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HOMÉLIE LXXXII.


JE LEUR AI DONNÉ VOTRE PAROLE, ET LE MONDE LES A HAÏS, PARCE QU’ILS NE SONT POINT DU MONDE COMME JE NE SUIS POINT MOI-MÊME DU MONDE. (VERS. 14. JUSQU’À LA FIN DU CHAP)

ANALYSE.

  • 1. Les disciples de Jésus-Christ ne sont pas du monde, Jésus-Christ est égal à Dieu son Père. – Je me sanctifie veut dire je me sacrifie.
  • 2. Jésus-Christ recommande à ses disciples la paix et l’union qui attireront à eux les hommes plus que les miracles mêmes.
  • 3. Nul ne connaît Dieu, sinon ceux qui connaissent le Fils.
  • 4. Croire en Dieu, et l’aimer. – L’infidèle plus charitable que le chrétien. – Combien Dieu nous a donné d’occasions de faire le bien. – À quoi on prodigue son argent et son bien. – Énumération des vices des chrétiens ; on ne va à l’église que pour voir et pour être vu. – Dureté envers les pauvres, tandis que l’on fait mille dépenses superflues. – On voit le mal, personne ne le corrige ; au contraire, plusieurs portent envie à ceux qui le font, et sont fâchés de n’en pouvoir faire autant.


1. Lorsque les gens de bien sont persécutés par les méchants, lorsque ceux qui exercent la vertu et la recherchent sont l’objet des dérisions et des railleries de ces hommes, ils ne doivent nullement s’en offenser ni s’en affliger. C’est le propre de la vertu d’attirer de toutes parts la haine des méchants. Comme ils portent envie à ceux qui vivent bien, et qu’ils croient se couvrir et se cacher en ternissant la gloire d’autrui ; ils les haïssent et n’épargnent rien pour les déshonorer, parce qu’ils marchent par une autre voie, parce qu’ils mènent une vie toute différente de la leur. Mais ne nous en affligeons point, mes chers frères, c’est là un des signes auxquels se reconnaît la vertu. Voilà pourquoi Jésus-Christ dit : « Si vous étiez du monde, le monde aimerait ce qui serait à lui » (Jn. 15,19) ; et en un autre endroit : « Malheur à vous lorsque tous les hommes diront du bien de vous ! » (Lc. 6,26) Voilà pourquoi il dit encore ici : « Je leur ai donné votre parole et le monde les a haïs ». Et il explique pour quelle raison ils sont dignes que le Père ait d’eux un si grand soin ; c’est pour vous, dit-il, c’est parce qu’ils gardent votre parole qu’ils sont haïs ; ils sont donc tout à fait dignes de votre providence et de votre protection.
« Je ne vous prie pas de les ôter du monde, mais de les garder du mal (15) ». Le Sauveur explique encore sa parole et la rend plus claire et plus intelligible. Par là il veut déclarer simplement qu’il a un grand soin de ses disciples, puisqu’il les recommande avec tant de zèle et d’ardeur. Mais cependant il leur avait dit que tout ce qu’ils demanderaient à son Père, son Père le leur donnerait (Jn. 16,23) ; pourquoi donc prie-t-il pour eux ? Il ne prie, comme j’ai dit, que pour leur montrer son amour.
« Ils ne sont point du monde, comme je ne suis point moi-même du monde (16) ». Pourquoi a-t-il donc dit ailleurs : « Ceux que vous avez pris du monde pour les donner étaient à vous ? » (Id. 17,6) Là, le Sauveur parlait de leur nature ; ici, sous le nom de monde, il parle des mauvaises œuvres que font les méchants, et il fait un grand éloge de ses disciples ; premièrement, il dit qu’ils ne sont point du monde ; en second lieu, que le monde les hait parce que c’est lui qui les lui a donnés, et qu’ils gardent sa parole. Que si Jésus-Christ dit : « Comme je ne suis point moi-même du monde », ne vous troublez point. Ce mot « Comme », ne marque pas ici une similitude exacte. Si le mot « comme », dit du Père et du Fils, marque alors une grande égalité, à cause de l’unité de nature, c’est bien différent