L’Encyclopédie/1re édition/MÉRIDIEN
MÉRIDIEN, s. m. (Astronomie.) grand cercle de la sphere qui passe par le zénith & le nadir, & par les poles du monde, & qui divise la sphere du monde en deux hémispheres placés l’un à l’orient, & l’autre à l’occident. Voyez Sphere. On peut définir encore plus simplement le méridien, en disant que c’est un cercle vertical AZBN, Pl. astron. I. fig. 6. qui passe par les poles du monde P, Q. Voyez Vertical &.
On l’appelle méridien, du mot latin meridies, midi, parce que lorsque le soleil se trouve dans ce cercle, il est ou midi ou minuit pour tous les endroits situés sous ce même cercle.
Méridien, (Géographie.) c’est un grand cercle comme PAQD, Pl. géogr. fig. 7. qui passe par les poles de la terre P, Q, & par un lieu quelconque donné Z ; de façon que le plan de tous méridiens terrestres est toûjours dans le plan du méridien céleste ; d’où il s’ensuit 1°. que comme tous les méridiens entourent, pour ainsi dire, la terre, en se coupant aux poles, il y a plusieurs lieux situés sous le même méridien. 2°. Comme il est ou midi ou minuit toutes les fois que le centre du soleil est dans le méridien des cieux, & comme le méridien terrestre est dans le plan du céleste, il s’ensuit qu’il est au même instant ou midi ou minuit dans tous les lieux situés sous le même méridien. 3°. On peut concevoir autant de méridiens sur la terre, que de points sur l’équateur ; de sorte que les méridiens changent à mesure que l’on change de longitude.
Premier méridien, est celui duquel on compte tous les autres en allant d’orient en occident. Le premier méridien est donc le commencement de la longitude. Voyez Longitude.
C’est une chose purement arbitraire de prendre tel ou tel méridien pour premier méridien ; aussi le premier méridien a-t-il été fixé différemment par différens auteurs en différentes nations ; & en différens tems ; ce qui a été une source de confusion dans la Géographie. La regle que les anciens observoient là-dessus étoit de faire passer le premier méridien par l’endroit le plus occidental qu’ils connussent : mais les modernes s’étant convaincus qu’il n’y avoit point d’endroit sur la terre qu’on pût regarder comme le plus occidental, on a cessé depuis ce tems de compter les longitudes des lieux, à commencer d’un point fixe.
Ptolomée prenoit pour premier méridien, celui qui passe par la plus éloignée des îles fortunées, parce que c’étoit l’endroit le plus occidental qu’on connût alors. Depuis on recula le premier méridien de plus en plus, à mesure qu’on découvrit des pays nouveaux. Quelques uns prirent pour premier méridien, celui qui passe par l’île S. Nicolas, près du cap-Verd ; Hondius, celui de l’île de Saint-Jacques ; d’autres, celui de l’île du Corbeau, l’une des Açores. Les derniers géographes, & sur-tout les Hollandois, l’ont placé au pic de Ténériffe ; d’autres, à l’île de Palme, qui est encore une des Canaries ; & enfin, les François l’ont placé par ordre de Louis XIII. à l’ile de Fer, qui est aussi une des Canaries.
On compte de cette île la longitude vers l’orient, en achevant le cercle, c’est-à-dire jusqu’au 360 degré qui vient joindre cette île à son occident. Il y a même à cette occasion une ordonnance de Louis XIII. du premier Juillet 1634, qui défend à tous pilotes, hydrographes, compositeurs & graveurs de cartes ou globes géographiques, « d’innover ni changer l’ancien établissement des méridiens, ou de constituer le premier d’iceux ailleurs qu’à la parite occidentale des îles Canaries, conformément à ce que les plus anciens & fameux géographes ont déterminé, &c. » M. de Lisle l’avoit d’abord conclu à 20 degrés cinq minutes de longitude occidentale par rapport à Paris, d’après les observations de messieurs Varin & Deshayes, faites en 1682 à Gorée, petite île d’Afrique, qui est à deux lieues du cap Verd ; mais il s’étoit arrêté ensuite au nombre rond de 20 degrés.
Il seroit sans doute plus sûr & plus commode de prendre pour point fixe un lieu plus connu, & dont la position fût mieux constatée ; tel, par exemple, que l’observatoire de Paris, & de compter ensuite la longitude orientale ou occidentale, en partant du méridien de ce lieu jusqu’au 180 degré de part & d’autre ; c’est ainsi que plusieurs astronomes & géographes le pratiquent aujourd’hui. Mais outre que cet usage n’est pas encore généralement établi, il seroit toûjours important de connoître la véritable position de l’île de Fer par rapport à Paris, pour profiter d’une infinité d’observations & de déterminations géographiques, qui ont été faites relativement à cette île.
