briller la beauté de leur organe et la perfection de leur technique vocale, devient parfois, pour le compositeur, un puissant moyen d’expression.
Mais c’est dans la musique instrumentale, surtout, que se maintiennent constamment et librement les traditions lointaines, sans cesse à nouveau vivifiées, de la mélodie mélismatique. Chez Bach, chez Beethoven, chez César Franck, leur chaîne se continue.
Entre les notes radicales se glissent
et s’enroulent les courbes sonores qui
en achèvent le sens et la beauté. Notes
de passage, M., variations, la définition
absolue en reste malaisée, et d’ailleurs,
superflue. Leur amalgame est si fondu,
leur cohésion si parfaite, qu’on voit
donner, dans la langue anglaise, le
nom même de M. à « toute espèce d’air
ou de mélodie qui ne consiste pas en
une pure déclamation ». (Voy. Mélodie,
Ornement, Variation, Vocalise.)
Mélodie, n. f. Succession de sons ordonnée de manière à présenter un sens musical qui satisfasse l’oreille et l’intelligence. En impliquant dans sa définition l’obligation d’être « agréable », l’Académie a sanctionné l’opinion vulgaire, d’après laquelle toute M., pour mériter son nom, doit charmer les sens. C’est, en effet, par l’empire qu’exerce parfois instantanément sur notre âme une belle M., que se manifeste le pouvoir mystérieux des sons. Les causes de ce pouvoir demeurent partiellement inexpliquées et s’il est possible, par l’analyse, de disséquer une M., l’art d’en créer de nouvelles, qui atteignent au même degré de puissance émotive, échappe à l’enseignement. Ce fait a engendré le concept populaire de l’inspiration en musique. De la nature en apparence spontanée de la M., est née aussi l’habitude de l’opposer à l’harmonie, non seulement du point de vue technique et comme synonyme de l’homophonie, ou chant nu, à une seule voix ou à plusieurs voix à l’unisson, vis-à-vis de la polyphonie, ou réunion de plusieurs sons, de plusieurs parties entendues simultanément, mais du point de vue général, en tant que musique simple, musique naturelle, en face de la musique « savante ». Rameau, en proclamant que « la M. naît de l’harmonie », parut donc soutenir un paradoxe ; mais la constatation du rôle essentiel que jouent dans la M. artistique ainsi que dans les M. primitives, les intervalles constitutifs de l’accord parfait et les premiers harmoniques fournis par la résonance du corps sonore, vient lui donner raison. Le reproche de « manquer de M. » est un autre lieu commun par lequel une partie du public a coutume de motiver sa méfiance à l’égard des œuvres qui lui sont inconnues ; ce criterium n’a d’autre fondement que l’adaptation du goût aux formes prépondérantes à une époque donnée et auprès desquelles des M. antérieures, étrangères, ou nouvelles, peuvent sembler désuètes, obscures ou amorphes. En réalité, les formes de la M. sont d’une variété illimitée. Comme celle du langage, elles se développent, s’enrichissent, se renouvellent, naissent, disparaissent, ressuscitent incessamment et revêtent des expressions propres à chaque temps, à chaque peuple, à chaque maître. Deux éléments lui donnent l’existence, que représentent l’espace et la durée : l’espace, par la différenciation des intervalles, et de leurs relations