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AMPLE, adj. (Maréchal.) est une épithete qu’on donne au jarret d’un cheval. Voyez Jarret. (V)

AMPLIATIF, adj. terme de Chancellerie Romaine, il se dit des Brefs ou Indults qui ajoûtent quelque chose aux concessions & priviléges contenus ès Indults & Brefs antérieurs. Voyez ci-dessous Ampliation. (H)

AMPLIATION, s. f. terme de Chancellerie, & singulierement de Chancellerie Romaine : un Bref ou Bulle d’ampliation, est la même chose qu’un Bref ampliatif. Voyez ci-dessus Ampliatif.

On appelloit autrefois Lettres d’ampliation, des Lettres qu’on obtenoit en petite Chancellerie à l’effet d’articuler de nouveaux moyens omis dans des Lettres de requête civile précédemment impétrées : mais l’usage de ces Lettres est à présent abrogé ; & l’Ordonnance de 1667 qui les a abrogées, a ordonné que ces moyens seroient articulés par une simple requête.

Ampliation, en termes de Finance, est un double qu’on garde d’une quittance ou autre acte portant décharge, à l’effet de le produire au besoin.

Ampliation, signifie encore en termes de Finance, l’expédition en papier d’un nouveau contract de rente sur la ville, que le Notaire fournit avec la grosse en parchemin, & que le rentier remet au payeur avec sa quittance pour recevoir.

Ampliations de contracts, en termes de Pratique, sont des copies de ces contracts, dont on dépose les grosses ès mains d’un Notaire, pour en délivrer des ampliations ou expéditions aux parties ou à des créanciers colloqués utilement dans un ordre, avec déclaration de l’intérêt que chaque créancier a dans ces contracts relativement à sa collocation dans l’ordre. (H)

AMPLIER, v. act. terme de Palais, usité dans quelques Tribunaux, signifie différer & mettre plus au large. Ainsi, amplier le terme d’un payement, c’est donner du tems au debiteur ; amplier un criminel, c’est différer le jugement de son procès ; amplier un prisonnier, c’est lui rendre sa prison plus supportable, en lui donnant plus d’aisance & de liberté. (H)

AMPLIFICATION, s. f. en Rhetorique ; forme que l’Orateur donne à son discours, & qui consiste à faire paroître les choses plus grandes ou moindres qu’elles ne sont en effet. L’amplification trouve sa place dans toutes les parties du discours, elle sert à la preuve, à l’exposition du fait, à concilier la faveur de ceux qui nous écoutent, & à exciter leurs passions. Par elle l’Orateur aggrave un crime, exagere une loüange, étend une narration par le développement de ses circonstances, présente une pensée sous diverses faces, & produit des émotions relatives à son sujet. Voyez Oraison &. Tel est ce vers de Virgile, où au lieu de dire simplement Turnus meurt, il amplifie ainsi son récit :

Ast illi solvuntur frigore membra,
Vitaque cum gemitu fugit indignata sub umbras.

Æneid. XII.

La définition que nous avons donnée de l’amplification, est celle d’Isocrate & même d’Aristote ; & à ne la considérer que dans ce sens, elle seroit plûtôt l’art d’un Sophiste & d’un Déclamateur, que celui d’un véritable Orateur. Aussi Cicéron la définit-il une argumentation véhémente ; une affirmation énergique qui persuade en remuant les passions. Quintilien & les autres maîtres d’éloquence font de l’amplification l’ame du discours : Longin en parle comme d’un des principaux moyens qui contribuent au sublime, mais il blâme ceux qui la définissent un discours qui grossit les objets, parce que ce caractere convient au sublime & au pathétique, dont il distingue l’amplification en ce que le sublime consiste uni-

quement dans l’élevation des sentimens & des mots, & l’amplification dans la multitude des uns & des autres. Le sublime peut se trouver dans une pensée unique, & l’amplification dépend du grand nombre. Ainsi ce mot de l’Ecriture, en parlant d’Alexandre, siluit terra in conspectu ejus, est un trait sublime ; pourroit-on dire que c’est une amplification ?

On met aussi cette différence entre l’amplification & la preuve, que celle-ci a pour objet d’éclaircir un point obscur ou controversé, & celle-là de donner de la grandeur & de l’élévation aux objets : mais rien n’empêche qu’un tissu de raisonnemens ne soit en même-tems preuve & amplification. Cette derniere est en général de deux sortes : l’une roule sur les choses, l’autre a pour objet les mots & les expressions.

La premiere peut s’exécuter de différentes manieres, 1°. par l’amas des définitions, comme lorsque Ciceron définit l’histoire : testis temporum, lux veritatis, vita memoriæ, magistra vitæ, conscia vetustatis. Voyez Définition.

2°. Par la multiplicité des adjoints ou circonstances : Virgile en donne un exemple dans cette lamentation sur la mort de César, où il décrit tous les prodiges qui la précéderent ou la suivirent :

Vox quoque per lucos vulgo exaudita silentes
Ingens ; & simulacra modis pallentia miris
Visa sub obscurum noctis ; pecudesque locutæ,
Insandùm, sistunt amnes, terræque dehiscunt,
Et mæstum illachrymat templis ebur, æraque sudant.

3°. On amplifie encore une chose par le détail des causes & des effets : 4°. par l’énumération des conséquences : 5°. par les comparaisons, les similitudes, & les exemples. Voyez Comparaison. &c. 6°. par des contrastes ou oppositions, & par les inductions qu’on en tire. Toutes ces belles descriptions des orages, des tempêtes, des combats singuliers, de la peste, de la famine, si fréquentes dans les Poëtes, ne sont que des amplifications d’une pensée ou d’une action simple développée.

L’amplification par les mots se fait principalement en six manieres : 1°. par des métaphores : 2°. par des synonymes : 3°. par des hyperboles : 4°. par des périphrases : 5°. par des répétitions auxquelles on peut ajoûter la gradation : 6°. par des termes nobles & magnifiques. Ainsi au lieu de dire simplement, nous sommes tous mortels, Horace a dit :

Omnes eòdem cogimur ; omnium
Versatur urnâ seriùs, ocyùs
Sors exitura, & nos in æternum
Exilium impositura cymbæ
. Od. Lib. II.

On amplifie une pensée générale en la particularisant, en la développant, & une pensée particuliere & restrainte, en remontant de conséquence en conséquence jusqu’à son principe. Mais on doit prendre garde dans l’amplification, comme en tout autre ouvrage du ressort de l’éloquence, de sortir des bornes de son sujet, défaut ordinaire aux jeunes gens que la vivacité de leur imagination emporte trop loin. Les plus grands Orateurs ne se sont pas toûjours eux-mêmes préservés de cet écueil ; & Cicéron lui-même, dans un âge plus mûr, condamna cette longue amplification qu’il avoit faite sur le supplice des parricides dans son oraison pour Roscius d’Amerie, qui lui attira cependant de grands applaudissemens. Il impute au caractere bouillant de la jeunesse l’affectation qu’il eut alors de s’étendre avec complaisance sur des lieux communs qui n’alloient pas directement à la justification de sa partie. (G)

* AMPLISSIME, adj. superl. amplissimus, qualité dont on honore chez les étrangers & dans les Colléges quelques personnes constituées en dignité : on