C’est la plus occidentale des Canaries qu’on croit être les îles fortunées des anciens, & qui s’étendent peu-à-peu sur un même parallele au nombre de sept. Ptolomée au contraire qui n’en comptoit que six, plaçoit toutes les îles fortunées sur une même ligne du nord au sud, qu’il prenoit aussi pour le premier méridien, & il leur donnoit par conséquent à toutes la même longitude. De-là une infinité d’erreurs & d’équivoques dans nos premiers navigateurs ; plusieurs d’entre eux ayant pris indistinctement une de ces îles pour le point fixe d’où l’on devoit compter les longitudes de tous les autres lieux de la terre. M. le Monnier, dans les mém. de l’acad. de 1742, place l’île de Fer à 20 degrés deux minutes 30 secondes, à l’occident de Paris. Instit. astron.
Sans faire attention à toutes ces regles purement arbitraires sur la position du premier méridien, les Géographes & constructeurs de carte prennent assez souvent pour premier méridien, celui de leur propre ville, ou de la capitale de l’état où ils vivent ; & c’est de-là qu’ils comptent les degrés de longitude des lieux.
Les Astronomes choisissent dans leur calcul pour premier meridien, celui du lieu où ils font leurs observations. Ptolomée avoit pris celui d’Alexandrie ; Tycho Brahé, celui d’Uranibourg ; Riccioli celui de Boulogne ; Flamsteed prend l’observatoire royal de Greenwich ; & les Astronomes françois l’observatoire royal de Paris. Voyez Observatoire.
Comme c’est à l’horison que toutes les étoiles se levent & se couchent, de même c’est au méridien qu’elles sont à leur plus grande hauteur ; & c’est aussi dans le même méridien au-dessous de l’horison, qu’elles sont dans leur plus grand abaissement. Car puisque le méridien est situé perpendiculairement tant à l’égard de l’équateur, qu’à l’égard de l’horison, il est évident de-là qu’il doit diviser en parties égales soit au-dessus, soit au-dessous de l’horison, les segmens de tous les cercles paralleles ; & qu’ainsi le tems qui doit s’écouler entre le lever d’une étoile & son passage au méridien, est toûjours égal à celui qui est compris entre le passage au méridien & le coucher. Voyez Culmination.
On trouve dans les Transactions philosophiques des observations qui porteroient à soupçonner que les méridiens varieroient à la longue. Cette opinion se prouve par l’ancienne méridienne de saint Pétrone de Boulogne, qui maintenant ne décline pas moins, dit-on, que de huit degrés du vrai méridien de la ville, & par celle de Tycho à Uranibourg, qui, selon M. Picart, s’éloigne de 16 minutes du méridien moderne. S’il y a en cela quelque chose de vrai, dit M. Vallis, ce doit être une suite des changemens des poles terrestres, changement qu’il faut vraissemblablement attribuer à quelque altération dans le mouvement diurne, & non à un mouvement des points du ciel ou des étoiles fixes auxquelles répondent les poles de la terre.
En effet, si les poles du mouvement diurne restoient fixes au même point de la terre, les méridiens dont l’essence, pour ainsi dire, est de passer par les poles, resteroient toûjours les mêmes.
Mais cette idée que les méridiens puissent changer de position, semble détruite par les observations de M. de Chazelles, de l’académie des Sciences, qui étant en Egypte, a trouvé que les quatre côtés d’une pyramide construite 3000 ans auparavant, regardoient encore exactement les quatre points cardinaux ; position qu’on ne sauroit prendre pour un effet du hasard. Il est bien plus naturel de penser, ou qu’il y a eu quelque erreur dans les opérations de Tycho, & dans la méridienne de Boulogne, ou ce qui est encore plus vraissemblable, que le sol des endroits où ces méridiennes ont été tracées, sur-tout celle de Boulogne, peut avoir souffert quelque altération. Voyez Pole.
Méridien du globe ou de la sphere, c’est le cercle de cuivre dans lequel la sphere tourne & est suspendu ; il est divisé en quatre quarts ou 360 degrés en commençant à l’équateur. C’est sur ce cercle & à commencer de l’équateur, qu’on compte dans le globe céleste la déclinaison australe & boréale du soleil & des étoiles fixes, & dans les globes terrestres la latitude des lieux nord & sud ; il y a deux points sur ce cercle qu’on nomme poles ; & celui de ses diametres qui passe par ces deux points, est nommé l’axe de la terre dans le globe terrestre, ou l’axe des cieux dans le céleste ; parce que c’est sur ce diametre que la terre tourne.
