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AMBULANT, adj. pris subst. (Comm.) On appelle ambulans dans les Fermes du Roi des Commis qui n’ont point de bureau fixe, mais parcourent tous les bureaux d’un certain département, pour voir s’il ne se passe rien contre les droits du Roi & l’intérêt de la Ferme. Voyez Commis, Droits, Ferme, etc.

Ambulant se dit aussi à Amsterdam des Courtiers ou Agens de change qui n’ont pas fait serment par-devant les Magistrats de la ville. Ils travaillent comme les autres, mais ils ne sont pas crus en justice. Voyez Agent de change & Courtier. (G)

Ambulant (en Manege) se dit d’un cheval qui va l’amble. Voyez Amble. (V)

AMBULATOIRE, adj. (Jurisprud.) terme qui se disoit des Juridictions qui n’avoient point de Tribunal fixe, mais qui s’exerçoient tantôt dans un lieu & tantôt dans un autre, pour les distinguer de celles qui étoient sédentaires. Voyez Cour. Ce mot est dérivé du verbe latin ambulare, aller & venir. Les Parlements & le Grand Conseil étoient des Cours ambulatoires.

On dit en Droit, en prenant ce terme au sens figuré, que la volonté de l’homme est ambulatoire jusqu’à sa mort ; pour signifier que jusqu’à sa mort, il lui est libre de changer & révoquer comme il lui plaira ses dispositions testamentaires.

Les Polonois, sans en excepter la Noblesse & la Cour ne prennent plaisir qu’à la vie errante et ambulatoire Dalerac, tom. II op. 76. cap iv.

En vain les hommes ont prétendu fixer leur séjour dans les cités ; le désir qu’ils ont tous d’en sortir pour aller de côté & d’autre, montre bien que la nature les avoit fait pour mener une vie active & ambulatoire. (H)

* AMBULON, arbre qui croit dans l’île Aruchit, et porte un fruit semblable à celui de la canne de sucre, & de la grosseur de la graine de coriandre. Ray.

* AMBULTI, (Myt.) terme qui désigne prolongation, & dont on a fait le surnom d’Ambulti qu’on donnoit à Jupiter, à Minerve, & aux Tyndarides, d’après l’opinion où l’on étoit que les dieux prolongeoient leur vie à discrétion.

* AMBUELLA ou AMBOILLA, contrée d’Afrique au royaume du Congo, entre le lac d’Aquelonde & Saint-Salvador.

AMBURBIUM, ou AMBURBIALE SACRUM (Hist. anc.) étoit une fête ou cérémonie de religion, usitée chez les Romains, qui consistoit à faire processionnellement le tour de la ville en-dehors. Ce mot est composé du verbe Latin ambire, aller autour, & urbs, ville. Scaliger, dans ses notes sur Festus, a prétendu que les amburbia étoient la même chose que les ambarvalia ; & il n’est pas le seul qui l’ait prétendu. Les victimes qu’on menoit à cette procession, & qu’on sacrifioit ensuite, s’appelloient du mot amburbium, amburbiales victimæ, Voyez Ambarvales. (G)

* AMDENAGER, un des royaumes de Kunkam, ou du grand pays compris entre le Mogol & le Malabar.

AME, s. f. Ord. Encycl. Entend. Rais. Philos. ou. Science des Esprits de Dieu, des Anges, de l’Ame. On entend par ame un principe doüé de connoissance & de sentiment. Il se présente ici plusieurs questions à discuter : 1o . quelle est son origine : 2o . quelle est sa nature : 3o . quelle est sa destinée : 4o . quels sont les êtres en qui elle réside.

