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plaçoit toutes les îles fortunées sur une même ligne du nord au sud, qu’il prenoit aussi pour le premier méridien, & il leur donnoit par conséquent à toutes la même longitude. De-là une infinité d’erreurs & d’équivoques dans nos premiers navigateurs ; plusieurs d’entre eux ayant pris indistinctement une de ces îles pour le point fixe d’où l’on devoit compter les longitudes de tous les autres lieux de la terre. M. le Monnier, dans les mém. de l’acad. de 1742, place l’île de Fer à 20 degrés deux minutes 30 secondes, à l’occident de Paris. Instit. astron.

Sans faire attention à toutes ces regles purement arbitraires sur la position du premier méridien, les Géographes & constructeurs de carte prennent assez souvent pour premier méridien, celui de leur propre ville, ou de la capitale de l’état où ils vivent ; & c’est de-là qu’ils comptent les degrés de longitude des lieux.

Les Astronomes choisissent dans leur calcul pour premier meridien, celui du lieu où ils font leurs observations. Ptolomée avoit pris celui d’Alexandrie ; Tycho Brahé, celui d’Uranibourg ; Riccioli celui de Boulogne ; Flamsteed prend l’observatoire royal de Greenwich ; & les Astronomes françois l’observatoire royal de Paris. Voyez Observatoire.

Comme c’est à l’horison que toutes les étoiles se levent & se couchent, de même c’est au méridien qu’elles sont à leur plus grande hauteur ; & c’est aussi dans le même méridien au-dessous de l’horison, qu’elles sont dans leur plus grand abaissement. Car puisque le méridien est situé perpendiculairement tant à l’égard de l’équateur, qu’à l’égard de l’horison, il est évident de-là qu’il doit diviser en parties égales soit au-dessus, soit au-dessous de l’horison, les segmens de tous les cercles paralleles ; & qu’ainsi le tems qui doit s’écouler entre le lever d’une étoile & son passage au méridien, est toûjours égal à celui qui est compris entre le passage au méridien & le coucher. Voyez Culmination.

On trouve dans les Transactions philosophiques des observations qui porteroient à soupçonner que les méridiens varieroient à la longue. Cette opinion se prouve par l’ancienne méridienne de saint Pétrone de Boulogne, qui maintenant ne décline pas moins, dit-on, que de huit degrés du vrai méridien de la ville, & par celle de Tycho à Uranibourg, qui, selon M. Picart, s’éloigne de 16 minutes du méridien moderne. S’il y a en cela quelque chose de vrai, dit M. Vallis, ce doit être une suite des changemens des poles terrestres, changement qu’il faut vraissemblablement attribuer à quelque altération dans le mouvement diurne, & non à un mouvement des points du ciel ou des étoiles fixes auxquelles répondent les poles de la terre.

En effet, si les poles du mouvement diurne restoient fixes au même point de la terre, les méridiens dont l’essence, pour ainsi dire, est de passer par les poles, resteroient toûjours les mêmes.

Mais cette idée que les méridiens puissent changer de position, semble détruite par les observations de M. de Chazelles, de l’académie des Sciences, qui étant en Egypte, a trouvé que les quatre côtés d’une pyramide construite 3000 ans auparavant, regardoient encore exactement les quatre points cardinaux ; position qu’on ne sauroit prendre pour un effet du hasard. Il est bien plus naturel de penser, ou qu’il y a eu quelque erreur dans les opérations de Tycho, & dans la méridienne de Boulogne, ou ce qui est encore plus vraissemblable, que le sol des endroits où ces méridiennes ont été tracées, sur-tout celle de Boulogne, peut avoir souffert quelque altération. Voyez Pole.

Méridien du globe ou de la sphere, c’est le cercle de cuivre dans lequel la sphere tourne & est sus-

pendu ; il est divisé en quatre quarts ou 360 degrés

en commençant à l’équateur. C’est sur ce cercle & à commencer de l’équateur, qu’on compte dans le globe céleste la déclinaison australe & boréale du soleil & des étoiles fixes, & dans les globes terrestres la latitude des lieux nord & sud ; il y a deux points sur ce cercle qu’on nomme poles ; & celui de ses diametres qui passe par ces deux points, est nommé l’axe de la terre dans le globe terrestre, ou l’axe des cieux dans le céleste ; parce que c’est sur ce diametre que la terre tourne.

On trace ordinairement 36 méridiens sur le globe terrestre, savoir de dix en dix degrés de l’équateur ou de longitude.

Les usages de ce cercle appellé méridien, sont d’arrêter par son moyen le globe à une certaine latitude, ou à une certaine hauteur de pole, ce qu’on appelle rectifier le globe, voyez Globe ; de faire connoître la déclinaison, l’ascension droite, la plus grande hauteur du soleil ou d’une étoile. Voyez encore l’article Globe.

Méridienne, ou Ligne méridienne, c’est une partie de la commune section du plan du méridien d’un lieu & de l’horison de ce lieu. On l’appelle quelquefois ligne du nord & sud, parce que sa direction est d’un pole à l’autre. Voyez Méridien.

On appelle aussi en général méridienne, la commune section du méridien & d’un plan quelconque, horisontal, vertical, ou incliné. Voyez plus bas Méridienne d’un cadran.

La ligne méridienne est d’un grand usage en Astronomie, en Géographie, en Gnomonique ; toutes ces sciences supposent qu’on sache la tracer exactement ; ce qui a fait que différens astronones se sont donnés les plus grands soins & la plus grande peine pour en décrire avec la derniere précision. Une des plus fameuses autrefois étoit celle qu’avoit tracé M. Cassiny sur le pavé de l’église de sainte Pétrone à Boulogne. Au toît de l’église, 1000 pouces au-dessus du pavé, est un petit trou à-travers lequel passe l’image du soleil ; de façon que dans le moment où cet astre est au méridien, elle tombe toûjours infailliblement sur la ligne, & elle y marque le progrès du soleil en différens tems de l’année par les différens points où elle correspond en ces différens tems.

Quand cette méridienne fut finie, M. Cassiny apprit aux Mathématiciens de l’Europe par un écrit public, qu’il s’étoit établi dans un temple un nouvel oracle d’Apollon ou du soleil, que l’on pouvoit consulter avec confiance sur toutes les difficultés d’Astronomie. On peut en voir l’histoire plus en détail dans l’éloge de cet astronome par M. de Fontenelle, Hist. acad. 1712. Voyez Solstice & Gnomon.

A Paris les plus célébres méridiennes de cette espece sont celles de l’Observatoire de Paris, & de S. Sulpice. Dans toutes ces méridiennes, qu’on peut regarder comme des especes d’instrumens, les plus grands dont les Astronomes se soient servis, le gnomon proprement dit, est une couverture d’environ un pouce de diametre, pratiquée à la voute, ou en quelque endroit de ces édifices, par où passent les rayons du soleil, dont l’image vient se projetter sur le plan horisontal de la méridienne : chez les anciens ce qu’on appelloit des gnomons, consistoit ordinairement en de grands obélisques élevés en plein air, & dans quelque grande place, au sommet desquels étoit un globe, ou une figure quelconque, qui faisoit l’office de cette ouverture, & dont l’ombre tenoit lieu de l’image solaire, en cela inférieurs à nos méridiennes, puisque cette ombre ainsi environnée de la lumiere du soleil ne pouvoit qu’être fort mal terminée, & d’autant plus mal, que le gnomon étoit plus grand, & le soleil plus bas, comme il arrive au tems du solstice d’hyver. Voyez gnomon.