On trace ordinairement 36 méridiens sur le globe terrestre, savoir de dix en dix degrés de l’équateur ou de longitude.
Les usages de ce cercle appellé méridien, sont d’arrêter par son moyen le globe à une certaine latitude, ou à une certaine hauteur de pole, ce qu’on appelle rectifier le globe, voyez Globe ; de faire connoître la déclinaison, l’ascension droite, la plus grande hauteur du soleil ou d’une étoile. Voyez encore l’article Globe.
Méridienne, ou Ligne méridienne, c’est une partie de la commune section du plan du méridien d’un lieu & de l’horison de ce lieu. On l’appelle quelquefois ligne du nord & sud, parce que sa direction est d’un pole à l’autre. Voyez Méridien.
On appelle aussi en général méridienne, la commune section du méridien & d’un plan quelconque, horisontal, vertical, ou incliné. Voyez plus bas Méridienne d’un cadran.
La ligne méridienne est d’un grand usage en Astronomie, en Géographie, en Gnomonique ; toutes ces sciences supposent qu’on sache la tracer exactement ; ce qui a fait que différens astronones se sont donnés les plus grands soins & la plus grande peine pour en décrire avec la derniere précision. Une des plus fameuses autrefois étoit celle qu’avoit tracé M. Cassiny sur le pavé de l’église de sainte Pétrone à Boulogne. Au toît de l’église, 1000 pouces au-dessus du pavé, est un petit trou à-travers lequel passe l’image du soleil ; de façon que dans le moment où cet astre est au méridien, elle tombe toûjours infailliblement sur la ligne, & elle y marque le progrès du soleil en différens tems de l’année par les différens points où elle correspond en ces différens tems.
Quand cette méridienne fut finie, M. Cassiny apprit aux Mathématiciens de l’Europe par un écrit public, qu’il s’étoit établi dans un temple un nouvel oracle d’Apollon ou du soleil, que l’on pouvoit consulter avec confiance sur toutes les difficultés d’Astronomie. On peut en voir l’histoire plus en détail dans l’éloge de cet astronome par M. de Fontenelle, Hist. acad. 1712. Voyez Solstice & Gnomon.
A Paris les plus célébres méridiennes de cette espece sont celles de l’Observatoire de Paris, & de S. Sulpice. Dans toutes ces méridiennes, qu’on peut regarder comme des especes d’instrumens, les plus grands dont les Astronomes se soient servis, le gnomon proprement dit, est une couverture d’environ un pouce de diametre, pratiquée à la voute, ou en quelque endroit de ces édifices, par où passent les rayons du soleil, dont l’image vient se projetter sur le plan horisontal de la méridienne : chez les anciens ce qu’on appelloit des gnomons, consistoit ordinairement en de grands obélisques élevés en plein air, & dans quelque grande place, au sommet desquels étoit un globe, ou une figure quelconque, qui faisoit l’office de cette ouverture, & dont l’ombre tenoit lieu de l’image solaire, en cela inférieurs à nos méridiennes, puisque cette ombre ainsi environnée de la lumiere du soleil ne pouvoit qu’être fort mal terminée, & d’autant plus mal, que le gnomon étoit plus grand, & le soleil plus bas, comme il arrive au tems du solstice d’hyver. Voyez gnomon.
M. le Monnier nous a donné dans les Mém de l’academie des Sciences de 1743, la description de la méridienne qu’il a tracée dans l’église de S. Sulpice, description que nous allons transcrire ici d’après l’historien de l’académie. Cette méridienne avoit été tracée il y avoit environ vingt ans par Henri Sully, fameux horloger anglois. L’ouverture en fut placée aux vitraux du bras méridional de la croisée à 75 piés de hauteur. Le mur opposé du bras septentrional n’en étoit intérieurement qu’à 180 piés ; d’où il suit que l’image du soleil, qui passoit par cette ouverture, ne pouvoit porter sur la ligne méridienne, tracée horisontalement sur le pavé de l’église que jusqu’au commencement de Novembre. Car on sait que le point de solstice d’hyver sur une pareille ligne à la latitude de Paris, s’éloigne du pié du stile ou du gnomon de plus du triple de sa hauteur ; ce qui donne plus de 225 ou 230 piés. Le soleil se peignoit donc alors sur le mur opposé ; & la méridienne continuée devenoit une ligne verticale.
