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ces insectes admirables qui produisent & travaillent le corail, n’auroient pas été méconnus & pris pour des fleurs si, par un préjugé mal-fondé, on n’eût pas regardé le corail comme une plante. Ainsi les erreurs où l’on pourroit tomber en comparant la forme des plantes à celle des animaux, ne porteront jamais que sur un petit nombre de sujets qui font la nuance entre les deux, & plus on fera d’observations, plus on se convaincra qu’entre les animaux & les végétaux, le créateur n’a pas mis de terme fixe ; que ces deux genres d’êtres organisés ont beaucoup plus de propriétés communes que de différences réelles ; que la production de l’animal ne coûte pas plus, & peut-être moins à la nature, que celle du végétal ; qu’en général la production des êtres organisés ne lui coûte rien ; & qu’enfin le vivant & l’animé, au lieu d’être un degré métaphysique des êtres, est une propriété physique de la matiere.

Après nous être tirés, à l’aide de la profonde métaphysique & des grandes idées de M. de Buffon, de la premiere partie d’un article très-important & très-difficile, nous allons passer a la seconde partie, que nous devons à M. d’Aubenton, son illustre collegue, dans l’ouvrage de l’Histoire naturelle générale & particuliere.

Les Animaux, dit M. d’Aubenton, tiennent la premiere place dans la division générale de l’Histoire naturelle. On a distribué tous les objets que cette science comprend en trois classes que l’on appelle regnes : le premier est le regne animal ; nous avons mis les animaux dans ce rang, parce qu’ils ont plus de rapport avec nous que les végétaux, qui sont renfermés dans le second regne ; & les minéraux en ayant encore moins, sont dans le troisieme. Dans plusieurs ouvrages d’Histoire naturelle, on trouve cependant le regne minéral le premier, & le regne animal le dernier. Les Auteurs ont crû devoir commencer par les objets les plus simples, qui sont les minéraux, & s’élever ensuite comme par degrés en parcourant le regne végétal, pour arriver aux objets les plus composés, qui sont les animaux.

Les Anciens ont divisé les animaux en deux classes ; la premiere comprend ceux qui ont du sang, & la seconde ceux qui n’ont point de sang. Cette méthode étoit connue du tems d’Aristote, & peut-être long-tems avant ce grand Philosophe ; & elle a été adoptée presque généralement jusqu’à présent. On a objecté contre cette division, que tous les animaux ont du sang, puisqu’ils ont tous une liqueur qui entretient la vie, en circulant dans tout le corps ; que l’essence du sang ne consiste pas dans sa couleur rouge, &c. ces objections ne prouvent rien contre la méthode dont il s’agit. Que tous les animaux ayent du sang, ou qu’il n’y en ait qu’une partie ; que le nom de sang convienne, ou non, à la liqueur qui circule dans le corps des autres, il suffit que cette liqueur ne soit pas rouge, pour qu’elle soit différente du sang des autres animaux, au moins par la couleur ; cette différence est donc un moyen de les distinguer les uns des autres, & fait un caractere pour chacune de ces classes : mais il y a une autre objection à laquelle on ne peut répondre. Parmi les animaux que l’on dit n’avoir point de sang, ou au moins n’avoir point de sang rouge, il s’en trouve qui ont du sang, & du sang bien rouge ; ce sont les vers de terre. Voilà un fait qui met la méthode en défaut : cependant elle peut encore être meilleure que bien d’autres.

La premiere classe, qui est celle des animaux qui ont du sang, est soûdivisée en deux autres, dont l’une comprend les animaux qui ont un poumon pour organe de la respiration, & l’autre, ceux qui n’ont que des oüies.

Le cœur des animaux qui ont un poumon a deux

ventricules, ou n’a qu’un seul ventricule ; ceux dont le cœur a deux ventricules sont vivipares, voyez Vivipare ; ou Ovipares, voyez Ovipare. Les vivipares sont terrestres ou aquatiques ; les premiers sont les quadrupedes vivipares. Voyez Quadrupede. Les aquatiques sont les poissons cétacées. V. Poisson. Les ovipares dont le cœur a deux ventricules, sont les oiseaux.

Les animaux dont le cœur n’a qu’un ventricule, sont les quadrupedes ovipares & les serpens. Voyez Quadrupede, Serpent.

Les animaux qui ont des oüies, sont tous les poissons, à l’exception des cétacées. Voyez Poisson.

On distingue les animaux qui n’ont point de sang en grands & en petits.

Les grands sont divisés en trois sortes : 1o. les animaux mous qui ont une substance molle à l’extérieur, & une autre substance dure à l’intérieur, comme le polype, la seiche, le calemar. Voyez Polype, Seiche, Calemar. 2o. Les crustacées. V. Crustacée. 3o. Les testacées. Voyez Testacées.

Les petits animaux qui n’ont point de sang, sont les insectes. Voyez Insecte. Ray. Sinop. anim. quad.

On a fait d’autres distributions des animaux qui sont moins compliquées ; on les a divisés en quadrupedes, oiseaux, poissons, & insectes. Les serpens sont compris avec les quadrupedes, parce qu’on a crû qu’ils n’étoient pas fort différens des lésards, quoiqu’ils n’eussent point de piés. Une des principales objections que l’on ait faites contre cette méthode, est qu’on rapporte au même genre des vivipares & des ovipares.

On a aussi divisé les animaux en terrestres, aquatiques, & amphibies : mais on s’est récrié contre cette distribution, parce qu’on met des animaux vivipares dans des classes différentes, & qu’il se trouve des vivipares & des ovipares dans une même classe ; les insectes terrestres étant dans une classe, & les insectes d’eau dans une autre, &c.

On peut s’assûrer par un examen détaillé, qu’il y a quantité d’autres exceptions aux regles établies par ces méthodes : mais après ce que nous avons dit ci-devant, on ne doit pas s’attendre à avoir une méthode arbitraire qui soit parfaitement conforme à la nature ; ainsi il n’est question que de choisir celles qui sont le moins défectueuses, parce qu’elles le sont toutes plus ou moins. Voyez Methode.

Les animaux prennent de l’accroissement, ont de la vie, & sont doüés de sentiment : par cette définition M. Linnæus les distingue des végétaux qui croissent & vivent sans avoir de sentiment, & des minéraux qui croissent sans vie ni sentiment. Le même Auteur divise les animaux en six classes : la premiere comprend les quadrupedes ; la seconde, les oiseaux ; la troisieme, les amphibies ; la quatrieme, les poissons ; la cinquieme, les insectes ; & la sixieme, les vers. Syst. nat. Voyez Quadrupede, Oiseau, Amphibie, Insecte, Ver . (I)

ANIMALCULE, animalculum, petit animal. On désigne le plus souvent par ce mot, des animaux si petits, qu’on ne peut les voir qu’à l’aide du microscope. Depuis l’invention de cet instrument, on a apperçû de petits animaux dont on n’avoit jamais eu aucune connoissance ; on a vû des corps mouvans dans plusieurs liqueurs différentes, & principalement dans les semences des animaux, & dans les infusions des graines des plantes. Hartsoeker & Leuwenhoek ont été les premiers auteurs de ces découvertes ; & ils ont assûré que ces corps mouvans étoient de vrais animaux : quantité d’autres observateurs ont suivi les mêmes recherches, & ont trouvé de nouveaux corps mouvans. Tous ont crû que c’étoit de vrais animaux ; de-là sont venus différens systèmes sur la génération,