Il y a eu une foule d’opinions sur son origine ; & cette matière a été extrêmement agitée dans l’antiquité, tant payenne que chrétienne. Il ne peut y avoir que deux manières d’envisager l’ame, ou comme une qualité, ou comme une substance. Ceux qui pensoient qu’elle n’étoit qu’une pure qualité,

comme Epicure, Dicéarchus, Aristoxène, Asclepiade & Galien, croyoient & devoient nécessairement croire qu’elle étoit anéantie à la mort. Mais la plus grande partie des Philosophes ont pensé que l’ame étoit une substance. Tous ceux qui étoient de cette opinion, ont soutenu unanimement qu’elle n’étoit qu’une partie séparée d’un tout, que Dieu étoit ce tout, & que l’ame devoit enfin s’y réunir par voie de réfusion. Mais ils différoient entr’eux sur la nature de ce tout ; les uns soutenant qu’il n’y avoit dans la nature qu’une seule substance, les autres prétendant qu’il y en avoit deux. Ceux qui soutenoient qu’il n’y avoit qu’une seule substance universelle, étoient de vrais athées : leurs sentimens & ceux des Spinosistes modernes sont les mêmes ; et Spinosa sans doute a puisé ses erreurs dans cette source corrompue de l’antiquité. Ceux qui soutenoient qu’il y avoit dans la nature deux substances générales, Dieu & la matière, concluoient en conséquence de cet axiome fameux, de rien rien, que l’une & l’autre étoient éternelles : ceux-ci formoient la classe des Philosophes Théistes & Déistes, approchant plus ou moins suivant leurs différentes subdivisions, de ce qu’on appelle le Spinosisme. Il faut remarquer que tous les sentimens des anciens sur la nature de Dieu, tenoient beaucoup de ce système absurde. La seule barrière qui soit entr’eux & Spinosa, c’est que ce Philosophe ainsi que Straton, destituoit & privoit de la connoissance & de la raison cette force répandue dans le monde, qui selon lui en vivifioit les parties & entretenoit leur liaison, au lieu que les Philosophes Théistes donnoient de la raison & de l’intelligence à cette ame du monde. La divinité de Spinosa n’étoit qu’une nature aveugle, qui n’avoit ni vie ni sentiment, & qui néanmoins avoit produit tous ces beaux ouvrages, & y avoit mis sans le savoir une symmétrie & une subordination qui paroissent évidemment l’effet d’une intelligence très-éclairée, qui choisit & ses fins & ses moyens. La divinité des Philosophes au contraire étoit une intelligence éclairée, qui avoit présidé à la formation de l’univers. Ces Philosophes ne distinguoient Dieu de la matière, que parce qu’ils ne donnoient le nom de matière qu’à ce qui est sensible & palpable. Ainsi Dieu étant dans leur système une substance plus déliée, plus agile, plus pénétrante que les corps exposés à la perception des sens, ils lui donnoient le nom d’esprit quoique dans la rigueur il fût matériel. Voyez l’article de l’Immatérialisme, où nous prouvons que les anciens Philosophes n’avoient eu aucune teinture de la véritable Spiritualité. Nous y prouverons même que les idées des premiers Pères, encore un peu teintes de la sagesse humaine, n’avoient pas été nettes sur la spiritualité : il est si commode de raisonner par imitation, si difficile de ne rien conserver de ce qu’on a chéri long-tems, si naturel de justifier ses pensées par la droiture de l’intention, que souvent on est dans le piège sans l’avoir craint ni soupçonné. Ainsi les Pères imbus & pénétrés, s’il est permis de parler ainsi, des principes des Philosophes Grecs, les avoient portés avec eux dans le Christianisme.

Parmi les Théistes, les uns ne reconnoissoient qu’une seule personne dans la Divinité, les autres deux ou trois : ensorte que les premiers croyoient que l’ame étoit une partie du Dieu suprème, & les derniers croyoient seulement qu’elle étoit une partie de la seconde ou de la troisième hypostase, ainsi qu’ils l’appelloient. De même qu’ils multiplierent les personnes de la Divinité, ils multiplierent la nature de l’ame. Les uns en donnoient deux à chaque homme ; les autres encore plus libéraux lui en donnoient trois : il y avoit l’ame intellectuelle, l’ame sensitive, & l’ame végétative. Mais l’on doit observer