M. le Monnier ayant pris garde à cette espece d’inconvénient, n’en a été frappé que pour le tourner au profit de l’astronomie. Il a fait hausser de 5 piés & reculer de 2 la grande plaque de métal, ce soleil doré qui en portoit l’ouverture, ou plutôt il y en a substitué une autre, qui est scellée dans l’épaisseur du mur, & qui n’en déborde que pour présenter aux rayons du soleil l’ouverture d’un pouce de diametre, ce qui la rend d’autant moins sujette à se dilater par le chaud, & à se resserrer par le froid, & l’on a entierement supprimé le jour de la fenêtre. Cette ouverture est donc présentement à 80 piés de hauteur au-dessus du pavé de l’église. A la partie inférieure du mur septentrional, où répond desormais la portion verticale de la nouvelle méridienne, qui se trouve à 18 pouces vers l’occident de la précédente : on a encastré en saillie un obélisque de marbre blanc de 30 à 35 piés de hauteur, sur une base ou piéd’estal de 4 à 5 piés de largeur, & à la face antérieure & exactement verticale de cet obélisque, sur la méridienne qui la coupe par le milieu, sont gravées les transversales de 3 minutes, & leurs subdivisions de 5 en 5 secondes, qui répondent aux bords supérieurs & inférieurs du soleil au solstice d’hyver. Voici les avantages qui résultent de toute cette construction.
L’image du soleil qui se peint sur un plan horisontal vers le tems du solstice d’hyver, étant desalongée sur le grand axe de la projection, se trouve par-là mal bornée sur cet axe, donne une grande pénombre, & ne peut par conséquent qu’indiquer assez imparfaitement la hauteur apparente du soleil. Ici au contraire l’image du soleil est presque ronde à ce solstice, & sa projection qui est d’environ 20 pouces de diametre en hauteur, approche d’autant plus d’être direct, qu’elle eût été plus oblique sur le plan horisontal ; elle est aussi d’autant moins affoiblie par ses bords.
Cette image au solstice d’hyver parcourt deux lignes par seconde sur l’obélisque où elle monte à environ 25 piés au-dessus du pavé de l’église, & un pou plus de 3 lignes, lorsque le soleil étant au parallele de Sirius, elle est descendue plus bas. Ainsi l’on y peut ordinairement déterminer le moment du midi, en prenant le milieu entre le passage des deux bords, à moins d’une demi-seconde, ou même d’un quart de seconde.
On doit sur-tout se servir de ce grand instrument pour déterminer les ascensions droites du soleil en hyver, & le véritable lieu de cet astre dans son périgée, ou, ce qui revient au même, dans le périhelie de la terre, les divers diametres dans les différentes saisons de l’année, les distances apparentes du topique, ou du solstice d’hyver à l’équateur, & enfin s’assurer si l’obliquité de l’écliptique est constante ou variable.
Dans la partie horisontale de la méridienne qui est la plus étendue, se trouve marqué le solstice d’été avec les divisions qui en indiquent l’approche. Toute cette partie de la ligne, ainsi que la verticale sur l’obélisque, est indiquée par une lame de cuivre de 2 lignes d’épaisseur, mise & enfoncée de champ dans le marbre.
Un inconvénient commun à toutes les méridiennes est que, par le peu de distance du point solsticial d’été au pié du stile, en comparaison de l’éloignement du point solsticial d’hyver, les divisions y sont extrémement resserrées, & qu’il est d’autant plus difficile par-là d’y déterminer le tems & le point précis où le soleil y arrive. La méridienne de S. Sulpice n’est pas exempte de ce défaut, quant à la partie qui répond au solstice d’été & à son gnomon de 80 piés de hauteur : il y a plus ; l’entablement de la corniche inférieure empêche le soleil d’y arriver, & en intercepte les rayons pendant plusieurs jours avant & après. Mais M. le Monnier a parfaitement remédié à tous ces défauts, & en a même tiré avantage par une seconde ouverture, qu’il a ménagée 5 piés plus bas que la premiere, & en-deçà vers le dedans de l’église, dans le même plan du méridien, & il y a ajusté & scellé un verre objectif de 80 piés de foyer, au moyen duquel l’image solaire projettée sur la partie correspondante de la méridienne, est exactement terminée & sans pénombre sensible. Cette partie est distinguée des autres par une grande table quarrée de marbre blanc de près de 3 piés de côté. L’image du soleil n’y parcourt qu’environ ligne & 2 secondes ; mais aussi on l’y détermine par ses bords à un demi ou à un quart de seconde près. Ce qui produit le même effet ou approchant que si l’image bien terminée y parcouroit 3 ou 4 lignes en une seconde, ou si le point du solstice d’été étoit à la même distance que celui du solstice d’hyver ; ou enfin si l’on observoit avec un quart de cercle à lunette de 80 piés de rayon ; avantage qu’aucune méridienne que l’on connoisse n’a eu jusqu’ici. L’objectif qui constitue cette nouvelle ouverture, & qui est d’environ 4 pouces de diametre, est renfermé dans une boite ou espece de tambour qui ferme à clef, & que l’on n’ouvre que quand il s’agit de faire l’observation du solstice.
