicinæ conspectu. Elle pourra paroître par-là moins vraissemblable ; mais pour en appercevoir mieux la liaison & la justesse, le lecteur peut consulter les ouvrages cités & l’art. Economie animale. Je ne dissimulerai cependant pas qu’elle ne peut guere s’appliquer à une observation faite à l’hôpital de Montpellier : un malade avoit un abscès bien formé au bras, on appercevoit une fluctuation pro-