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n’ont point vaincu l’idolâtrie par l’argent, l’éloquence ou tout autre moyen naturel. Il faut donc reconnaître forcément en eux une vertu divine puisque leur couvre est au-dessus de toute force humaine. Jésus-Christ resta donc sur la terre encore quarante jours après sa résurrection, et il se montra fréquemment à ses apôtres, afin qu’ils pussent bien s’assurer de la vérité, eh bien se convaincre qu’il n’était point un fantôme ; mais, à cette première preuve, il voulut en ajouter une seconde, et, comme nous le dit saint Luc, « il mangea avec eux ». Aussi les apôtres ont-ils toujours soin de citer ce fait comme un témoignage certain de sa résurrection. « Nous avons mangé », disent-ils, « et nous avons bu avec lui ». (Act. 10,41)
Mais quel était l’objet de ces fréquentes apparitions ? Saint Luc nous l’apprend par ces mots : « Il leur apparaissait et leur parlait du royaume de Dieu ». Les apôtres étaient découragés et troublés par tout ce qui était arrivé ; et, en outre, Jésus-Christ allait les lancer sur de terribles champs de bataille : il leur découvre donc l’avenir pour les fortifier, et « leur commande de ne point quitter Jérusalem, mais d’y attendre la promesse du a Père ». D’abord, dans le premier instant de leur crainte et de leur frayeur, il les avait amenés dans la Galilée, afin qu’ils pussent écouter sa parole avec plus d’assurance et de liberté ; mais, après qu’ils eurent entendu cette parole, et joui de ses entretiens pendant quarante jours, « il leur commanda de ne point quitter Jérusalem » ; et pourquoi ? Le général retient ses soldats dans les rangs jusqu’à ce qu’ils soient complètement armés, et il ne lance point sa cavalerie avant que chaque cheval n’ait reçu son cavalier ; et ainsi Jésus-Christ ne veut point que ses apôtres affrontent le combat sans avoir reçu l’Esprit-Saint, de peur qu’ils ne succombent sous la multitude de leurs ennemis.
J’ajoute encore deux autres raisons : la première, qu’un grand nombre de Juifs devaient croire dans Jérusalem, et la seconde, pour qu’on ne dît pas qu’abandonnant leurs amis et leurs concitoyens, ils allaient par orgueil prêcher l’Évangile à des peuples étrangers. C’est pourquoi ils annonceront d’abord la résurrection de Jésus-Christ à ces mêmes Juifs qui l’ont mis à mort, qui l’ont crucifié et enseveli, et dans les lieux mêmes où ce déicide a été commis. Disons aussi que rien ne frappa davantage les païens ; car, voyant la conversion (le ceux mêmes qui avaient crucifié Jésus-Christ, ils en conclurent la réalité de leur crime et la certitude des mystères de la croix et de la résurrection. Enfin, Jésus-Christ veut en dernier lieu prévenir cette objection que pouvaient lui faire les apôtres : Comment nous, qui sommes si peu nombreux et si faibles, pourrons-nous vivre au milieu de cette foule d’hommes pervers et homicides ? Mais voyez comme le divin Sauveur aplanit d’avance et résout toutes les difficultés « en leur commandant d’attendre la promesse du Père, que vous avez », dit-il, « entendue de ma bouche ». Et quand est-ce qu’ils l’ont entendue ? Lorsqu’il leur avait dit : « il vous est avantageux que je m’en aille, car, si je ne m’en vais, l’Esprit consolateur ne viendra pas en vous » ; et encore : « Je prierai mon Père et il vous enverra un autre Consolateur qui demeurera avec vous ». (Jn. 16,14, 16)
5. Et maintenant pourquoi l’Esprit-Saint ne fut-il pas donné en présence même de Jésus-Christ, ou du moins immédiatement après son ascension. Car Jésus-Christ ne monta au ciel que le quarantième jour, et le Saint-Esprit ne descendit sur les apôtres que le cinquantième ; en outre, puisque l’Esprit-Saint n’avait pas encore été donné, comment Jésus-Christ avait-il pu dire : « Recevez l’Esprit-Saint ? » (Jn. 20,22) Je réponds à cette dernière objection que, par cette parole, Jésus-Christ disposait et préparait ses apôtres à recevoir l’Esprit-Saint. Car si le prophète Daniel trembla à la vue d’un ange, combien plus l’approche d’une si grande grâce devait-elle troubler les apôtres ! On peut répondre aussi que le Sauveur parlait de ce qui devait arriver, comme d’une chose déjà faite. C’est ainsi qu’il avait dit à ces mêmes apôtres : « Foulez aux pieds les serpents et les scorpions, et toute la puissance de l’ennemi ». (Lc. 10,19)
Mais pourquoi la descente du Saint-Esprit n’eut-elle pas lieu immédiatement ? C’est qu’il fallait que, par l’ardeur de leurs désirs, les apôtres méritassent de la recevoir. De plus, l’Esprit-Saint ne descendit sur eux que lorsque Jésus-Christ les eut quittés, car s’il fût venu pendant que le divin Sauveur était au milieu d’eux, ils l’eussent beaucoup moins désiré ; et il différa même huit ou neuf jours après l’ascension, parce que rien ne nous porte plus à Dieu que le sentiment du besoin. Ainsi Jean