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« Si j’étais de ce monde, mes gens auraient combattu pour m’empêcher de tomber entre les mains des Juifs ». Par où Jésus-Christ fait connaître la faiblesse du royaume terrestre, qui tire toute sa force et sa puissance de ses sujets. Mais le royaume céleste se, suffit à lui-même et n’a besoin de personne.
Les hérétiques saisissent ces paroles et s’en servent pour appuyer leur erreur : ils disent que Jésus-Christ n’a rien de commun avec le Créateur. Mais que répondront-ils à ce que l’Écriture dit de ce même Jésus-Christ : « Il est venu chez soi ? » (Jn. 1,11) Que répondront-ils à ce qu’il dit lui-même ; « Ils ne sont point du monde, comme je ne suis point » moi-même « du monde ? » (Jn. 17,14) C’est ainsi, c’est en ce sens qu’il dit que son royaume n’est point d’ici. En quoi il n’exclut pas le monde de son royaume, mais il montre, comme je l’ai dit, que son royaume n’est point humain, ni passager, ni périssable.
Que répliqua Pilate ? « Vous êtes donc roi ? Jésus lui repartit : Vous le dites, que je suis roi. C’est pour cela que je suis né (37) ». Donc s’il est né roi, il est également né avec toutes les dépendances de la royauté ; et il n’a rien qu’il ait reçu, mais il possède tout par lui-même. Lors donc que vous entendez ces paroles : « Comme le Père a la vie en lui-même, il a aussi donné au Fils d’avoir la vie » (Jn. 5,26), ne les entendez d’aucune autre chose que de la génération. Entendez et expliquez de même tous les autres endroits de l’Écriture, qui sont semblables à celui-là. « Et je suis venu afin de rendre témoignage à la vérité » ; c’est-à-dire afin d’enseigner la vérité à tous les hommes, et de la leur persuader.
5. Pour vous, mes chers frères, vous qui avez entendu ce récit, vous qui voyez qu’on a lié le Seigneur, qu’on l’a mené de côté et d’autre, et traduit de tribunaux en tribunaux, ne faites aucun cas des choses présentes. Eh ! comment ne serait-il pas déraisonnable et absurde, Jésus-Christ ayant souffert pour vous tant et de si grands tourments, de ne pouvoir même pas supporter pour lui des paroles ? On crache sur son visage, et vous vous parez de riches habits, de bijoux et de pierreries. Et si tout le monde ne vous donne pas des marques de vénération et de respect, vous ne croyez pas vivre. Jésus-Christ est outragé, moqué, reçoit de honteux soufflets sur la joue ; et vous voulez qu’on vous honore toujours, et vous ne voulez point participer aux opprobres de Jésus-Christ. Vous n’écoutez pas ce que vous dit saint Paul : « Soyez mes imitateurs, comme je le suis moi-même de Jésus-Christ ». (1Cor. 10,1) Lors donc que quelqu’un vous déshonore, souvenez-vous de votre Seigneur, que les Juifs adoraient par dérision, en se jouant de lui ; qu’ils déshonoraient par leurs actions et par leurs paroles et dont ils faisaient mille railleries et mille moqueries, lorsque non seulement il ne leur rendait point la pareille, ni le mal pour le mal, mais leur donnait au contraire des témoignages de sa douceur et de sa clémence.
Imitons-le donc, ce divin Sauveur ; par là nous pourrons nous délivrer de toutes sortes d’ignominies. Car ce n’est pas celui qui injurie, mais c’est celui qui s’abat et s’afflige, qui rend l’injure sensible. Si vous n’étiez pas impatient, vous ne recevriez point d’injures. La peine que cause une injure, ne vient pas de celui qui la fait, mais de celui qui la reçoit. Pourquoi vous affligez-vous ? Si c’est injustement que cet homme vous injurie, vous ne devriez point vous fâcher, mais plutôt le prendre en compassion. Si c’est justement, vous devez à plus forte raison demeurer tranquille. Si étant pauvre, vous vous entendiez appeler riche, cette louange ne vous toucherait point, mais vous la prendriez plutôt pour une plaisanterie ; de même si celui qui vous injurie, dit des faussetés de vous, cela ne vous regarde point ; vous ne devez nullement vous en émouvoir. Que si la conscience vous fait des reproches, ne vous troublez point de ce que l’on dit de vous ; mais amendez votre vie, mais corrigez-vous réellement de vos défauts. Je dis cela au sujet des injures véritables. Si l’on vous reproche votre pauvreté et votre basse naissance, vous en devez rire. Ces sortes d’injures ne déshonorent pas celui qui les reçoit, mais celui qui les dit, comme incapable de philosopher ou de raisonner.
Mais, direz-vous, quand on tient ces discours en présence de beaucoup de personnes qui ignorent la vérité, alors la blessure devient insupportable. C’est tout le contraire, alors elle est très-supportable, lorsqu’étant environné d’un grand nombre de témoins, tous vous louent et vous applaudissent, blâment celui qui n’a su ce qu’il disait, et se