Comme il est souvent difficile de trouver de grands objectifs d’une mesure précise, & telle qu’on la demande, on s’est servi de celui de 80 piés qu’on avoit, & qui étoit excellent, faute d’un de 82 a 83 piés qu’il auroit fallu employer pour un gnomon de 75 piés de hauteur : car c’est-là la distance du point solsticial d’été sur l’horisontale à l’objectif : mais le foyer de ces grand, objectifs n’est pas compris dans des limites si étroites, qu’ils ne rassemblent encore fort bien les rayons de la lumiere à quelques piés de distance, plus ou moins, & l’essai qu’on a fait de celui-ci justifie cette théorie.
Ce que nous ne devons pas omettre, & ce qui est ici de la derniere importance, c’est la solidité de tout l’ouvrage, & sur-tout de cette partie de la méridienne qui répond an solstice d’été, & à l’ouverture de 75 piés de hauteur. Rien n’est si ordinaire que de voir le pavé des grands vaisseaux tels que les églises, s’affaisser par succession de temps. Cet accident a obligé plusieurs fois de retoucher à la fameuse méridienne de S. Petrone, & ce ne peut être jamais qu’avec bien de la peine, & avec beaucoup de risques pour l’accord & la justesse du tout ensemble. Mais on n’a rien de pareil à craindre pour la méridienne de S. Sulpice. Tout ce pavé fait partie d’une voute qui est soutenue sur de gros piliers ; & l’un de ces piliers qui se trouve, non sans dessein, placé sous le point du solstice d’été, soutient la table de marbre blanc sur laquelle sont tracées les divisions qui répondent à ce solstice, & aux tems qui le précédent ou le suivent de près. On en avoit fixé la place à cet endroit, & pour cet usage, dès le tems qu’on a construit le portail méridional de S. Sulpice, & le mur où devoit être attaché l’objectif ; & comme les marbres, &-surtout les marbres blancs viennent enfin à s’user sous les pieds des passans, on a couvert celui-ci d’une grande plaque de cuivre, qu’on ne leve qu’au tems de l’observation. Toutes ces précautions, jointes à tant de nouvelles sources d’exactitudes, font de la méridienne de S. Sulpice un instrument singulier, & l’un des plus utiles qui aient jamais été procurés à l’Astronomie. L’obélisque est chargé d’une inscription qui conservera à la postérité la mémoire d’un si bel ouvrage, & du célebre astronome au soin duquel on en est redevable.
Maniere de tracer une méridienne. Nous supposons qu’on connoisse à-peu-près le sud, il faudra alors observer la hauteur FE, (Pl. astron. fig. 8.) de quelque étoile près du méridien HZRN, tenant alors le quart de cercle ferme sur son axe, de façon que le fil à plomb coupe toujours le même degré, & ne lui donnant aucun autre mouvement que de le diriger du côté occidental du méridien, on épiera le moment où l’étoile aura la même hauteur fe qu’auparavant ; enfin, on divisera en deux parties égales par la droite HR l’angle formé par les intersection des deux plans où le quart de cercle se sera trouvé dans le tems des deux observations avec l’horison, & cette droite HR sera la ligne méridienne.
Autre maniere. Décrivez sur un plan horisontal & du même centre (fig. 9) plusieurs arcs de cercle BA, ba, &c. Sur ce même centre C élevez un stile ou gnomon perpendiculaire à l’horison, & d’un pié ou d’un demi-pié de long. Vers le 21 Juin, entre 9 & 11 heures du matin, observez le point B, b, &c. où l’ombre du stile se terminera en différens instans, & des droites CB, Cb, décrivez des cercles. Observez ensuite l’après-midi les momens où l’ombre viendra couper de nouveau les mêmes cercles & les points A, a, où elle les coupera. Partagez ensuite les arcs de cercles AB, ab, en deux également aux points D, d, &c ; & si la même droite CD, qui passe par le centre C, commun à tous les cercles, & par le milieu D d’un des arcs passe aussi par le milieu d, &c. des autres arcs, ce sera la méridienne cherchée.
Tous ces cercles ainsi tracés, servent à donner plus exactement la position de la méridienne, parce que les opérations réitérées, pour la déterminer sur plusieurs cercles concentriques, peuvent servir à se corriger mutuellement.
Au reste, cette méthode n’est exacte qu’au tems des solstices, & sur-tout du solstice d’été, c’est-à-dire, vers le 21 Juin, comme nous l’avons prescrit : car dans toutes les autres saisons, la méridienne tracée déclinera de quelques secondes, soit à l’orient, soit à l’occident, à cause du changement du soleil en déclinaison, qui devient assez sensible, pour que cet astre, quoique à même hauteur, se trouve plus ou moins éloigné du méridien, le soir que le matin ; on corrigera donc cette erreur par les tables qui en ont été construites, ou en pratiquant les différentes méthodes que les Astronomes ont données pour cela. Voyez Correction du midi. (O)
Comme l’extrémité de l’ombre est un peu difficile à déterminer, il est encore mieux d’applatir le stile vers le haut, & d’y percer un petit trou qui laisse passer sur les arcs AB, ab, une tache lumineuse au-lieu de l’extrémité de l’ombre ; ou bien on peut faire les cercles jaunes au-lieu de les faire noirs, ce qui aidera à mieux distinguer l’ombre.
Divers auteurs ont inventé des instrumens & des méthodes particulieres pour décrire des méridiens, ou plutôt pour déterminer des hauteurs égales du soleil à l’orient & à l’occident ; mais nous nous abstiendrons de les décrire, parce que la premiere des méthodes que nous venons de donner suffit pour les observations astronomiques, ainsi que la derniere pour des occasions plus ordinaires.
Des méthodes que nous venons de décrite, il s’ensuit évidemment que le centre du soleil est dans le plan de la méridienne, c’est-à-dire, qu’il est midi toutes les fois que l’ombre de l’extrémité du stile couvre la méridienne. De là l’usage de la méridienne pour régler les horloges au soleil.
Il s’ensuit encore que, si on coupe la méridienne par une droite perpendiculaire OU, qui passe par C, cette droite sera l’intersection du premier vertical avec l’horison, & qu’ainsi le point O marquera l’orient, & le point U l’occident.
Enfin, si l’on éleve un stile perpendiculaire à un plan horisontal quelconque, qu’on fasse un signal au moment où l’ombre d’un autre stile couvrira une méridienne tirée du pié de ce dernier stile dans un autre plan, & qu’on marque le point où répondra en ce moment l’extrémité de l’ombre du premier stile, la ligne qu’on pourra tirer par ce point, & le pié du premier stile sera la méridienne du lieu du premier stile.
Méridienne d’un Cadran, c’est une droite qui se détermine par l’intersection du méridien du lieu avec le plan du cadran.
C’est la ligne de midi d’où commence la division des lignes des heures. Voyez Cadran.
Meridien magnétique, c’est un grand cercle qui passe par les poles de l’aimant, & dans le plan duquel l’aiguille magnétique, ou l’aiguille du compas marin se trouve. Voyez Aimant, aiguille, Boussole, Déclinaison, Variation, Compas, &c.
Hauteur méridienne du soleil ou des étoiles, c’est leur hauteur au moment où elles sont dans le méridien du lieu où on les observe. Voyez Hauteur.
On peut définir la hauteur méridienne, un arc d’un grand cercle perpendiculaire à l’horison, & compris entre l’horison & l’étoile, laquelle est supposée alors dans le méridien du lieu.
Maniere de prendre les hauteurs avec le quart de cercle. Supposons d’abord qu’on connoisse la position du méridien, on mettra exactement dans son plan le quart de cercle au moyen du fil aplomb, ou cheveu suspendu au centre. On pourra alors déterminer facilement les hauteurs meridiennes des étoiles, c’est-à dire, qu’on pourra faire les principales des observations sur lesquelles roule toute l’Astronomie.
La hauteur méridienne d’une étoile pourra se déterminer pareillement au moyen du pendule, en supposant qu’on connoisse le moment précis du passage de l’étoile par le méridien.